«Nous voulions nous exprimer autrement étant donné que le gouvernement ne semblait pas entendre raison face à nos diverses revendications», a déclaré Cellou Dalein Diallo de l’UFDG.
L’appel de l’opposition à une "ville morte" le lundi, 13 février 2012 n’a pas connu le succès escompté en dépit des multiples interventions au niveau des radios libres.
Les citoyens, dans leur ensemble, ont ignoré cet appel. Pour les uns, «nous nous vivons au jour le jour», pour les autres, «puisque je ne suis pas encore mort, pourquoi observer la ville morte».
Les moins démocrates ont carrément déclaré: «l’Etat doit interdire pareille démarche qui met une fois de plus notre pays en retard».
Les réactions des politiciens réunis autour de la table de dialogue ont également été enregistrées par la presse: Kokpa Dopavogui de l’Opposition radicale, Mamady Lamine Condé, Centriste de l’ADP, Mamadou Diawara, Centriste Républicain et Soriba Sorel Camara de la mouvance présidentielle ont tous regretté cet appel à la "ville morte" «qui ne saurait régler les problèmes auxquels le pays est confronté ». Ils estiment que «cet appel n’était pas opportun au moment où le dialogue pour la sortie de la crise est en cours».
Etienne Soropogui du Collectif pense autrement: «Nous, nous estimons que la journée d’hier a été une réussite totale. Nos militants ont observé cette consigne de "ville morte". Il y a certains fonctionnaires qui ont été obligés d’aller au travail pour ne pas qu’ils subissent des représailles. Au niveau de certaines entreprises privées aussi, on a été obligé d’ouvrir pour éviter des représailles. Nous avons voulu lancer un message, pour que le monde entier, la communauté nationale et internationale comprennent qu’en dépit de notre volonté affichée de négocier avec le gouvernement, tous les jours que Dieu fait, nous subissons des représailles, nos gens sont persécutés, intimidés, surtout à l’intérieur du pays et même au niveau de Conakry.»
Pour l’initiateur de l’appel à la "ville morte" en l’occurrence le leader de l’UFDG : «Je me félicite, je félicite les militants et sympathisants des partis membres du Collectif et de l’ADP ainsi que tous les citoyens épris de justice et de liberté qui ont suivi le mot d’ordre de l’ADP et du Collectif. Je pense que nous voulions nous exprimer autrement étant donné que le gouvernement ne semblait pas entendre raison face à nos diverses revendications au titre du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales.»
Par rapport au constat d’un échec de l’appel à la "ville morte", Cellou Dalein Diallo a un autre prisme d’observation et d’appréciation de la réalité sur le terrain: «Vous ne pouvez pas me dire que les activités se poursuivent normalement. Aujourd’hui, passez actuellement au Palais du peuple, la circulation est fluide. Allez à Madina [le plus grand marché du pays, ndlr], les boutiques n’ont pas ouvert, partout. Quand même, il n’y a qu’à Kaloum [le centre-ville et des affaires, ndlr], c’est certain qu’il y a une relative activité, mais dans la banlieue, il n’y a pas d’activité.»
Le leader de l’opposition soutient ainsi que «le mot d’ordre a été suivi et je pense que les gens, conformément à l’appel lancé par les deux blocs politiques, ont exprimé leur ras-le-bol et leurs inquiétudes face aux violations répétées des droits de l’homme et des libertés fondamentales.»
Le point dans certaines villes de l’intérieur du pays:
- A Dubréka, les citoyens ont vaqué normalement à leurs affaires. Correspondance: «très tôt ce matin, les laborieuses populations de Dubréka ont vaqué à leurs affaires habituelles. Les magasins et kiosques sont restés ouverts ; les élèves et maîtres ont repris le chemin de l’école après le week-end ; les transporteurs étaient tous à la gare-routière pour permettre aux travailleurs de regagner leurs lieux de travail à l’heure.»
- A Labé, fief du leader de l’UFDG, Cellou Dalein Diallo, le mot d’ordre a été suivi «à la lettre» : «lancé par le Collectif et l’ADP, le mot d’ordre de la journée "ville morte" a été largement suivi à Labé. Boutiques, magasins, kiosques ainsi que les ateliers sont fermés. La circulation est fortement paralysée. Les établissements de l’enseignement scolaire ont connu une faible fréquentation. Cependant, les autres services de l’administration et certaines entreprises du secteur privé ont fonctionné, notamment les banques.»
- A Kankan, fief du RPG du Président Alpha Condé, c’était «l’indifférence» à l’appel de l’opposition. Constat: «la journée du lundi 13 février s’est déroulée à Kankan comme d’habitude. C’était le train-train habituel. Les commerces, les services publics, les écoles et universités ont fonctionné comme si de rien n’était.»
Du côté du gouvernement, il n’y a pas eu de battage médiatique particulier pour "casser" cet appel à la journée "ville morte".
Le Ministre de la Communication avait qualifié la veille, la déclaration de «tract, car document non signé» et que «l’opposition est aux abois». Le jour J, Dirus Dialé Doré, répondant à une question des journalistes qui l’avaient joint dans son véhicule avait déclaré qu’il se trouvait «dans l’embouteillage, signe que tout se déroule normalement.»
Après cet appel à la "ville morte", peut-on s’attendre à une autre expression de l’opposition? Le leader de l’UFDG répond: «Pour l’instant, nous avons voulu nous exprimer ; attirer l’attention du peuple de Guinée et de la communauté internationale sur la persistance, l’obstination du gouvernement de monsieur Alpha Condé à violer les droits humains, à n’avoir aucun égard pour les droits de l’homme et pour les libertés fondamentales dans ce pays. Dans notre déclaration, on a cité des exemples particulièrement édifiants à cet égard.»
Pour Etienne Soropogui, «Nous pensons que ça a permis d’ouvrir le débat. Et que les gens comprennent que, encore malheureusement en Guinée aujourd’hui, il y a des choses que nous bannissons, qui sont en train de se produire au jour le jour. L’exercice libre de l’activité politique a des problèmes.»
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