Nicolas Sarkozy a pris des accents gaulliens pour plaider jeudi pour une Libye unie et affirmer que Mouammar Kadhafi et ses proches devraient rendre des comptes.
La brève visite en Libye du président français, accompagné du Premier ministre britannique, David Cameron, a culminé à Benghazi, berceau de la révolte libyenne, où les deux hommes, en pointe dans la coalition internationale contre le régime du "guide" déchu, ont été accueillis par une foule en liesse estimée à 1.500 personnes.
"Amis de Benghazi, nous vous demandons une chose, nous croyons dans la Libye unie, pas dans la Libye divisée," a lancé un Nicolas Sarkozy exalté à un auditoire conquis, sur la plus grande place de la ville, rebaptisée place de la Liberté.
Un peu plus tôt à Tripoli, le chef de l'Etat avait appelé les pays qui accueillent des anciens responsables libyens recherchés par la justice à travailler avec les instances internationales "pour qu'ils rendent des comptes".
Nicolas Sarkozy a par ailleurs assuré qu'il n'y avait eu aucun accord entre les nouvelles autorités libyennes et la France pour le partage des richesses de la Libye et que la France ne demandait aucune "préférence".
DÉGEL DE NOUVEAUX AVOIRS
Le colonel Kadhafi "doit être arrêté et tous ceux qui sont inculpés par des juridictions internationales doivent rendre des comptes pour ce qu'ils ont fait", a-t-il dit. "Nous appelons tous les pays qui ont sur leur sol des personnes recherchées à travailler avec les instances internationales pour que chacun rende des comptes sur ce qu'il a fait", a-t-il ajouté.
La Cour pénale internationale de La Haye a lancé des mandats d'arrêt internationaux contre l'ancien dirigeant libyen, qui n'a pas été vu en public depuis juin, et certains de ses proches.
"Naturellement, l'engagement aux côtés du peuple libyen n'est pas terminé. Tant que la paix sera menacée, la France restera à vos côtés", a encore dit Nicolas Sarkozy.
La France va notamment demander la coopération du Niger concernant les proches de Mouammar Kadhafi, dont l'un de ses fils, Saadi Kadhafi, ayant trouvé refuge dans ce pays voisin de la Libye, a-t-il ajouté.
La France et la Grande-Bretagne soumettront vendredi au Conseil de sécurité de l'Onu une résolution pour le dégel d'avoir libyens supplémentaires, a annoncé pour sa part David Cameron lors d'une conférence de presse commune.
"Nous avons d'ores et déjà débloqué un milliard de livres d'avoirs libyens. Nous allons proposer avec la France une résolution dès demain", a dit le Premier ministre britannique.
"Il y a 12 milliards d'avoirs supplémentaires que nous pourrions dégeler au Royaume-Uni le plus tôt possible", a-t-il précisé.
Premiers dirigeants occidentaux de haut rang à se rendre dans le pays depuis la chute de Tripoli, il y a trois semaines, le président français et le Premier ministre britannique ont été les principaux animateurs de la coalition internationale qui est intervenue en soutien des insurgés il y a six mois.
Le chef de l'Etat a déclaré à son arrivée sa "grande émotion" de venir dans une Libye "libérée" et dit qu'il y porterait un message de "pardon et de la réconciliation".
Alors que de violents combats se poursuivent autour des derniers bastions kadhafistes, cette visite a été préparée dans la discrétion et n'a été confirmée qu'au dernier moment pour des raisons de sécurité.
TOUR D'HONNEUR
Nicolas Sarkozy et David Cameron sont arrivés séparément à Tripoli, où ils ont visité un hôpital avant de rencontrer les dirigeants du Conseil national de transition (CNT) et de tenir une conférence de presse.
Ils ont ensuite rejoint Benghazi, le berceau de l'insurrection libyenne dans l'est du pays, où ils ont pris un plaisir visible à se faire acclamer.
Prévue pour durer quelques heures, cette visite a pris des allures de tour d'honneur pour les deux dirigeants, dans un pays où les graffitis "Merci Sarkozy" et "Thank you Britain" sont visibles un peu partout.
Elle illustre aussi une volonté de voir la Libye, un pays riche en pétrole et en gaz, retrouver toute sa place dans la communauté internationale.
Les dirigeants français et britannique ont été précédés mercredi à Tripoli par un secrétaire d'Etat adjoint américain, qui a été reçu par le numéro un du CNT, Moustapha Abdeljalil.
Vendredi, ce sera au tour du Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, de faire le déplacement à Tripoli, où le ministre égyptien des Affaires étrangères, Mohammed Kamel Amr, est également annoncé.
Mouammar Kadhafi reste introuvable et de nombreux hauts responsables de son régime ont fui le pays depuis l'entrée des forces du CNT à Tripoli le 23 août. – AfricaLog avec Reuters