Les trois pays d'Afrique de l'Ouest frappés de plein fouet par l'Ebola étaient mercredi de plus en plus isolés : les dernières compagnies aériennes encore présentes suspendent à leur tour leurs vols, compliquant la lutte contre l'épidémie selon l'ONU.
Alors que la maladie a fait plus de 1400 morts dans la région, suscitant l'inquiétude à travers le monde, Air France a annoncé mercredi la «suspension provisoire», à compter de jeudi, de ses vols vers Freetown suivant une recommandation du gouvernement français.
Il n'y a donc plus que deux compagnies desservant encore la capitale de la Sierra Leone, comme celle du Liberia : la Royal Air Maroc (RAM) et Brussels Airlines, de manière irrégulière pour cette dernière.
«Au regard de l'analyse de la situation et comme l'y invite le gouvernement français, Air France confirme maintenir son programme de vols de et vers la Guinée et le Nigeria», les deux autres pays touchés, a ajouté la compagnie.
Brussels Airlines, qui maintenait quatre vols hebdomadaires à destination du Liberia et de la Sierra Leone, et trois vers la Guinée, dont plusieurs annulés depuis samedi en raison de la fermeture des frontières sénégalaises, a indiqué qu'elle se déciderait en fin de semaine.
Dans l'immédiat, pour répondre à la demande de passagers et acheminer 40 tonnes d'aide médicale de l'ONU, la compagnie a précisé assurer cette semaine trois vols : un vers Freetown, un vers Monrovia et un vers Conakry.
Seule la RAM a affirmé maintenir ses plans de vol habituels : un par jour vers Conakry et un jour sur deux en moyenne vers Monrovia et Freetown.
«Nous sommes dans une démarche solidaire et non mercantile», a déclaré le chef de la communication extérieure de la compagnie marocaine, Hakim Challot, soulignant que «de Casablanca, le remplissage des vols à destination de ces trois pays est extrêmement faible, environ 10 %».
British Airways avait annoncé mardi prolonger jusqu'à la fin de l'année la suspension de ses liaisons avec Liberia et Sierra Leone.
Mais, pour les Nations unies, le retrait des compagnies aériennes entrave la lutte contre cette épidémie sans précédent.
Le coordinateur de l'ONU contre l'Ebola, le Dr David Nabarro, a prévenu lundi à Freetown que «la décision compréhensible de certaines compagnies aériennes de ne plus desservir Freetown, Monrovia ou Conakry avait eu un énorme impact sur la capacité de l'ONU à acheminer du personnel et du matériel».
Il a adressé «une très ferme requête» pour que des compagnies aériennes continuent de desservir ces capitales.
Quelque 100 tonnes de matériel de santé et d'hygiène financées par la Banque mondiale ont néanmoins été livrées mardi par l'UNICEF.
Le président de la Banque africaine de développement (BAD), Donald Kaberuka, a averti de son côté mardi que les multiples fermetures de frontières terrestres et aériennes risquaient de coûter «beaucoup» au commerce et aux échanges.
L'épidémie qui s'est déclarée au début de l'année en Guinée, avant de se propager au Liberia et à la Sierra Leone voisins, puis au Nigeria, est la plus grave de l'histoire de cette fièvre hémorragique, identifiée en 1976 en République démocratique du Congo (RDC), où elle est réapparue en août pour la septième fois.
Elle a fait au total 1427 morts : 624 au Liberia, 406 en Guinée, 392 en Sierra Leone et 5 au Nigeria, selon le dernier bilan de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) arrêté au 20 août.
Le Dr Nabarro poursuivait mercredi au Nigeria sa visite des pays touchés.
Si le Nigeria, pays le plus peuplé d'Afrique, est largement moins affecté que les autres pays concernés, il ne baisse pas la garde.
La rentrée des classes y a été reportée d'un mois pour mettre en place «des mesures préventives» contre l'épidémie.
«Il ne faut pas passer de la panique à l'euphorie», a expliqué mercredi le ministre de la Santé Onyebuchi Chukwu.
Par ailleurs, un expert sénégalais de l'OMS contaminé en Sierra Leone a été admis mercredi dans un hôpital de Hambourg, où il doit être le premier malade de l'Ebola traité en Allemagne, et le troisième en Europe.
En RDC, où s'est déclarée en août une nouvelle épidémie d'Ebola, les Nations unies ont annoncé avoir déjà débloqué 1,5 million de dollars pour la lutte contre le virus. L'épidémie, qui a fait 13 morts, est distincte de celle qui sévit en Afrique de l'Ouest, selon les autorités sanitaires. – AfricaLog avec agence