Responsables politiques et médias en Iran ont salué la mémoire de Maryam Mirzakhani, première femme "Nobel" de mathématiques décédée samedi aux Etats-Unis.
La plupart des journaux ont publié en Une de grandes photos, y compris sans voile, pour saluer la mémoire de cette mathématicienne morte d'un cancer à l'âge de 40 ans.
"La génie de la mathématique a cédé devant la puissance de la mort", titre en Une le quotidien conservateur Hamshahri qui publie une photo de la mathématicienne non voilée. C'est aussi le cas du quotidien économique Donaye Eghtessad qui titre: "Départ final de la reine des mathématiques".
Le président Hassan Rohani avait publié dès hier une photo non voilée de la mathématicienne sur son compte Instagram en déplorant sa "triste disparition".
En Iran, toutes les femmes doivent porter le voile pour couvrir leur chevelure et les médias ne publient pas de photo non voilée de femmes iraniennes.
Maryam Mirzakhani, née en 1977, avait obtenu en août 2014 la médaille Fields, considérée comme le "prix Nobel" de la discipline.
Cette spécialiste de la géométrie des formes inhabituelles avait découvert de nouvelles façons de calculer les volumes d'objets avec des surfaces hyperboliques, comme par exemple une selle de cheval.
Le quotidien Hafte Sobh rappelle qu'il y a vingt ans, la mathématicienne avait échappé à la mort. Elle se trouvait dans un autobus qui ramenait des étudiants en mathématiques de l'université Sharif de Téhéran, la plus prestigieuse du pays, d'une conférence sur cette discipline organisée en province.
A l'époque, sept des meilleurs étudiants de l'université avaient trouvé la mort dans l'accident, écrit le journal, rappelant que la presse avait qualifié le jour de l'accident de "mardi noir". "Elle a rejoint ses sept camarades", ajoute le quotidien.
"Tout le monde espérait que la génie de la mathématique (...) échapperait une nouvelle fois à la mort comme elle l'avait fait il y a vingt ans", ajoute le quotidien.
Adolescente, elle avait remporté les olympiades internationales des mathématiques deux années de suite, en 1994 et 1995, avec un score parfait à l'issue de la seconde édition et avait reçu une récompense des mains du président de l'époque, Akbar Hachemi Rafsandjani, ont rappelé les médias.
Seuls deux quotidiens conservateurs, Kayhan et Resalat, n'ont pas parlé en Une de Mirzakhani.
"Son travail va au-delà de ma compréhension, mais je comprends son immense intelligence", a déclaré Nima Zaare, un artiste iranien basé à Téhéran qui avait dessiné un portait de la mathématicienne lorsqu'elle avait obtenu son prix.
"Normalement, je ne fais pas de portrait, mais c'était un grand honneur de faire le portrait d'une génie. J'ai été atterré lorsque j'ai appris sa mort", a-t-il ajouté.
Alors que l'Iran et les Etats-Unis ont rompu en 1980 leurs relations diplomatiques, Maryam Mirzakhani avait quitté son pays pour l'université américaine de Harvard. Elle avait décroché un doctorat en 2004 avec une thèse qualifiée de "chef d'oeuvre" par le Stanford News.
"Pour apprécier ce qu'a fait Mirzakhani, il faut créer des occasions suffisantes pour les autres Maryam du pays", a écrit dans le quotidien Shargh Azar Mansouri, une réformatrice, appelant le président Rohani à nommer des femmes dans son prochain gouvernement qui doit voir le jour d'ici fin août. - AfricaLog avec agence