Guinée: un pays, deux « Sékou »

Opinion de Bangaly Condé « Malbanga »

Ahmed Sékou Touré, principal artisan de l’accession de la Guinée à l’indépendance, le Général d’Armée Sékouba Konaté père de la démocratie guinéenne, deux personnalités dont les noms s’inscriront toujours sur du marbre jamais sur du sable.

Le peuple de Guinée se rappellera toujours l’œuvre immortelle du président Ahmed Sékou Touré. Celle de conduire notre pays à l’indépendance, sans pavoisements ni salve de canon, sans tambours ni tamtam, une procédure unique jamais vue dans l’histoire de l’accession des ex colonies à l’indépendance. Ainsi, la Guinée fut-elle le premier pays d’Afrique noire à dire non au Général De Gaule ouvrant la voie à une vague de décolonisation en Afrique francophone.

C’est pourquoi l’histoire retiendra Sékou Touré, comme le père de l’indépendance de la Guinée. Celui là-même qui a consacré le clair de son temps au combat pour la création de la nation guinéenne et la consolidation du droit du peuple à disposer de lui-même.

Un demi-siecle après, c’est un autre Sékou(ba) qui sauve la Guinée dans des circonstances que tout le monde connait. Il a doté la Guinée de son premier président civil élu à l’issue d’une transition libre et apaisée dans un pluralisme total. Le Général d’armée Sékouba Konaté dont le nom s’identifie désormais à l’histoire de la Guinée, vient donc de poser un acte qui honore non seulement le soldat guinéen, mais aussi africain.

Comme en 1958, le peuple de Guinée a prouvé, encore une fois, à la face du monde son sens élevé de civilité et de sacrifice à travers les deux scrutins de la présidentielle du 27 juin et du 7 novembre 2010 qui ont fait dire au représentant de l’homme le plus puissant de la planète, Barack Obama, que les autres pays africains devraient prendre désormais l’exemple sur le pays du feu Lansana Conté.

Jeune militaire, fringant avec un gabarit de déménageur, le Général Konaté malgré sa maitrise de la situation politique et son emprise sur l’armée a préféré être patriote, mettre au dessus de tous les intérêts particuliers au dessus de l’intérêt supérieur de la nation. Il n’a jamais été ébranlé ni par son entourage ni par ces politiciens véreux qui tentent toujours d’influencer les chefs afin de les enfoncer dans l’erreur.

Sékouba Konaté s’est rebellé à toutes ces tentatives de déstabilisation et de détournement de la voie tracée par ses convictions personnelles. N’a-t-il pas préféré sacrifier certains de ses proches collaborateurs encombrants pour l’intérêt du peuple ? Sans être libéré par son docteur, El-Tigre, convalescent, a pris le risque de faire le trajet Rabat-Conakry pour organiser l’investiture du président élu, le Pr. Alpha Condé.

A n’en pas douter, Parousky, le meilleur soldat de tous les temps dans l’histoire de l’armée guinéenne, est et restera une icône pour tout guinéen patriote, épris de paix et de justice.

Quoi de plus émouvant que de voir à la télévision guinéenne, le directeur du bureau de presse de la présidence de la République Mohamed Kassé entrain de lire le dernier décret d’un chef d’Etat mettant volontairement fin à ses propres fonctions de président sans coup d’Etat ni révolution de palais encore moins des coups férir.

Qui n’a pas été ému le 21 décembre dernier quand le désormais ancien président par intérim soulevait le bras du nouveau président élu de la République et rendait hommage à son prédécesseur Capitaine Moussa Dadis Camara ? Comme pour prouver aux Guinéens qu’à cœur vaillant rien d’impossible.

Grâce au Général Sékouba Konaté, la Guinée est comptée aujourd’hui parmi les nations les plus civilisées et les plus démocratiques. Elle est non seulement devenue fréquentable mais aussi un pays où règnera désormais la paix et la sécurité.

Après l’investiture tant attendue et première du genre, à laquelle ont participé un parterre de chefs d’Etat et plus d’une centaine de hautes personnalités d’Afrique et du monde où ce colosse en treillis dans un discours d’adieu a donné des frissons à l’assistance et aux millions de téléspectateurs, les détracteurs doivent être aujourd’hui à leurs propres frais. Ces professionnels de l’intoxication et de la désinformation qui criaient sur tous les toits que Konaté était entrain d’utiliser toutes les ruses pour s’accrocher au pouvoir peuvent-ils avoir le courage de reconnaitre devant leurs adeptes qu’ils se sont trompé sur le compte d’un homme dont l’espèce commence à se raréfier.

En tout cas, qu’ils le fassent ou pas, force est de reconnaitre que dans l’histoire politique du pays du Capitaine Moussa Dadis Camara, la mémoire collective retiendra toujours qu’un Général de l’armée guinéenne a été l’artisan principal de l’instauration de la démocratie après une longue et âpre lutte de ses frères et sœurs.

Car l’époux d’ Aïssatou Bah Konaté, a su poser avec intelligence des actes qui ont permis le retour à l’ordre constitutionnel en respectant tout ce qui a été concocté le 15 janvier 2009 à Ouagadougou au Burkina Faso sous la médiation du président Blaise Compaoré, en créant les institutions de la transition chargées de conduire des élections libres, transparentes et démocratiques.

Malgré les coups bas, les sabotages et les violences durant le processus électoral, le militaire le plus célèbre du moment du continent africain a, dans un calme olympien, su rester neutre et contenter tous les camps afin d’éviter les affrontements entre partisans.

C’est ce qui lui a valu cette nomination comme haut représentant de l’Union Africaine pour l’opérationnalisation de la force africaine en attente et chargé de la planification et de la gestion stratégiques des opérations de soutien à la paix.

Quel honneur pour ce jeune militaire de 46 ans formé à l’académie Royale de Meknès au Maroc, ancien élève de l’Ecole d’Application de l’Infanterie de Montpelier, de l’Ecole des Troupes Aéroportées de Pau en France et de l’Ecole de Guerre de Chine qui a fait ses preuves dans le contingent de maintien de la paix de la CEDEAO en Sierra Leone et qui a aussi assumé d’importantes responsabilités à nos frontières au sein de l’armée guinéenne.

Retourné à Rabat pour son traitement, le Général rejoindra certainement son poste à Addis Abeba quand il sera libéré par son médecin, pour faire profiter le continent africain de son expérience militaire acquise dans les écoles militaires et sur les champs de bataille.

Que Sékouba Konaté sache que les prières du peuple de Guinée l’accompagnent où qu’il sera. Que l’âme du feu président Ahmed Sékou Touré repose en paix au paradis. Car le peuple de Guinée ne remerciera jamais assez le libérateur Sékou Touré et le démocrate Sékouba Konaté.

Bangaly Condé « Malbanga »