Un candidat d'opposition à la présidentielle du 26 février au Sénégal a évoqué lundi à Rufisque (banlieue de Dakar) la création d'un "Conseil national de transition" au cas où le chef de l'Etat Abdoulaye Wade persisterait à se présenter à ce scrutin.
M. Wade, 85 ans dont 12 au pouvoir et dont la candidature est jugée anticonstitutionnelle par ses opposants unis et déterminés à obtenir qu'il la retire, s'en est pour sa part vivement pris "au diktat de l'extérieur" concernant sa volonté de se représenter pour un troisième mandat.
Cheikh Tidiane Gadio, ex-ministre des Affaires étrangères de M. Wade, devenu opposant et candidat contre lui, a pour la première fois parlé d'un "Conseil national de transition" au Sénégal lors d'un meeting tenu conjointement à Rufisque avec la plupart des autres candidats d'opposition.
"Si Abdoulaye Wade persiste, nous n'allons pas le reconnaître, ni reconnaître son gouvernement, et nous allons organiser une campagne pour la reconnaissance d'un Conseil national de transition que nous allons, nous autres, créer", a déclaré M. Gadio, devant des milliers de personnes.
"La seule façon de servir le Sénégal dans l'honneur et la dignité, c'est de s'opposer à la candidature inconstitutionnelle d'Abdoulaye Wade jusqu'au bout", a-t-il ajouté.
Huit candidats d'opposition, dont M. Gadio, ainsi que le célèbre chanteur Youssou Ndour dont la candidature a été rejetée par le Conseil constitutionnel, ont décidé de mener en commun la campagne électorale qui s'est ouverte dimanche au Sénégal, à l'approche du scrutin présidentiel du 26 février.
Très applaudi, Youssou Ndour a appelé les électeurs à prendre l'argent de ceux qui voudraient acheter leurs voix, et de voter contre eux. "Cet argent est l'argent de l'Etat (qui a été) volé , c'est votre argent. Prenez-le, bouffez-le (...) et fermez-leur vos portes!", a-t-il lancé.
Leaders du Mouvement du 23 juin (M23), qui regroupe partis politiques et organisations de la société civile, les opposant ont tenu leur premier meeting dimanche à Dakar sur la Place de l'Obélisque, devenue le symbole de la contestation.
"Non au diktat"
Après celui de Rufisque, ils ont prévu une marche mardi après-midi dans le centre de Dakar.
Pendant et en marge de son premier meeting de campagne dimanche à Mbacké (centre), le président Wade a de son côté fustigé tout particulièrement des déclarations du chef de la diplomatie française Alain Juppé qui venait de réitérer son souhait d'une "relève de génération" au Sénégal.
"Est-ce que vous trouvez normal qu'un ministre des Affaires étrangères se mêle de la politique d'un pays pour dire ce que nous allons faire. Qu'est-ce que c'est que ces manières là?", s'est-il interrogé sur une radio française, ajoutant: "C'est inacceptable et indécent (...) Aucun Sénégalais ne peut l'accepter".
"Je n'accepte pas le diktat de l'extérieur", a-t-il dit, en rappelant qu'il répondrait "éventuellement" à des déclarations qui seraient faites par les présidents français et américain Nicolas Sarkozy et Barack Obama, pas à celles de simples "ministres des Affaires étrangères".
Des haut responsables de l'administration Obama ont jugé qu'il serait mieux pour le Sénégal que le président Wade prenne "sa retraite".
Elu en 2000 puis réélu en 2007, Abdoulaye Wade, 85 ans, brigue un troisième mandat de sept ans face à 13 candidats.
Pour l'opposition il a épuisé ses deux mandats légaux et donc sa nouvelle candidature est un "coup d'Etat constitutionnel". Dans le camp Wade, on affirme que les réformes de la Constitution en 2001 et 2008 lui permettent de concourir.
La validation le 27 janvier de sa candidature par le Conseil constitutionnel, confirmée deux jours plus tard, a provoqué des violences qui ont fait quatre morts et plusieurs blessés à Dakar et en province.
Le chef de l'Etat a accusé l'opposition d'être responsable de ces violences et s'est montré offusqué des attaques sur son âge.
"Que les étrangers le disent, ce n’est pas grave. Que les Sénégalais le disent, c’est un manque de respect", a-t-il affirmé, en se qualifiant de "sage". - AfricaLog avec agence