Le Premier ministre ivoirien, Jeannot Kouadio Ahoussou, a reçu vendredi les dirigeants du parti de l'ex-président Laurent Gbagbo, le Front populaire ivoirien (FPI), pour tenter de relancer un difficile dialogue après un regain de tensions.
Accompagné notamment du ministre de l'Intérieur Hamed Bakayoko, M. Ahoussou a accueilli une délégation du FPI conduite par le président par intérim du parti, Sylvain Miaka Oureto. C'était leur première rencontre officielle depuis que le climat politique s'est détérioré en juin, rappelant que la situation reste fragile après la crise meurtrière de 2010-2011.
Il a été surtout question de "méthode", a déclaré Sébastien Dano Djédjé, ex-ministre de la Réconciliation nationale et haut responsable FPI, à la sortie de cette réunion d'environ deux heures.
"Il est question de voir comment avec le gouvernement un cadre peut être créé" pour des discussions futures, a-t-il précisé. Le FPI a "pris note" de l'offre du Premier ministre de rejoindre un "cadre permanent de dialogue" récemment instauré. "Nous aviserons", s'est borné à dire M. Djédjé.
Fin avril, le gouvernement avait eu une rencontre avec l'opposition à Grand-Bassam, près d'Abidjan, pour relancer le "dialogue républicain". Mais le FPI avait choisi de n'y assister que comme "observateur" et a refusé depuis lors de participer au "cadre permanent de dialogue" alors institué: il ne veut pas être traité à l'égal des petites formations pro-Gbagbo qui en sont membres et réclame un "dialogue direct" avec le pouvoir.
Malgré la création d'une Commission dialogue, vérité et réconciliation (CDVR), la réconciliation est en panne plus d'un an après la fin de la crise de décembre 2010-avril 2011, née du refus de M. Gbagbo de reconnaître sa défaite à la présidentielle de novembre 2010 face à Alassane Ouattara. La crise a fait quelque 3.000 morts.
La tension est montée en juin après des attaques dans le Sud-Ouest qui ont coûté la vie à plus d'une vingtaine de personnes, dont sept Casques bleus nigériens. Les autorités avaient quelques jours plus tard affirmé avoir déjoué en mars un projet de putsch. Dans les deux cas, le pouvoir a accusé des pro-Gbagbo, s'attirant un virulent démenti du FPI.
Quatre militaires ont été inculpés d'"attentat contre la sûreté de l'Etat" pour le complot présumé, a annoncé vendredi la justice militaire.
L'ex-chef de l'Etat est incarcéré depuis novembre 2011 à La Haye par la Cour pénale internationale (CPI), qui le soupçonne d'être "coauteur indirect" de crimes contre l'humanité. L'audience de confirmation des charges pesant sur lui est prévue le 13 août.
Pour la réconciliation, le FPI, qui dénonce une "justice des vainqueurs", exige la libération de ses cadres détenus depuis la fin de la crise dans le nord du pays.
Huit d'entre eux, dont l'ex-Première dame Simone Gbagbo et l'ancien président du FPI Pascal Affi N'Guessan, sont depuis peu inculpés de "génocide" par la justice ivoirienne.
Depuis le transfert de l'ancien président à La Haye, la CPI n'a annoncé aucun autre mandat d'arrêt.
Mais, dans un entretien diffusé le 8 juillet sur Radio France Internationale (RFI), le président de l'Assemblée nationale et ex-Premier ministre Guillaume Soro a affirmé que trois autres mandats ont été émis: contre Simone Gbagbo, contre l'ex-chef des "jeunes patriotes" pro-Gbagbo, Charles Blé Goudé, et contre le général Brunot Dogbo Blé, ancien patron de la Garde républicaine. La CPI n'a voulu faire aucun commentaire.
De son côté, l'ONU a lancé un ferme avertissement au gouvernement.
Le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon et son représentant spécial en Côte d'Ivoire Bert Koenders "estiment que la situation des droits de l'Homme dans le pays reste préoccupante", selon un communiqué publié par la mission onusienne Onuci.
L'ONU appelle les autorités à "combattre l'impunité", notamment dans les rangs des forces armées, et leur demande "instamment" d'"accélérer" la réforme, encore balbutiante, du secteur de la sécurité. – AfricaLog avec agence