Le second tour de l'élection présidentielle en Guinée départagera un ancien gouvernant sous le régime du défunt général Conté, Cellou Dalein Diallo, et un opposant à tous les régimes depuis l'indépendance, Alpha Condé, qui préparent déjà alliance et offensives.
Pressés d'en finir avec les régimes militaires, plus de 3 millions de Guinéens avaient participé le 27 juin à la toute première élection libre et démocratique depuis l'indépendance du pays en 1958. Le taux de participation a atteint 77%, selon la Commission électorale nationale indépendante (Céni).
Avec 39,72% des voix, Cellou Dalein Diallo arrive largement en tête, devant Alpha Condé, qui recueille 20,67%, selon les résultats provisoires du premier tour publiés vendredi.
Deux autres anciens Premiers ministres sous le régime du défunt général-président Conté (1984-2008) arrivent en 3e et 4e position: Sidya Touré avec 15,60% et Lansana Kouyaté avec 7,75%.
Cité parmi les grands favoris depuis le début de la campagne, Cellou Dalein Diallo, 58 ans, dirige l'Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), le parti du charismatique opposant Mamadou Bâ décédé en 2009. Natif du Foutah Djallon (centre), il bénéficie du soutien d'une grande partie de l'ethnie peul, une des plus importantes du pays.
À partir de 1996, l'autocrate Lansana Conté l'avait nommé successivement ministre des Infrastructures économiques, des Transports et travaux publics, puis de la Pêche. Il avait dirigé le gouvernement pendant 16 mois, jusqu'à son limogeage en avril 2006, alors que Conté, malade, était absent des affaires.
Interrogé vendredi soir, M. Diallo s'est dit «très optimiste».
«Je voudrais inviter mes compatriotes des autres partis qui n'ont pas eu la chance d'aller au second tour de se joindre à nous», a-t-il déclaré.
À la question de savoir s'il avait déjà pris contact avec Sidya Touré pour un rapprochement, il a répondu: «pas pour le moment, mais lui et moi avions appartenu au même gouvernement lorsqu'il était Premier ministre, je pense qu'il n'y a aucun problème pour que nous y allions ensemble».
Alpha Condé, 73 ans, n'a quant à lui jamais participé à un gouvernement. Le dirigeant de Rassemblement pour le peuple de Guinée (RPG), d'ethnie malinké, est connu pour s'être opposé à tous les régimes autoritaires qui se sont succédés depuis l'indépendance.
En 1970, il avait été condamné à mort par contumace par le régime d'Ahmed Sékou Touré (1958-1984). Puis, sous la présidence de Conté, il avait passé deux ans et demi en prison (1998-2001) pour «atteinte à la sûreté de l'Etat».
«Mon souci c'est de rassembler tous les Guinéens qui veulent le changement contre l'immobilisme et contre la gabegie», a déclaré samedi Alpha Condé, dans une interview accordée à l'AFP et RFI.
«Tout le monde sait que mon adversaire est le symbole du régime qui a mis ce pays à genoux. Il a été 11 ans dans le gouvernement, donc il symbolise tout les mauvais côtés du système Conté», a-t-il lancé.
M. Condé a par ailleurs affirmé que le scrutin avait été marqué par «une fraude gigantesque» et des opérations de «sabotage» de la Céni, mais s'est dit «certain de gagner».
Les candidats disposent d'un délai de huit jours pour contester les résultats devant la Cour suprême.
La Céni elle-même avait annoncé que «beaucoup de cas de fraudes» avaient été enregistrés et des personnes «appréhendées» à Conakry et ailleurs.
La date du second tour, initialement prévu le 18 juillet, n'a pas encore été confirmée. - AFP