Alassane Ouattara a prêté serment samedi en tant que président de la Côte d'Ivoire, lors d'une cérémonie dont la plupart de ses concitoyens espèrent qu'elle mette un point final à une décennie de conflit et d'instabilité dans leur pays auparavant prospère.
Le président français Nicolas Sarkozy, dont les troupes ont contribué à sortir la Côte d'Ivoire de l'impasse où l'avait plongée la contestation du scrutin présidentiel, a assisté à la cérémonie en présence d'une vingtaine de chefs d'Etat et de gouvernement à Yamoussoukro, la capitale ivoirienne.
Alassane Ouattara a adressé des éloges appuyés à la France et à Nicolas Sarkozy, qui a été ovationné, pour avoir facilité le règlement de la crise intérieure.
"Ce jour est pour nous, peuple de la Côte d'Ivoire, un moment historique. Oui, ce jour est pour tous les Ivoiriens le début d'une ère qui marque la volonté commune d'écrire une nouvelle page de l'histoire de notre pays", a déclaré le nouveau président dans son discours.
"La grave crise qu'a connue la Côte d'Ivoire au lendemain du scrutin présidentiel (...) est à présent derrière nous. Plus qu'une simple cérémonie d'investiture (...), c'est le retour de la Côte d'Ivoire sur la scène africaine et internationale que nous célébrons aujourd'hui", a-t-il poursuivi.
"Vous me permettrez de citer tout particulièrement la France. La France avec laquelle la Côte d'Ivoire a des liens historiques et une vision commune de l'avenir.
"Monsieur le président Sarkozy, le peuple ivoirien vous dit un grand merci. Oui, un grand merci pour votre engagement dans la résolution de la crise ivoirienne sous mandat des Nations unies, qui a permis de sauver des nombreuses vies. Nous vous serons toujours reconnaissants", a-t-il ajouté.
Alors que Ouattara, enveloppé d'une écharpe orange, était assis à la tribune, un groupe de chefs coutumiers de Yamoussoukro a répandu du sable au sol et procédé à un rituel visant à lui attirer la bonne volonté des esprits ancestraux.
LE DÉFI DE LA RÉUNIFICATION
Proclamé vainqueur du second tour de la présidentielle le 28 novembre, dont les résultats avaient été certifiés par l'Onu, Ouattara a dû attendre le 11 avril pour accéder au pouvoir après être venu à bout de la résistance du président sortant Laurent Gbagbo, qui contestait sa défaite.
L'élection était censée au départ réunifier le pays, premier exportateur mondial de cacao, dont la moitié nord était passé sous le contrôle de rebelles fin 2002. Mais le refus de Gbagbo de concéder sa défaite l'avait replongé dans une guerre civile.
Des rebelles pro-Ouattara appuyés par l'armée française et par les casques bleus de l'Onuci ont mis fin à l'impasse en mobilisant hélicoptères et blindés pour neutraliser les armes lourdes du camp Gbagbo.
"C'est important d'être ici, en Côte d'Ivoire, à côté du président Ouattara pour la démocratie et pour l'Afrique", a déclaré le président Sarkozy à la presse.
"Vous avez vu, tout le monde a dit 'merci Sarko'", a déclaré pour sa part Alassane Ouattara alors que les deux présidents venaient de passer en revue un comité d'accueil officiel.
Au moins 3.000 personnes ont été tuées et un million d'autres déplacées durant la crise, qui a entraîné l'arrêt des exportations de cacao, la fermeture de banques et la mise à sac de nombreux commerces.
Avant de se rendre à la cérémonie d'investiture, le secrétaire général de l'Onu Ban Ki-moon, venu spécialement pour l'occasion, a déclaré que la communauté internationale devait soutenir Ouattara et marteler l'idée que la volonté du peuple devait être respectée.
"Une personne démocratiquement élue doit être celle qui dirige le pays en vertu de la volonté du peuple. C'est ce que nous avons appris, c'est le message que nous devons diffuser", a dit Ban lors d'une entrevue avec le président ghanéen John Atta Mills samedi à Accra.
Dans le cadre d'un fort dispositif de sécurité, des blindés de l'Onuci étaient déployés sur les principaux axes de Yamoussoukro pour la venue des chefs d'Etat et de gouvernement.
Ouattara a pour tâche de réunifier un pays profondément divisé et de remettre sur les rails son économie mise à mal. Mais les Ivoiriens se montrent résolus à aller de l'avant.
"Ce qui a eu lieu, a eu lieu. Nous ne voulons plus regarder en arrière, nous voulons regarder droit devant nous", a dit Youssouf Touré, électricien de métier, en attendant près du lieu de la cérémonie.
"Cette crise est terminée. Nous pouvons l'oublier. Le président Ouattara a dit que nous devions pardonner. Nous pourrons ensuite commencer à récupérer ce que nous avons perdu." – Reuters