Un mois après sa mort, des centaines de personnes continuent chaque jour de rendre hommage à Hugo Chavez, décédé le 5 mars à l'âge de 58 ans d'un cancer qui l'a empêché d'effectuer un nouveau mandat à la tête du Venezuela.
Après avoir été exposée pendant dix jours, la dépouille du fondateur de la "révolution bolivarienne" a été transférée dans une ancienne caserne sur les hauteurs de Caracas.
C'est là qu'un sarcophage de marbre a été installé, dans des bâtiments transformés en musée à la mémoire du coup d'Etat manqué de 1992 qui avait lancé la carrière politique de l'ancien lieutenant-colonel devenu le "Comandante".
Ses proches, dont le vice-président Nicolas Maduro adoubé par Chavez comme son héritier, avaient un temps envisagé de faire embaumer le corps de l'ancien chef de l'Etat puis ont renoncé à cette idée.
Pour l'instant, Hugo Chavez repose dans le quartier du "23 de Enero" surplombant le palais présidentiel et il n'a pas été décidé s'il devait être inhumé dans sa ville natale de Sabaneta ou dans le fastueux bâtiment du Panthéon national de Caracas.
En silence, les visiteurs viennent se recueillir devant la tombe, encadrée par des portraits de Chavez et de Simon Bolivar, le général nationaliste qui participa à l'indépendance d'une partie de l'Amérique du Sud au XIXe siècle.
"Ils viennent de différents endroits, de différents pays", raconte Alba Antunes, 75 ans, qui sert de guide. "Sa mémoire et son esprit vivront à tout jamais ici."
L'endroit a été repeint de frais et décoré avec des photographies retraçant la vie du défunt, depuis ses années d'écolier précoce jusqu'à sa présidence au style unique.
Dans d'autres pièces, des textes rendent hommage à la vie turbulente et hors du commun qu'a menée Chavez. On suit son parcours - de l'époque où il vendait des bonbons dans la rue pour aider sa grand-mère à boucler les fins de mois jusqu'à sa réélection à la présidence en octobre dernier.
On le voit quittant la prison en 1994 après deux années passées derrière les barreaux à la suite de son coup d'Etat manqué. Il apparaît aussi en 2002 après avoir mis en échec une initiative de l'opposition visant à le renverser, puis en 2011 en partance pour Cuba où il fut opéré à quatre reprises pour une tumeur maligne dans la région pelvienne.
Dans la dernière salle d'exposition, une grande photo le montre dos à l'objectif, debout sous la pluie, s'adressant à une foule conquise pour son dernier meeting de la campagne présidentielle de 2012.
"C'est difficile de regarder cette photo sans pleurer", admet Alba Antunes dont le mari a servi dans l'armée avec Chavez. "Entre eux, les autres soldats n'arrêtaient pas de dire qu'un jour il serait président. (...) Il a été le seul qui s'est soucié de nous, les pauvres, le seul vrai président qu'ait jamais eu le Venezuela."
Dehors, de la musique salsa s'échappe de haut-parleurs tandis que des gamins du quartier jouent au base-ball sur un terrain poussiéreux.
"Pouvait-on imaginer un meilleur endroit qu'ici pour lui ?" s'interroge Jose Herrera, un soldat qui aide à canaliser la foule des visiteurs. "Il est issu du peuple et maintenant il est au milieu de lui."
Malgré la ferveur et les louanges de ses partisans, l'héritage d'Hugo Chavez demeure controversé: était-il le défenseur des plus défavorisés, un autocrate sans pitié ou un peu les deux ?
Pour ses détracteurs, l'émotion qui a entouré sa disparition a occulté la réalité de son exercice du pouvoir marqué par l'emprisonnement ou l'exil forcé de ses adversaires politiques.
Ont été relégués dans l'ombre sa gestion chaotique de l'économie et son obsession pour l'exercice solitaire du pouvoir, ajoutent les critiques.
Nicolas Maduro, qui assure la présidence par intérim, a pris soin de se présenter comme le "fils" spirituel de Chavez, le garant de son héritage politique avant l'élection qui aura lieu le 14 avril.
Pour Henrique Capriles, principal candidat de l'opposition, Maduro n'est que la pâle copie de son prédécesseur et il est temps de tourner la page.
"Je n'ai jamais été un partisan de Chavez. Il a fait beaucoup de mal à notre pays et tout le monde semble oublier cela maintenant", note Antonio Rodriguez, étudiant en gestion de 24 ans. "Mais je ne manquerai jamais de respect à un mort", ajoute-t-il après avoir fait glisser sa main sur le marbre du tombeau. – AfricaLog avec agence