La Cour pénale internationale (CPI) a condamné vendredi l'ancien chef de milice congolais Germain Katanga à 12 ans de prison pour sa complicité dans la destruction en février 2003 d'un village du nord-est de la République démocratique du Congo.
«La chambre fixe une peine unique de 12 ans d'emprisonnement», a déclaré le juge Bruno Cotte. Cette peine rassemble les différentes condamnations pour complicité de crimes de guerre et crimes contre l'humanité.
Le temps déjà passé en détention à La Haye, à savoir près de 7 ans, sera déduit de la peine prononcée.
Dans un ensemble gris foncé, chemise noire et cravate grise, Germain Katanga a écouté le prononcé de la sentence de manière impassible, ne montrant aucune émotion.
«Il est très déçu que les juges n'aient pas pris en compte les circonstances atténuantes autant que nous l'espérions», a néanmoins déclaré l'avocat de la défense, David Hooper.
«Il est également très déçu que les trois années qu'il a passées à Kinshasa n'aient pas été prises en compte», a-t-il ajouté.
Les juges ont en effet décidé de ne pas déduire de la peine prononcée les années d'emprisonnement de Germain Katanga avant son transfèrement à La Haye, en septembre 2007.
La CPI avait jugé en mars que Germain Katanga, 36 ans, s'était rendu coupable de complicité de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité, pour avoir facilité et coordonné l'approvisionnement en armes des membres de sa milice, qui avait attaqué le 24 février 2003 le village de Bogoro.
Au petit matin, ses troupes avaient lancé l'attaque pillant, violant les femmes et tuant 200 personnes environ, par balle ou à la machette.
Le juge Cotte, pour justifier la peine décidée, a évoqué l'atrocité de l'attaque du village de Bogoro et la douleur encore ressentie aujourd'hui par les victimes.
«Après l'attaque, la localité s'est retrouvée jonchée de cadavres», a déclaré le juge : «les attaquants dépeçaient les victimes membre par membre avant de leur ôter la vie».
Surnommé Simba (le lion) pour sa férocité, Germain Katanga était le commandant des Forces de résistance patriotiques en Ituri (FRPI), une milice créée fin 2002 avec un soutien ougandais et dont de nombreux membres, des ethnies lendu et ngiti, sont soupçonnés d'avoir participé à des massacres à caractère ethnique dirigé contre des Hema, une autre ethnie de la région.
Les affrontements interethniques entre milices qui se disputent les terres de l'Ituri ont débuté en 1999 et ont, selon l'accusation, «dévasté» la zone. Selon les ONG, ces violences ont fait plus de 60 000 morts.
«Nous constatons simplement qu'il n'y a plus d'impunité pour les crimes commis dans le pays et la région, et c'est une bonne nouvelle», a réagi depuis Toulouse le porte-parole du gouvernement congolais Lambert Mende.
Junior Safari Runiga, le directeur général de l'Action congolaise pour le respect des droits humains, basée à Kinshasa, a, lui, regretté que les réparations pour les victimes n'aient pas encore été décidées : «jusqu'à aujourd'hui, des orphelins ne vont plus à l'école, des personnes sont handicapées, des gens sont traumatisés...»
Le procureur avait exigé une «peine lourde et efficace», entre 22 et 25 ans. Les juges pouvaient décider d'une peine de prison allant jusqu'à trente ans.
Le fait qu'il ait été «complice» des crimes et non «auteur direct», sa participation au processus de paix après les hostilités, sa collaboration aux procédures de la Cour, et son implication dans sa vie familiale (il est père de 6 enfants, dont certains en bas âge) ont joué en faveur de Germain Katanga et d'une réduction de la sentence.
«Nous devons encore réfléchir à un éventuel appel», a déclaré M. Hooper, qui avait déjà interjeté appel du verdict de culpabilité rendu en mars.
M. Katanga pourra, dès septembre 2015, demander une libération conditionnelle aux deux tiers de sa peine, a affirmé M. Hooper.
Le premier condamné de la CPI, Thomas Lubanga, avait été condamné à 14 ans de prison pour avoir enrôlé et utilisé des enfants soldats. – AfricaLog avec agence