Le président kényan Uhuru Kenyatta a prêté serment mardi, une entrée en fonction qui pose aux Occidentaux la question de l'attitude à adopter à l'égard d'un dirigeant inculpé par la Cour pénale internationale (CPI).
Après la présidentielle du 4 mars qui s'est déroulée dans le calme, en contraste avec le bain de sang du précédent scrutin il y a cinq ans, les Kényans espèrent qu'Uhuru Kenyatta, 51 ans, tiendra sa promesse d'être le président de tout le peuple et pas seulement celui de son groupe ethnique, les Kikuyu, le plus important du pays.
Pour les Etats occidentaux qui financent cette économie importante de l'Afrique de l'Est, le Kenya joue un rôle essentiel pour la stabilité régionale, notamment en participant à la lutte contre les islamistes affiliés à Al Qaïda présents en Somalie voisine.
Tout en conservant des relations suivies avec le Kenya, les chancelleries occidentales doivent limiter les contacts avec les personnes inculpées par la CPI de La Haye.
Uhuru Kenyatta est poursuivi par la justice internationale pour crimes contre l'humanité en raison de son rôle présumé dans les violences qui avaient suivi le précédent scrutin présidentiel.
Pour l'investiture de mardi, les Etats-Unis et plusieurs Etats européens s'étaient fait représenter au niveau de leurs ambassadeurs, une pratique pas inhabituelle pour ce genre d'événement disent les diplomates et compatible avec la ligne qui consiste à n'avoir que des "contacts essentiels" avec les inculpés.
Dans son serment prononcé sur la Bible utilisée par son père, Jomo Kenyatta, premier président du pays après son indépendance en 1963, Uhuru Kenyatta s'est engagé à "être loyal et de faire allégeance à la république du Kenya".
Les Kényans attendent de leur nouveau chef d'Etat, ancien ministre de Finances dont la famille contrôle un empire économique florissant, qu'il ramène dans le pays une croissance plus soutenue. Elle était de 7% avant le précédent scrutin de décembre 2007.
Outre les représentants occidentaux, une dizaine de chefs d'Etat et de chefs de gouvernement africains ainsi que des officiels de haut rang étaient présents lors de la cérémonie.
La Chine et l'Inde, qui ne reconnaissent pas la CPI, avaient dépêché de hauts responsables pour assister à l'événement, qui s'est tenu dans un stade de la banlieue de Nairobi.
Tout en ne voulant pas apparaître trop proches du nouveau chef de l'Etat, les Américains et les Européens ne veulent pas non plus laisser le champ libre à la Chine et aux autres pays asiatiques.
"Ils (les Occidentaux) se trouvent dans une position très délicate", a résumé Daniel Branch, expert du Kenya à la Warwick University. "Mon intuition est que tout le monde va trouver un moyen de s'accommoder".
Les ambassadeurs occidentaux ont échappé à un moment difficile : le président soudanais Omar Hassan al Bachir, inculpé de génocide à La Haye et sous le coup d'un mandat d'arrêt international, était absent.
Uhuru Kenyatta et son vice-président William Ruto ont promis de collaborer avec la CPI afin de se disculper d'accusations qu'ils nient.
Des diplomates occidentaux ont expliqué qu'ils allaient adopter une attitude "pragmatique" à l'égard du gouvernement de Kenyatta, si ce dernier coopère avec la CPI.
Il est accusé d'avoir orchestré des violences tribales qui avaient fait plus de 1.200 tués après l'élection présidentielle il y a cinq ans.
L'ambassadeur des Etats-Unis, Robert Godec, a rencontré le nouveau président la semaine dernière et des ambassadeurs européens ont présenté des demandes d'audience. – AfricaLog avec agence