Le débat sur le Viagra féminin agite les scientifiques, alors que firme pharmaceutique allemande Boehringer Ingelheim espère lancer sur le marché américain le flibanserin, un médicament qui agit sur le cerveau des femmes pour accroître leur appétit sexuel.
Boehringer Ingelheim espère obtenir l'approbation de la FDA, l'administration américaine chargée des médicaments, indispensable pour une mise sur le marché.
Selon le Washington Post, de nombreux professionnels de santé s'opposent à la mise sur le marché du produit, car ils estiment que celui-ci met en avant de «fausses» maladies (la frigidité), a des effets secondaires néfastes, et pourrait encourager les femmes à ne pas s'échapper de relations malsaines ou abusives.
Comme pour le Viagra, le comprimé bleu de Pfizer, les effets du flibanserin sur la libido sont secondaires. Ce produit avait originellement été conçu comme un antidépresseur. Mais des études scientifiques ont révélé ses effets sur l'appétit sexuel. Une étude canadienne (financée par Boehringer Ingelheim) menée sur une période de 24 semaines montre par exemple que «les femmes nord-américaines en préménopause touchées par une baisse générale du désir sexuel ayant reçu 24 semaines de traitement au flibanserin étaient davantage susceptibles d'indiquer une amélioration significative de leur condition que les femmes ayant reçu un placebo».
L'une des inquiétudes des scientifiques, à propos du flibanserin, est que son mécanisme n'est pas connu avec précision. Il pourrait faire chuter les taux de sérotonine tout en augmentant la dopamine et la norépinéphrine. Les seuls effets secondaires constatés jusqu'à présent par le directeur de la recherche clinique de Boehringer Ingelheim, Michael Sand, sont des nausées, des vertiges et de la somnolence.
Pour Michael Sand, «les femmes ont droit à des solutions et nous espérons que le flibanserin puisse représenter une solution sûre et efficace pour de nombreuses femmes». À l'inverse, Ray Moynihan, auteur du livre Sex, Lies and Pharmaceuticals (à paraître en octobre) et enseignant à l'Université de Newcastle en Australie, estime: «Les gens pensent qu'ils sont malades alors qu'ils ne le sont pas. Les gens deviennent des patients alors qu'ils n'ont pas besoin de le devenir.»
Leonore Tiefer, professeur associée de psychiatrie à l'Ecole de médecine de New York University, déclare de son côté: «Le désir d'émancipation sexuelle des femmes est très estimable. Je crains que ce ne soit en train d'être pris en otage par une industrie motivée par le profit, qui n'essaie pas vraiment de comprendre les femmes et leur sexualité.»
La FDA doit donner son avis le flibanserin le 18 juin. – La Presse