Le président de la Commission de l'Union africaine (UA), Jean Ping, s'est rendu samedi à Abidjan pour remettre au président ivoirien sortant Laurent Gbagbo et à son rival Alassane Ouattara un «message» du panel de médiateurs, qui a exigé «l'arrêt immédiat des tueries».
La flambée de violences depuis deux semaines fait craindre que la crise née du scrutin du 28 novembre ne débouche sur une guerre civile.
La Cour pénale internationale (CPI) est prête à «agir vite» contre les auteurs de crimes contre la population civile, a averti samedi sa procureur adjointe, Fatou Bensouda.
Sept femmes ont été tuées par balles lors d'une manifestation pro-Ouattara jeudi à Abidjan, dans le quartier d'Abobo, au nord de la capitale économique. Des témoins et la mission de l'ONU dans le pays, l'ONUCI, ont accusé les Forces de défense et de sécurité (FDS) loyales à M. Gbagbo, qui ont décliné toute responsabilité.
Accompagné du Commissaire pour la paix et la sécurité de l'UA, Ramtane Lamamra, M. Ping s'est entretenu dans l'après-midi, pendant environ une heure, avec M. Gbagbo à sa résidence, dans le quartier chic de Cocody.
À sa sortie, il a simplement indiqué qu'il était «porteur d'un message», dont il n'a pas révélé la teneur.
Il devait ensuite rencontrer Alassane Ouattara, reconnu président par la communauté internationale, au Golf hôtel d'Abidjan où il est retranché avec son gouvernement sous un blocus des forces loyales à son adversaire, dont le panel a demandé la levée.
M. Ping devait ensuite retrouver le président du Conseil constitutionnel Paul Yao N'Dré, selon une source proche de l'UA.
Proche du président sortant, M. Yao N'Dré est au coeur de la crise post-électorale: alors que M. Ouattara a été déclaré vainqueur par la commission électorale et l'ONU, le Conseil constitutionnel a invalidé en partie ces résultats et proclamé M. Gbagbo réélu.
M. Ping est envoyé par le panel de chefs d'État africains sur la crise ivoirienne, qui s'est réuni vendredi à Nouakchott en Mauritanie sous la présidence de Mohamed Ould Abdel Aziz (Mauritanie) et en présence des autres membres, Jacob Zuma (Afrique du Sud), Jakaya Kikwete (Tanzanie), Idriss Deby Itno (Tchad) et Blaise Compaoré (Burkina Faso).
Le chef de l'État mauritanien a affirmé que le groupe, qui a le mois de mars pour parvenir à des solutions «contraignantes», est arrivé par «consensus» à une «décision», et s'est dit confiant en une «solution pacifique».
Le panel a annoncé une prochaine réunion, à une date et en un lieu non précisés, à laquelle seront invités les deux rivaux et Paul Yao N'Dré.
Pour l'heure, le quintette a exigé «l'arrêt immédiat des tueries» et des manifestations pouvant «dégénérer en troubles et en violences».
La secrétaire d'État Hillary Clinton a aussi réclamé «l'arrêt immédiat de la violence», et accusé Laurent Gbagbo de «mépris pour la vie humaine et l'État de droit».
Le Conseil de sécurité de l'ONU redoute une «résurgence de la guerre civile». Après un putsch manqué, les combats de 2002-2003 avaient coupé le pays en deux, le nord étant aux mains de l'ex-rébellion des Forces nouvelles (FN) désormais alliée à M. Ouattara.
Les violences ont déjà fait 365 morts depuis fin 2010, dont 50 en une semaine, selon le bilan établi par l'ONUCI avant la mort des sept femmes dans le quartier d'Abobo, foyer des marches pro-Ouattara et champ de bataille entre FDS et insurgés armés.
La situation humanitaire s'aggrave par ailleurs avec l'exode des habitants d'Abobo et dans l'ouest, en proie à des combats entre FDS et FN.
Après une coupure de courant survenue lundi en zone FN, accompagnée de coupures d'eau, l'électricité est finalement revenue samedi, ont rapporté des habitants de plusieurs villes du nord.
Le gouvernement Gbagbo avait invoqué des nécessités industrielles, mais l'ONU avait dénoncé «un acte inhumain aux conséquences dramatiques». - AFP