Le président François Hollande a présenté mardi un gouvernement dont sont absents les principaux représentants de l'aile gauche socialiste, consacrant la ligne économique sociale-libérale, avec comme symbole le remplacement à l'Économie du bouillant Arnaud Montebourg par un ancien banquier d'affaires, Emmanuel Macron.
Confronté à la pire crise de son mandat, le président français a opté pour un remaniement limité - douze des seize ministres sont maintenus dans leurs fonctions - mais qui voit le départ des principaux représentants de l'aile gauche socialiste, partisans d'une politique plus sociale.
Très symboliquement, le portefeuille de l'Économie passe ainsi d'Arnaud Montebourg, qui a provoqué la chute du précédent cabinet par ses vives critiques contre la politique «d'austérité» de François Hollande, à un ancien banquier d'affaires, Emmanuel Macron, 36 ans tenant d'une ligne plus libérale. Michel Sapin conserve le portefeuille des Finances.
Le premier ministre Manuel Valls, reconduit dans ses fonctions, a annoncé mardi soir sur la télévision publique France 2 qu'il allait soumettre son gouvernement à un vote de confiance à l'Assemblée «en septembre ou en octobre», se déclarant convaincu que «la majorité sera là ».
«Il y a une seule ligne et les membres du gouvernement ne peuvent pas se donner en spectacle», a jugé le premier ministre, invoquant la nécessité de «travailler dans la cohérence» et récusant l'accusation de mener une «politique d'austérité», en référence aux critiques d'Arnaud Montebourg qui ont provoqué la chute du cabinet.
Le nouveau gouvernement comprend seize ministres de plein exercice, huit hommes et huit femmes. Le remaniement est très limité puisque douze ministres conservent leurs fonctions, notamment le chef de la diplomatie Laurent Fabius, le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian ou la ministre de la Justice Christiane Taubira, dernière icône d'une gauche assumée et réputée proche des frondeurs.
Najat Vallaud-Belkacem devient la première femme à assumer le portefeuille de l'Éducation, remplaçant Benoît Hamon qui s'était dit solidaire d'Arnaud Montebourg.
François Hollande, en proie à une impopularité record depuis son élection en mai 2012 dans un contexte de fort chômage et de croissance en panne, avait demandé à Manuel Valls de «composer un gouvernement de clarté sur la ligne, les comportements, la composition et la majorité».
Un aveu de faiblesse, cinq mois seulement après la nomination de Manuel Valls à la tête d'une première équipe constituée après la déroute de la gauche aux élections municipales, mettant en lumière ce que les éditorialistes français évoquaient mardi comme une grave «crise de régime».
Fait rare, le quotidien de gauche Libération titrait comme Le Figaro, conservateur: «Crise de régime» accompagné d'une photo d'un président seul.
La stratégie présidentielle consistant à maintenir le cap d'une politique controversée et à évincer les ministres qui protestent est pour le quotidien Le Monde «la dernière chance du président de sauver son quinquennat».
Majorité parlementaire fragilisée
L'aile gauche du Parti socialiste est depuis des mois vent debout contre le «pacte de responsabilité» cher à François Hollande avec 40 milliards d'euros en faveur des entreprises et 50 milliards d'économies sur trois ans.
À la surprise générale, Manuel Valls et François Hollande ont décidé lundi de trancher pour mettre fin au désaccord entre les partisans de la ligne gouvernementale -- restaurer la compétitivité du pays en aidant les entreprises et en coupant dans les dépenses publiques -- et les tenants d'une politique alternative hostile à «la réduction à marche forcée des déficits publics» jugée contreproductive pour la croissance et pénalisante pour les couches populaires.
Les deux têtes de l'exécutif ont opté pour un gouvernement plus homogène, mais qui concrétise dangereusement l'étroitesse des soutiens dont peut encore bénéficier le président socialiste.
Les socialistes et leurs alliés du Parti radical comptent 307 députés alors que la majorité absolue est de 289 à l'Assemblée nationale.
Élu avec le soutien des écologistes et d'une partie de l'extrême gauche, François Hollande ne peut déjà plus compter ni sur ces derniers, passés à une quasi-opposition, ni sur les Verts, absents du gouvernement sortant et qui ont repris leur liberté de vote.
«On a, à l'évidence, une crise politique, qui est fondamentalement à l'intérieur de la majorité présidentielle, qui se rétrécit», résume Didier Maus, universitaire spécialiste de droit constitutionnel.
Dimanche, M. Montebourg avait déclaré avoir demandé à François Hollande une «inflexion majeure» de la politique économique de la France, après avoir, samedi, réclamé qu'il «hausse le ton» vis-à -vis de l'Allemagne. Mercredi, François Hollande avait dit ne pas vouloir de «face-à -face» avec Berlin. - AfricaLog avec agence