Des chefs d'entreprise de plus de 50 pays à forte population musulmane se réuniront à Washington les 26 et 27 avril à l'invitation du président Obama, afin de célébrer la vie risquée mais passionnante des créateurs d'entreprise et d'échanger des idées sur la manière de stimuler de nouvelles entreprises une fois rentrés chez eux.
Intitulée « Un nouveau départ : le Sommet présidentiel de l'entreprise », cette conférence se tient en prolongement du discours prononcé par M. Obama au Caire le 4 juin 2009. On se souvient que lors de ce discours, M. Obama avait promis d'accueillir un sommet sur la création d'entreprises « afin d'identifier la façon dont nous pouvons approfondir les liens entre les chefs d'entreprise, les fondations et les entrepreneurs sociaux des États-Unis et des communautés musulmanes de par le monde ».
« Nous cherchons à présent à élargir cet engagement » dans le sens d'échanges accrus en éducation, en science, en santé et en idéaux partagés, avait affirmé M. Obama au Caire.
La conférence mettra l'accent sur le rôle que les entrepreneurs jouent dans leur collectivité en créant des emplois et en améliorant la société. On compte qu'il en découlera de nouveaux programmes, des partenariats, des liens et des réseaux qui tous encourageront le démarrage de nouveaux projets tant commerciaux que sociaux.
Au total, quelque 250 personnes de milieux religieux variés sont attendues à la conférence. Il y en aura d'Afrique, du Proche-Orient, d'Asie centrale, méridionale et sud-orientale, ainsi que d'autres pays et régions, dont les États-Unis.
Au nombre des participants figurera Muhammad Yunus, le père de la microfinance, dispositif consistant à accorder des petits prêts à des personnes démunies pour leur permettre de démarrer une entreprise. C'est ainsi, par exemple, qu'une femme pourrait emprunter 50 dollars pour fabriquer un poulailler, acheter des poules et vendre les œufs. Les bénéfices lui serviraient à rembourser son emprunt et à se qualifier pour un futur prêt, dont elle se servirait pour agrandir son entreprise. M. Yunus a développé son mécanisme de microfinance dans le cadre de sa Banque Grameen et de sa Fondation Grameen, qui ont leur siège à Dacca (Bangladesh). Ses travaux lui ont valu un prix Nobel de la paix.
A la tête du groupe pakistanais de chefs d'entreprise se trouve une femme de Lahore, Roshaneh Zafar, précisément l'une des bénéficiaires d'un prêt de microfinance de Muhammad Yusuf. Avec les 10.000 dollars que ce prêt lui a procurés, elle a lancé en 1996 la Fondation Kashf qui accorde de petits prêts à des femmes pauvres. Ses opérations de microfinance ont pris un essor exponentiel, passant d'une quinzaine de clientes au début à plus de 300.000 aujourd'hui. La Fondation Kashf a déboursé 225 millions de dollars à plus de 1 million de familles pauvres, selon Mme Zafar. Elle est également devenue la première fondation de microfinance à offrir une assurance. Afin d'élargir son assise financière, Mme Zafar a créé la Banque Kashf de microfinance, capable d'accumuler plus de capital qu'une fondation. Elle a reçu de nombreux prix internationaux en récompense de ses travaux visant à aider des femmes pauvres à améliorer leurs conditions de vie et celles de leur famille.
« L'aide aux femmes a un effet multiplicateur à travers la société », a estimé Mme Zafar. « Lorsqu'elles gagnent de l'argent, elles le consacrent à leur santé, à la santé de leurs enfants et à l'éducation de leurs enfants. C'est toute la société qui en profite. »
Des paroles aux actes
Président de l'Institut Aspen, Walter Isaacson a souligné que le sommet devait être plus qu'une simple rencontre de relations publiques : « Il faut passer des paroles aux actes. Le président Obama a présenté une vue convaincante de la façon dont un sommet de l'entreprise peut transcender la politique et nous amener à collaborer dans le monde entier d'une manière très passionnante. »
L'institut a plusieurs projets en cours destinés à encourager l'entreprise au Moyen-Orient. Il a notamment joué un rôle principal dans la mise sur pied du Middle East Venture Capital Fund, qui est administré par l'homme d'affaires israélien Yadin Kaufmann et par l'entrepreneur palestinien Saed Nashef. Cautionné par la Banque européenne d'investissement, par Cisco Systems, par la société Intel et par d'autres établissements, le fonds dispose de 50 millions de dollars pour financer de nouvelles entreprises d'informatique à forte capacité de croissance et axées sur l'exportation. C'est le premier fonds de capitaux à risque à viser les territoires palestiniens.
« En assurant la collaboration d'Israéliens et de Palestiniens au financement de nouvelles entreprises, on obtient un avantage économique aussi bien que politique », a fait observer M. Isaacson.
Par ailleurs, une conférence que prépare l'Institut Aspen pour juin ou juillet à Abou Dhabi sur l'innovation et la créativité est un autre projet conçu en vue de renforcer sur le plan économique sa présence politique au sein du monde musulman, a déclaré Toni Verstandig, directrice des programmes de l'institut pour le Moyen-Orient.
Selon Mme Verstandig, cette conférence va souligner l'importance d'avoir à proximité les uns des autres des fonds de capitaux à risque, des zones de recherche scientifique et des universités. L'utilité de cette convergence est apparente dans les zones les plus florissantes de la haute technologie aux États-Unis, par exemple la ceinture de la technologie qui entoure Boston, et la Silicon Valley en Californie. « L'innovation implique des partenariats entre des universités, des entreprises et les pouvoirs publics visant à stimuler la créativité », a-t-elle dit.
Certains États du Golfe, notamment le Qatar et les Émirats arabes unis, enregistrent une excellente croissance économique grâce à leurs investissements dans l'innovation et dans la technologie de pointe. – America.gov