El Hadj Mamadou Cellou Dalerin Diallo, président de l’UFDG (Union des forces démocratiques de Guinée), candidat malheureux à l’élection présidentielle devant le Pr Alpha Condé est en séjour à l’étranger, depuis la proclamation des résultats définitifs de ladite élection. Il a accordé une interview à notre confrère Christophe Boisbouvier de RFI (Radio France internationale) ce mardi 15 Février 2011. Il a parlé de ses ambitions politiques et de l’actualité en Guinée.
Trois mois après votre défaite, est-ce que vous remontez la pente?
Cellou Dalein Diallo: Ecoutez ! Ce n’était pas une défaite. Comme vous le savez, cette élection, je ne l’ai pas perdue. Mais, en raison de mon attachement à la paix, à l’unité de mon pays, j’ai préféré m’incliner à la décision de la Cour suprême.
Vous avez cette phrase en effet, début décembre, au lendemain de l’annonce de la victoire d’Alpha Condé : « L’attachement à la paix nous commande d’étouffer notre frustration et nos souffrances ». Est-ce que vous avez souffert?
Oui ! Bien attendu. Lorsque j’ai préparé mes réclamations, j’ai pu réunir des preuves irréfutables de fraudes que j’ai déposées dans des cartons à la Cour suprême. Le fait que la Cour suprême n’a pas cru devoir examiner mes réclamations, d’annuler au moins quelques bureaux de vote pour marquer sa bonne foi, naturellement ça m’a frustré.
Et personnellement est-ce que vous avez exprimé en ce moment-là ?
Oui ! Un peu. Il faut l’avouer. Je n’étais pas très à l’aise à la suite de cet échec, puisqu’il faut l’appeler comme ça. Voilà, j’ai repris, j’ai pris du recul, j’ai réfléchi, j’ai décidé de m’engager résolument dans le combat pour que cette Guinée que j’aime tant, soit un pays prospère et uni.
Avec ce recul, quel est à votre avis aujourd’hui, la principale cause de votre échec?
Mon échec, c’est la fraude et le soutien partisan des autorités de la Transition.
Derrière le Général Sékouba Konaté?
Y compris ! Vous avez vu ce que le gouvernement de Jean-Marie Doré, Premier ministre, toutes les initiatives qu’ils ont prises pour déstabiliser notre parti, pour soutenir cette haine, ces violences ethniques contre les militants de l’UFDG. Vous avez su cette affaire d’empoisonnement où on a accusé une communauté d’avoir été à la base de l’empoisonnement des militants du RPG. C’est le RPG lui-même qui a commandité les violences en région Forestière, en Haute Guinée, notamment à Siguiri et à Kouroussa où une véritable chasse à l’homme a été organisée contre les ressortissants de la communauté peulhe.
C’est-à-dire Cellou est trop gentil, ce n’est pas un gagneur comme Alpha?
Chacun à un tempérament, une éducation. Je ne suis pas comme Alpha, les gens sont libres de nous juger chacun, comme ils le veulent.
Lors de son discours d’investiture, le Président Alpha Condé a promis une ère nouvelle pour la Guinée. Est-ce que vous lui faites confiance?
Si j’en juge par rapport aux actes qu’il a posés jusqu’à présent, j’ai plutôt des inquiétudes. D’abord il se plaît à violer la Constitution. Le remplacement du médiateur de la République, alors que celui-ci est nommé pour sept ans, (il a été nommé au mois d’août 2010). La nomination de son Directeur de la communication à la présidence de la Haute autorité de la communication, alors que le Président de cette institution est désigné par ses pairs. Là, j’ai des inquiétudes sur sa capacité à mettre en place un état de droit.
Le jour de son investiture, il a déclaré : « Le changement n’est pas dirigé contre un parti politique encore moins contre une ethnie… »
Mais vous savez qu’il a une fixation par rapport à la communauté peulhe. Comment voulez-vous qu’un leader politique qui cherche à être président de tous les Guinéens puisse attribuer à une communauté l’empoisonnement de ses militants. On peut avoir une responsabilité individuelle, mais le RPG, Alpha Condé, tous ont accrédité l’idée selon laquelle ce sont les peulhs qui ont empoisonné leurs militants. Et c’est ce qui est à l’origine de la haine, de la violence ethnique qui a été déclenchée un peu partout en Haute Guinée, en Forêt. Alors comment peut-on agir comme ça?
La prochaine présidentielle est attendue en 2015. Vous allez me dire que c’est loin, mais à priori, est-ce qu’il faudra compter avec vous ou sans vous?
Il faudra compter avec moi, bien attendu. N’oubliez pas que j’ai la confiance de la majorité de la population guinéenne. Aujourd’hui, pour moi, c’est comment maintenir cette confiance. Sur vingt-quatre candidats, j’ai totalisé 44 % des suffrages exprimés au premier tour; c’est sûr que j’ai cette confiance. L’essentiel est que je puisse la préserver et la consolider, parce que les Guinéens m’ont vu à l’épreuve. Ils savent que je suis capable de mener une politique de réconciliation crédible, maintenir la balance égale entre les régions, entre les ethnies, c’est une préoccupation des Guinéens.
Entretien transcrit par AfricaLog.com