Les islamistes qui occupent le nord du Mali ont à nouveau détruit dimanche à Tombouctou des mausolées, promettant de les anéantir tous: après des amputations à Gao, ces exactions sonnent comme un pied de nez au feu vert de l'ONU à l'envoi d'une force armée internationale pour les combattre.
La casse des derniers mausolées de Tombouctou, dans le nord-ouest du Mali, jusqu'alors épargnés par les islamistes qui avaient entamé les destructions en juillet, s'ajoutent aux amputations vendredi de la main de deux voleurs présumés à Gao au nom de la charia (loi islamique).
Ces exactions ont été commises après l'adoption jeudi par le Conseil de sécurité de l'ONU d'une résolution autorisant, par étapes et sous condition, une intervention armée dans le nord du Mali pour chasser, au mieux à partir de septembre 2013, les islamistes armés qui l'occupent totalement depuis six mois.
«Il ne va pas rester un seul mausolée à Tombouctou, Allah n'aime pas ça, nous sommes en train de casser tous les mausolées cachés dans les quartiers», a déclaré à l'AFP Abou Dardar, un chef d'Ansar Dine (Défenseurs de l'islam), groupe islamiste armé qui occupe Tombouctou avec Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).
Mohamed Alfoul, qui se présente comme un membre d'Aqmi à Tombouctou, a de son côté justifié ces destructions en affirmant que tout ce qui ne relève pas de l'islam, «ce n'est pas bien, l'homme doit vénérer seulement Allah».
Les destructions des mausolées de saints musulmans de Tombouctou, ville historique «aux 333 saints», ancien centre culturel et intellectuel d'Afrique classé patrimoine mondial en péril, ont été confirmées par des habitants.
«Actuellement, les islamistes sont en train de briser tous les mausolées des quartiers avec des pioches», a dit l'un d'eux.
«J'ai vu les islamistes descendre d'une voiture près de la grande mosquée de Tombouctou. Derrière une maison, ils ont cassé un mausolée en criant Allah est grand, Allah est grand», a affirmé un autre témoin.
Outre les cimetières et les mosquées, plusieurs ruelles et des habitations privées de la ville abritent également des mausolées, vénérés par la population.
En juillet, les islamistes d'Ansar Dine et d'Aqmi, qui considèrent la vénération des saints comme «de l'idolâtrie», avaient suscité un tollé général en détruisant de premiers mausolées à Tombouctou, en particulier ceux situés dans l'enceinte de la plus grande mosquée de la ville.
Ils avaient récidivé en détruisant d'autres mausolées en octobre, à la veille d'une réunion internationale à Bamako sur l'envoi d'une force armée au Mali pour les chasser du Nord qu'ils occupent avec un autre groupe islamiste, le Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao).
Cette fois-ci, les destructions ont été commises trois jours après l'adoption par le Conseil de sécurité de l'ONU d'une résolution autorisant le déploiement conditionnel, vers la fin de l'année 2013, d'une force internationale d'au moins 3300 soldats africains pour reconquérir le nord du Mali.
Vendredi, les islamistes du Mujao qui occupent Gao y avaient amputé la main de deux voleurs présumés, promettant pour «bientôt» de nouvelles amputations.
Le 29 juillet à Aguelhok (nord-est), des membres d'Ansar Dine avaient lapidé à mort, en public, un homme et une femme auxquels ils reprochaient d'avoir eu des enfants sans être mariés.
Depuis août, plusieurs autres amputations publiques ont été commises par les islamistes dans différentes localités du nord du Mali, sans compter des centaines de coups de fouet à des couples «illégitimes», des buveurs d'alcool, des fumeurs, et autres «déviants», selon les groupes islamistes, ainsi que l'arrestation de femmes non voilées chez elles.
Ansar Dine, groupe composé essentiellement de Touareg islamistes, a signé vendredi à Alger un accord avec la rébellion touareg laïque du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) qui avait lancé l'offensive dans le Nord en janvier avant d'en être chassé par les islamistes.
Les deux groupes se sont engagés à cesser les hostilités dans le nord du Mali et à négocier une solution politique avec Bamako, mais Ansar Dine a réaffirmé qu'il n'entendait pas renoncer à l'application de la charia dans les zones sous son contrôle. – AfricaLog avec agence