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Fatou Bensouda, nouveau procureur de la CPI

Dec 12, 2011

La Gambienne Fatou Bensouda a été élue lundi à New York au poste de procureur de la Cour pénale internationale (CPI), où elle devra composer avec un élément de plus en plus patent: la chasse aux criminels de guerre devient un enjeu politique.

Cette ancienne ministre de la Justice a été élue par consensus lors de la réunion annuelle des 120 Etats membres de la CPI au siège de l'ONU.

Elle succèdera en juin à Luis Moreno-Ocampo, resté neuf ans à la tête de la CPI. Il y avait en septembre, au début du processus de sélection, 52 candidats en lice. Mme Bensouda est l'actuelle adjointe de M. Moreno-Ocampo à la CPI.

"Je suis particulièrement fière d'avoir été soutenue par ma région de manière si appuyée depuis le début. Le continent africain a encore une fois montré son soutien et son engagement en faveur de la justice internationale et de la Cour", a-t-elle déclaré.

"Je serai le procureur de tous les Etats membres d'une manière indépendante et impartiale", a-t-elle cependant affirmé.

Régulièrement, les pays africains se plaignent de ce que la CPI vise, injustement, estiment-ils, le continent noir. De fait, les sept enquêtes ouvertes depuis 2003 concernent toutes des pays africains (Ouganda, République démocratique du Congo, République centrafricaine, Soudan, Kenya, Libye et Côte d'Ivoire).

Mais Mme Bensouda, qui était candidate unique des 120 Etats-membres, veut croire que son origine sera un atout.

"Je ne pense pas aux dirigeants que nous poursuivons", disait-elle récemment lors d'un entretien accordé à l'AFP à La Haye où siège la CPI. "Je travaille pour les victimes d'Afrique, elles sont africaines comme moi, voilà d'où je tire ma fierté et mon inspiration".

Nombreux sont pourtant les observateurs qui voient une très forte politisation de l'institution, qui est devenue sujette, selon eux, à une pression dont Fatou Bensouda aura du mal à se soustraire.

Richard Dicker, directeur du programme "Justice internationale" de l'ONG Human Rights Watch, juge que la toute jeune CPI, créée en 2002, "a pris, en dix ans, une envergure nouvelle sur la scène internationale".

"Si certains gouvernements reconnaissent le rôle de la CPI dans les crises et conflits, d'autres ont tenté d'utiliser la Cour (...) à des fins politiques", note-t-il.

L'origine africaine de Fatou Bensouda risque de jouer contre elle et pourrait écorner l'image de la Cour sur le continent noir, avance Stephen Lamony de l'ONG Coalition pour la Cour pénale internationale.

Certains pays africains ont tenté de pousser le Conseil de sécurité de l'ONU à suspendre les poursuites contre Omar el-Béchir, le président soudanais sous le coup d'un mandat d'arrêt de la CPI pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité au Darfour. De son côté, le Kenya fait campagne contre l'enquête lancée sur les violences post-électorales de 2007-2008.

Mais la pression vient aussi d'acteurs majeurs (Etats-Unis, Chine et Russie) qui, bien que ne faisant pas partie de la CPI, tentent à leur manière d'influencer son travail en fonction de leurs intérêts.

Christian Wenaweser, ambassadeur du Liechtenstein et président sortant de l'Assemblée des Etats membres de la CPI, espère que le Statut de Rome, qui régit le fonctionnement de la Cour, suffit à protéger le procureur.

"Nous sommes, les Etats membres, les défenseurs de cette loi. C'est cela qui protège le procureur", dit-il. M. Wenaweser juge même que l'origine africaine de Mme Bensouda va lui être bénéfique et aura un "impact politique", notamment dans ses efforts pour inciter les gouvernements à coopérer lorsque leurs dirigeants sont mis en cause.

Le travail du procureur "a sans aucun doute un effet politique et nous le voyons tous les jours. Et là, le nouveau procureur va devoir trouver le juste équilibre", ajoute Christian Wenaweser. – AfricaLog avec AFP

 

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