L'ancien président ivoirien Laurent Gbagbo doit rester en détention à La Haye dans l'attente d'un éventuel procès pour crimes contre l'humanité, a annoncé lundi la Cour pénale internationale.
La défense de l'ex-chef de l'État a par ailleurs demandé à la CPI de proroger différentes procédures afin qu'elle ait le temps d'étudier plus de 1800 nouvelles pièces ajoutées au dossier par l'accusation, selon une requête, qui confirme les révélations du quotidien ivoirien Le Patriote.
«Malgré l'amélioration de la situation sécuritaire en Côte d'Ivoire», la détention de M. Gbagbo est «encore nécessaire pour garantir (sa) comparution devant la Cour» et «veiller à ce qu'il ne fasse pas obstacle à l'enquête ou à la procédure judiciaire», a indiqué la CPI dans un communiqué.
Le règlement de la CPI exige que la question de la détention d'un suspect soit réexaminée au moins tous les 120 jours. La décision de lundi est la cinquième de ce type dans l'affaire contre M. Gbagbo.
La défense avait, entre autres, évoqué la santé de M. Gbagbo pour justifier une libération provisoire sous conditions. La CPI a décidé lundi qu'elle n'examinerait cette possibilité qu'une fois en possession de toutes les informations nécessaires sur la santé de M. Gbagbo, 68 ans.
La Cour a dès lors demandé un rapport sur le sujet au Greffe et à la défense de l'ancien président ivoirien.
Début juin, les juges de la CPI avaient indiqué au procureur qu'ils avaient besoin de preuves supplémentaires pour décider de mener ou non un procès contre Laurent Gbagbo pour son rôle présumé dans les violences qui avaient déchiré la Côte d'Ivoire de décembre 2010 à avril 2011.
Quelque 1822 éléments de preuve ont été déposés par l'accusation pour étayer sa thèse entre le 5 juillet et le 5 novembre, souligne Me Emmanuel Altit, l'avocat de l'ex-chef de l'État.
Dans une requête faite à la cour, la défense a demandé à repousser les différentes procédures prévues par la CPI, afin de lui laisser le temps d'étudier ces milliers de pages de document nouvellement ajoutées au dossier.
«La simple lecture des 1822 documents auxquels s'ajouteront bientôt des centaines d'autres prendrait 456 jours à deux personnes travaillant de façon permanente sur des documents qui pour certains font des dizaines de pages et doivent être vérifiés et recoupés», estime Me Altit, rappelant que la défense dispose de moyens «infiniment inférieurs» à ceux de l'accusation.
«Ne pas accorder à la défense de prorogation de délai empêcherait la défense de présenter des éléments utiles à sa défense et constituerait une violation du droit du Président Gbagbo à un procès équitable», plaide Emmanuel Altit.
Les violences ayant déchiré la Côte d'Ivoire avaient fait suite au refus de M. Gbagbo de reconnaître sa défaite face à Alassane Ouattara à l'élection de novembre 2010. Ces violences avaient fait plus de 3000 morts.
Laurent Gbagbo, soupçonné de crimes contre l'humanité, avait été interpellé en avril 2011 par les forces pro-Ouattara, appuyées par l'armée française et l'ONU.
Il avait ensuite été transféré fin 2011 à La Haye, où il est écroué depuis. M. Gbagbo nie les accusations portées contre lui.
L'épouse de Laurent Gbagbo, Simone, fait elle aussi l'objet d'un mandat d'arrêt de la CPI, mais Abidjan refuse de la remettre à la Cour, au motif que la justice ivoirienne est désormais capable d'assurer équitablement son procès.
L'ex-ministre Charles Blé Goudé, proche de Laurent Gbagbo, fait lui aussi l'objet d'un mandat d'arrêt. Il est actuellement détenu en Côte d'Ivoire. – AfricaLog avec agence