Les Etats-Unis ont estimé que l'élection présidentielle du 9 octobre au Cameroun était entachée "d'irrégularités à tous les niveaux" a affirmé l'ambassadeur des Etats-Unis au Cameroun Robert Jackson dans une déclaration lue à Yaoundé et transmise aujourd'hui alors que la France par la voix de son ministre des Affaires étrangères Alain Juppé avait jugé mardi que les élections avaient eu "lieu dans des conditions acceptables".
"Le jour du scrutin, nos observateurs ont noté des incohérences et des irrégularités à tous les niveaux, ainsi que des difficultés techniques de la part d'Elecam (Elections Cameroon, la commission électorale) dans l'administration de l'élection", a affirmé le diplomate. L'opposition camerounaise accuse le président sortant Paul Biya, 78 ans, au pouvoir depuis 1982, et favori pour la réélection d'avoir verrouillé le système électoral à son avantage.
"L'une des plus grandes critiques a porté sur la façon dont les listes électorales ont été conçues et gérées, laissant libre cours aux votes multiples. Le manque de formation des agents électoraux et d'éducation des électeurs concernant la manière de voter était apparent", a ajouté l'ambassadeur américain. "L'encre qui devrait être utilisée pour empêcher les votes multiples n'était pas indélébile, et les responsables des bureaux de vote ne prenaient pas la peine de vérifier les pouces des électeurs", a poursuivi Robert Jackson.
Le diplomate a fait 19 recommandations, notamment: "le Cameroun doit adopter un bulletin de vote unique afin d'empêcher l'achat des voix", "le parti au pouvoir doit s'abstenir d'utiliser les ressources publiques pour faire campagne" et "doit s'abstenir de susciter la peur en faisant valoir que voter pour l'opposition entraînerait l'instabilité et la guerre civile".
L'ambassadeur américain s'est aussi montré critique de l'opposition qui a présenté 22 candidats (face au président Paul Biya, 78 ans), en notant : "il y a lieu d'émettre des réserves quant au sérieux de cette opposition et des candidats"
"Se réveillant tardivement, certains partis d'opposition parlent désormais d'un front commun. N'auraient-ils pas dû y penser plus tôt ?", s'est-il interrogé.
La Cour suprême du Cameroun a rejeté les recours de candidats en annulation totale ou partielle de la présidentielle, dans la nuit de hier à aujourd'hui. Elle a annoncé que les résultats seraient proclamés demain. Le Social Democratic Front (SDF) de l'opposant historique John Fru Ndi et six autres partis ont indiqué qu'ils rejetaient par avance les résultats de la présidentielle, appelant les populations à manifester si la présidentielle n'était pas annulée.
Le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), parti du président Biya, avait accusé mardi "certains partis politiques (...) au mépris de la légalité républicaine, de lancer des appels injustifiés et inadmissibles au désordre et à la violence".
En février 2008, des émeutes contre la vie chère et contre le projet de suppression de la limitation du nombre de mandats présidentiels, avaient coûté la vie à 40 personnes, selon un bilan officiel, au moins 139 d'après des ONG.
"La Mission américaine avait dépêché 14 équipes de deux à quatre personnes (...) dans chacune des dix régions du Cameroun, avec des équipes supplémentaires à Douala (sud), la plus grande ville du pays, et à Yaoundé", la capitale, selon le diplomate. – AfricaLog avec agence