La cérémonie officielle de l’ouverture de la Session budgétaire 2011 s’est déroulée le 16 mai au Palais du Peuple de Conakry. Pour l’occasion, Hadja Rabiatou Sérah Diallo, la Présidente du Conseil national de Transition, a accueilli des invités dont le Président du conseil économique et Social, M. Michel Kamano, des membres du gouvernement en tête des quels se trouvait le Premier ministre, M. Mohamed Saïd Fofana. Plusieurs autres invités de marque ont pris part à la cérémonie : représentants des institutions bancaires, des organisations et institutions internationales. Il faut souligner que la présentation du projet de Loi initiale des finances 2011 pour examen et adoption par le CNT aura connu un retard, conformément à la tradition.
D’entrée de jeu, Hadja Rabiatou Sérah Diallo a souhaité la bienvenue à tous et a rappelé que l’examen de la loi est sur «les dispositions de l’article 157 de la Constitution qui dispose que le CNT assumera toutes les fonctions législatives définies par elle jusqu’à l’installation de la nouvelle Assemblée nationale…»
La présidente du CNT a rappelé le contexte socio-économique qui prévalait à la mise en place du CNT, en mars 2010. Avec pour objectif «de rassembler les Guinéens dans leur diversité d’opinions, de cultures et de croyances autour des mêmes objectifs de progrès, d’unité et de paix.» C’est pourquoi elle a salué la prise en compte de la question de réconciliation nationale par le Président Alpha Condé et son gouvernement.
Hadja Rabiatou Sérah a déclaré que la session s’ouvre dans un contexte particulier.
La Guinée sort d’une période de crise politique et sociale profonde. Le pays sort également de la Transition, à la suite d’élections «libres, transparentes, crédibles et acceptées par tous.» Mais au cours de laquelle, il a été suspendu de l’appui financier de la part de la communauté internationale.
La Guinée est toutefois confrontée à d’énormes difficultés économiques et financières, face auxquelles les populations consentent d’énormes sacrifices, déclare Rabiatou Sérah qui souligne la chute drastique du pouvoir d’achat, conséquence d’une «grave situation inflationniste ». Elle a rappelé que des données statistiques récentes ont indiqué que le taux de croissance est globalement négatif. Il a été de moins 0,3% en 2009, 1,9% en 2010 contre 4,8% en 2008. Et de soutenir que le contexte actuel est caractérisé par «la faiblesse de la mobilisation des recettes intérieures, la forte croissance des dépenses publiques orientées vers des secteurs non productifs, l’endettement excessif du Trésor Public auprès de la Banque centrale, l’accélération de l’inflation, entraînant une forte dépréciation du franc guinéen, le poids élevé de la dette extérieure.»
Le secteur privé, en dépit de l’existence d’un dispositif institutionnel favorable, reste encore «morose et tarde à jouer son rôle de moteur de croissance. Il en résulte une faiblesse notoire enregistrée au niveau des opportunités d’emplois pour les jeunes et un taux de chômage particulièrement élevé au niveau de cette couche vulnérable qu’il convient de corriger.» D’où son appel «à la reprise d’un dialogue avec les partenaires bi et multilatéraux, en vue de la conclusion d’un programme formel, à même de soulager le pays du lourd fardeau du service de la dette et de le conduire vers l’atteinte du point d’achèvement de l’initiative PPTE (Pays pauvres très endettés), avec à la clé, l’annulation substantielle de la dette extérieure.»
Hadja Rabiatou Sérah a recommandé le réalisme et le pragmatisme des membres du CNT dans leurs réflexions portant notamment sur «la mobilisation des ressources internes en vue de leur accroissement, avant de compter sur le concours des ressources externes. L’Etat guinéen ne peut espérer se développer en vivant au-dessus de ses moyens.» Elle demande que les recettes soient identifiées, mobilisées et sécurisées ; les dépenses, réduites, l’impunité sanctionnée. Le tout couronné par la conscience professionnelle, l’esprit patriotique et le civisme dans la gestion des ressources publiques. Et de demander de mettre fin aux anciennes pratiques caractérisées par les détournements de deniers publics, la corruption, les rackets, la gabegie et l’impunité, qui, selon elle, restent profondément enracinés dans les mœurs. Toute chose dira Rabiatou Sérah qui est conforme à la vision et au programme du Président Alpha Condé. Son discours d’ouverture de la session budgétaire a été suivi par ceux du Ministre de l’Economie et des Finances, Kerfalla Yansané, du ministre délégué au Budget, Mohamed Diaré et le Gouverneur de la BCRG, Louncény Nabé.
Mohamed Diaré, le ministre délégué au Budget, a pendant une quarantaine de minutes, présenté le projet de loi de finances 2011 au CNT. Pour lui, les premières élections présidentielles libres, transparentes, démocratiques et crédibles depuis l’indépendance de la Guinée en 1958, qui ont abouti à la victoire d’Alpha Condé, marquent l’avènement d’un nouveau régime politique. Ces élections auraient même fait renaître «l’espoir aux populations quant à la satisfaction de la forte demande sociale qui se résume à la sécurité alimentaire, la fourniture d’eau et d’électricité, la construction des routes, d’écoles, d’hôpitaux.»
Il estime que le nouveau départ du pays s’inscrit encore dans un «environnement international qui continue d’être marqué par les séquelles de la crise financière de 2008, aggravées par les troubles sociaux dans des pays producteurs de pétrole et par les catastrophes naturelles dans des pays producteurs de céréales, induisant une tension sur le cours des produits de base.» Cela, même si, selon le ministre délégué, l’objectif du Gouvernement demeure de restaurer la stabilité macroéconomique et budgétaire en vue de faire face aux attentes légitimes de la population pour l’amélioration de leurs conditions de vie. Parlant des séquelles de la crise financière de 2008, il rappelle que les cours des principaux produits de base importés et exportés par la Guinée ont connu, d’une manière générale, une légère hausse en 2010. Malheureusement, souligne-t-il, cette tendance pourrait continuer en 2011, pour beaucoup de ces produits. Le ministre de l’Économie et des Finances, Kerfalla Yansané, a par exemple annoncé que l’Etat est en train de subventionner le litre de carburant à 2 500 fg, soit 126 milliards de francs guinéens par mois. Il a annoncé aussi l’organisation d’une conférence des bailleurs de fonds sur la Guinée avant la fin 2011.
Voici un extrait du projet initial de loi de finances 2011, tiré du Discours du Ministre Mohamed Diaré
« Les recettes totales prévues en 2011, se chiffrent à 5 533,70 milliards de francs guinéens contre 4 154,87 milliards en 2010, soit un accroissement de 33,19%. Cette augmentation est imputable au secteur minier qui progresse de 34,04% et au secteur non minier pour 32,90%.
Au titre des recettes non minières, les recettes douanières passent de 1 628,75 milliards en 2010 à 2 262,47 milliards en 2011, soit une progression de 38,91%. Les recettes de la Direction nationale des impôts enregistrent quant à elles une augmentation de 39,48% avec une prévision de 2 198, 32 Mds en 2011 contre 1 576,10 milliards en 2010. Les recettes non fiscales passent de 179,87 milliards en 2010 à 348,56 milliards en 2011, soit une augmentation de 93,79%.
La pression fiscale qui découle de ces projections est de 16,69% contre 15,42% en 2010.
L’accroissement prévu des recettes résulte de la volonté du gouvernement d’accroître la productivité des services générateurs de recettes avec, comme mesure d’accompagnement, la suppression des exonérations non conventionnelles, le versement des recettes non fiscales perçues par les administrations publiques dans les comptes du Trésor public et le renforcement des moyens d’action des régies.
Au chapitre des concours extérieurs (dons et emprunts), les financements projetés se chiffrent à 1 005,75 Mds soit 141,36 millions de dollars contre 284,71 milliards en 2010 équivalant à 40 millions de dollars.
Le total général des dépenses du budget 2011 s’élève à 7 496,63 milliards dont 1 005,75 milliards sur financement extérieur, contre 8 041,10 milliards à fin 2010, soit une baisse de 6,77%. Les traitements et salaires en passant de 1 551,19 milliards en 2010 à 2 061,39 milliards en 2011 progressent de 32,9%. Ils représentent 39,79% des recettes fiscales contre 40,36% en 2010 et 39,15% des dépenses courantes contre 27,89% en 2010. (…)
Les dépenses en capital se chiffrent à 2 227,10 milliards en 2011 contre 2 478,86 milliards en 2010, soit une baisse de 10,16%. Ce montant comprend l’enveloppe du budget d’investissements publics de 2 212,4 milliards et les investissements financiers et transfert en capital prévus pour 18,25 milliards de francs guinéens. (…)
Il ressort de ces projections budgétaires après prise en compte des dons et emprunts identifiés un besoin de financement de 1 453,44 milliards. Il sera partiellement financé par des possibles appuis budgétaires attendus de la Banque mondiale, de la Banque africaine de développement, de l’Union européenne pour un montant total de 1 166,86 milliards et des réaménagements nets sur la dette extérieure à négocier pour -303,82 milliards. A ce titre, la Banque mondiale a déjà accordé au mois d’avril passé un appui budgétaire à la Guinée pour un montant de 78 millions de Dollars soit 554,97 milliards de Francs guinéens. Toutefois, il en résulte un besoin de financement résiduel de 579,01 milliards. La capacité à faire face à ses dépenses hors dette extérieure sur ses ressources propres (solde de base) est déficitaire de l’ordre de 662,61 milliards, soit 2,00% du PIB contre 12,23% en 2010…»
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