Par O.Tity Faye, Journaliste indépendant.
Les années 90 avaient apporté l’espoir d’une Afrique qui connaitrait – bientôt - des changements positifs avec le phénomène du processus démocratique engagé ici et là . L’on s’attendait à voir arriver, avec ce processus, un certain élan de développement global ou tout autant des croissances, nombreuses, qui serviraient de guides aux pays retardataires. L’on sait que les Conférences nationales ont servi en certains endroits de « coups d’État légaux » dans la mesure où elles ont été utilisé pour chasser du pouvoir certains de ceux qui y avaient trop duré au détriment de toute légalité. Un certain nombre d’entre eux sont revenus au pouvoir soit par des élections plus ou moins contestées - Bénin : Mathieu Kérékou après Nicéphore Soglo en mars 1996 - alors que d’autres ont dû utiliser la fracture de la guerre civile ou de la rebellion (Zaire : Laurent Désiré Kabila pour faire partir Mobutu, en 1997 - Denis Sassou NGuessou pour revenir au pouvoir au Congo Brazzaville en 1998) etc. Toutefois, l’on se disait que, désormais, nous aurions à gérer la manière dont les élections devraient se conduire afin d’être plus transparentes et acceptables. En bref, mener les processus démocratiques à leur point d’accomplissement. Qu’est-il arrivé ? Bien que des élections s’organisent, un nouveau modèle de gestion du pouvoir est soudain apparu : « la succession par héritage sous bannière démocratique ». À la manière dynastique .en Coré du Sud où Kim Il Sung a été remplacé par son fils Kim Jong Il en 1994 et en Syrie ou Hafiz al Assad a pris la place de son père Bashar al Assad en juillet 2000. Les fils des chefs d’État africains se mettent à leur succéder. Joseph Kabila prend le pouvoir au Congo, en janvier 2001. Faure Gnassingbé assure la succession au Togo, en avril 2005, malgré les intentions de son demi frère .Kpatcha Gnassingbé. Ali Bongo, au Gabon, est à la présidence du pays, malgré tout. Etc. Il émerge en Afrique un mélange de monachisme qui ne dit pas son nom. Cette forme d’héritage du pouvoir se légalise au même titre que les coups d’État en utilisant le principe des élections emprunté à la Démocratie. Les acteurs finissent peu ou prou par se faire accepter. À la longue, ils prennent même des titres de noblesse, voire de sagesse. Ces exemples anticonstitutionnels ont servi de modèle aux coups d’État en Mauritanie et en Guinée dernièrement. Alors que l’on croyait désormais fossile, en Afrique, la méthode de prise pouvoir anticonstitutionnelle par ce moyen. En Guinée particulièrement la situation s’est aggravée avec le massacre survenu lors d’un meeting des principaux leadeurs de partis politiques, au « stade du 28 septembre », le 28 septembre 2009. Les horreurs tels que les viols publics des femmes ont choqué toute la communauté internationale dont l’Union africaine et la Cedeao. Il est question de sanctions internationales à tous les niveaux. À l’intérieur du pays, les Forces vives réclament le départ de la junte militaire qui a pris le pouvoir, le 23 décembre 2008, suite au décès du Général Lansana Conté. Ce dernier a perduré vingt-quatre ans au pouvoir après un premier coud d’État, le 3 avril 1984, suite au décès du président Ahmed Sékou Touré. Ces similitudes portent amènent à croire que la Guinée et ses populations sont dans un engrenage militaro-politique qui, si on s’en réfère au bilan du régime de Lansana Conté, n’apporte pas grand-chose au développement socioéconomique de la Guinée. Sans compter qu’un tel précédent risque de contribuer au retour de l’Afrique à la période des coups d’État militaires des années 60 à 80. En effet, ceux qui sont parvenus au pouvoir par des moyens anticonstitutionnels ne donnent aucun exemple de respect de la Constitution nationale du pays par la suite. Ils passent par la révision constitutionnelle (Blaise Compaoré au Burkina Faso entre 1997 et 2000) et (Lansana Conté en Guinée en 2001) pour accroitre le nombre de mandats et de ce fait phagocyter l’alternance au pouvoir. En somme, tout se déroule selon une dynamique de chamboulement et l’on a tendance à croire que seuls les intellectuels africains parlent de Démocratie. Alors que les leadeurs, eux, en parlent comme un phénomène étranger dont ils utilisent certaines parties et spolient d’autres à leur convenance, pour des raisons toujours particulières. La « compréhension » et la tolérance de situations particulières contribuent à la production de ces cas spécifiques. La naïve interrogation est : ne serait-il pas possible que les organisations régionales et sous-régionales africaines soutenues par la communauté internationale et les Nations-Unies prennent les sanctions définitives d’exclusion effective des régimes anticonstitutionnels dans le temps et l’espace ? Nous observons, actuellement, les mouvements d’une élite de « démocrates » à la tête des partis politiques africains. Dans la plupart des cas l’influence du leadeur est la seule influence sensible au niveau des militants. Les motivations démocratiques constituent la dernière considération et n’interviennent que pour résoudre les conflits. Les interrogations sérieuses : la Démocratie serait elle possible en Afrique sans l’enseignement des populations aux principes et à la pratique même de la démocratie? Quels pourraient être les moyens et méthodes d’accès à ces populations? Les partis politiques suffisent-ils pour assumer ce devoir d’éducation ? Jusqu’à quel point la communauté internationale doit-elle intervenir en battant en brèche les arguments-torches de l’ingérence dans les affaires intérieures des pays et d’atteinte à la souveraineté nationale? Blog de O. Tity Faye (http://o.tity.faye.over-blog.com/)