«Il est extrêmement urgent que la Guinée mène des consultations nationales en vue de la création d’une commission vérité, justice et réconciliation », a déclaré hier soir, au cours d’une conférence de presse, Mme Navy Pillay, la haut Commissaire des Nations-Unies aux droits de l’Homme, au terme de son séjour de deux jours en Guinée.
La diplomate onusienne a indiqué que cette commission devra être un «instrument essentiel pour assister la Guinée à tourner cette difficile page de son histoire tout en prenant en compte les préoccupations légitimes des victimes des évènements du passé.» Elle estime que la Justice est l’élément primordial de tout processus de réconciliation, et que ladite commission devra respecter les principes internationaux «dans la conduite d’investigations et la poursuite des auteurs des crimes internationaux.»
Mme Pillay dit avoir rencontré et échangé avec plusieurs autorités guinéennes, les membres du CNT (Conseil National de la Transition), le corps diplomatique, les chefs des agences des Nations-Unies en Guinée, les organisations de la Société civile.
Les discussions, a-t-elle rassuré, ont été fructueuse. Mais, «en dépit du fait que la Guinée a enregistré de notables progrès dans le domaine de la lutte contre la violence, le pays reste confronté à bien de défis.» Parmi ces défis, elle a souligné l’importance de la conduite des consultations nationales, en vue de connaître comment est-ce que les Guinéens souhaiteraient être réconciliés.
Navy Pillay a, par ailleurs souligné, que plusieurs pays à l’instar de l’Afrique du Sud dont elle est originaire, durant la période post-apartheid, ont tiré les leçons des Commissions vérité, Justice, réconciliation, pour se réconcilier. Elle dit avoir la ferme conviction que la Guinée ne peut que bénéficier d’une expérience similaire.
Le Président guinéen, Alpha Condé, lui, il faut le rappeler, a fait part de sa volonté de l’organisation d’une conférence vérité et réconciliation nationale, au lendemain de son élection après la présidentielle guinéenne de 2010. Mais les signaux de la tenue de cette conférence tardent à apparaître, selon le constat des observateurs.
Mais la diplomate onusienne aux droits de l’Homme a dit qu’elle a fait part de ses inquiétudes portant sur «l’impunité persistante pour les auteurs des nombreuses et graves violations des droits de l’Homme commisses durant le processus électoral.» Avant de réitérer ce message: «Il faut mettre fin à la culture d’impunité. Aujourd’hui les auteurs des plus atroces des violations des droits de l’Homme demeurent libres et ne sont pas inquiétés pour les actes qu’ils ont commis ».
La haute Commissaire des Nations-Unies aux droits de l’Homme déclare que le Gouvernement devrait envoyer un message fort à ces auteurs de graves violations des droits de l’Homme, en procédant à des enquêtes et en poursuivant les présumés coupables des violations alléguées, dont celles qui sont commises par les Forces de sécurité. Outre les personnalités rencontrées, Mme Pilay a rencontré les victimes de torture, qui ont pointé du doigt les forces de sécurité. Elle a aussi rencontré des survivants de violence qui ont également exprimé «leur désir de voir la mémoire des victimes préservée. Ils redoutent que la nouvelle génération n’oublie ce que les victimes de violations des droits de l’homme ont subi dans le pays.»
Par ailleurs, la diplomate s’est dite «attristée de constater que la violence sexuelle a été commise en toute impunité en Guinée.» Je rappelle une fois de plus, dit-elle, «que tout viol équivaut à un acte de torture. Une fois de plus, les auteurs de violations des droits de l’homme, dont les violences sexuelles, doivent êtres jugés.» Elle en appelle au respect, autant des droits de l’Homme que les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, du fait qu’ils sont d’égale importance et essentiels à la paix, à la justice, à la sécurité et au développement.
Mme Pillay a, enfin appelé la communauté internationale pour qu’elle puisse soutenir la Guinée face à ces défis.
Mme Pillay, est depuis le 1er septembre 2008, la haute Commissaire des Nations-Unies aux droits de l’Homme (HCDH). Cette commission onusienne a ouvert son bureau en Guinée, le 13 août 2010, après la signature d’un accord avec le gouvernement guinéen et le HCDH intervenue le 4 mai 2010.
C’est la première visite en Afrique de l’Ouest de la Haute Commissaire des Nations-Unies aux droits de l’homme après sa prise de fonction en 2010. La Guinée est ainsi le premier pays de la sous-région qu’elle vient de visiter. Pour diverses raisons, dont les violations des droits humains pendant le règne de la junte du CNDD (Conseil national pour la démocratie et le développement), marqué par le massacre de près de 200 guinéens, selon des chiffres officiels d’ONG internationales, le 28 septembre 2009, au stade du même nom à Conakry et les violences postélectorales que la fin de la Transition a connues en fin 2010.
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