Deux hommes ont été inculpés mardi du meurtre de l'extrémiste sud-africain Eugène Terre'Blanche par le tribunal de Ventersdorp (nord-ouest), devant lequel des centaines de Noirs et de Blancs se sont défiés dans la matinée.
Chris Malhongo, 28 ans, et son co-accusé mineur, âgé de 15 ans, ont été mis en examen pour meurtre, effraction, tentative de vol et atteinte à la dignité de la victime, qui a été dénudée, a précisé le procureur George Baloi. Ils resteront en détention jusqu'à la prochaine audience, fixée au 14 avril, au cours de laquelle leurs avocats pourront demander une remise en liberté sous caution.
Eugène Terre'Blanche, leader du Mouvement de résistance afrikaner (AWB), une formation néonazie responsable d'attentats meurtriers dans les dernières années de l'apartheid, a été battu à mort samedi sur sa ferme de Ventersdorp, à une centaine de kilomètres à l'ouest de Johannesburg.
Deux de ses ouvriers agricoles s'étaient immédiatement livrés à la police. Ils avaient expliqué s'être énervés parce que leur patron refusaient de leur verser un salaire mensuel de 300 rands (30 euros).
Leur comparution mardi devant le tribunal de cette petite bourgade a attiré des centaines de personnes dans un climat de tension extrême.
Pour empêcher tout débordement, la police a été obligée de dresser une clôture de fil de fer séparant les partisans de l'extrême droite blanche des Noirs. Les deux groupes ont échangé provocations et invectives pendant toute la matinée.
D'un côté de la clôture, les partisans de l'AWB arboraient des chemises kaki à l'emblème de leur formation (trois sept renversés évoquant la swatiska nazie) et brandissaient l'ancien drapeau de l'Afrique du Sud d'apartheid.
De l'autre, certains Noirs portaient des T-shirts du Congrès national africain (ANC), au pouvoir depuis la chute de l'apartheid, ou du président Jacob Zuma.
À l'ancien hymne national en afrikaans (une langue dérivée du hollandais parlée par les descendants des premiers colons européens), entonné par les uns, répondaient l'hymne de la démocratie et des chants de la lutte anti-apartheid, scandés par les autres.
Une bagarre a éclaté sur la ligne de séparation et a été rapidement contenue.
Les partisans de l'AWB ont quitté les abords du tribunal en milieu de journée, le mouvement ayant appelé à la modération.
Ils n'étaient plus là quand les deux suspects ont été évacués du Palais de Justice, sous les vivats des Noirs. «Je n'approuve pas ce qu'ils ont fait, ils n'auraient pas dû le tuer. Mais ils étaient en colère (...), on ne peut pas travailler pour rien», a expliqué l'un d'eux en requérant l'anonymat.
Le meurtre d'Eugène Terre'Blanche a ravivé les tensions raciales dans un pays où la couleur de la peau reste déterminante seize ans après la fin du régime ségrégationniste.
Pour apaiser la situation, le président Jacob Zuma a immédiatement appelé au calme et demandé dans une allocution télévisée aux leaders politiques de favoriser l'unité du pays.
Mais la polémique s'est déplacée sur une chanson héritée de la lutte anti-apartheid qui appelle à «tuer les Boers», défendue par l'ANC au titre de la mémoire historique bien qu'elle ait été interdite par la Justice pour incitation à la haine raciale.
L'AWB affirme que ce chant revient à une «déclaration de guerre» contre les fermiers blancs.
Eugène Terre'Blanche doit être enterré vendredi sur sa ferme. - AFP