Benoît XVI s'est envolé mardi de Rome à destination du Cameroun, première étape d'un voyage apostolique de sept jours qui doit également le conduire en Angola. En route vers Yaoundé, le pape a estimé que la distribution de préservatifs n'était pas la solution dans la lutte contre le SIDA qui ravage l'Afrique.
Ses propos risquent de renforcer les interrogations de certains religieux oeuvrant auprès des victimes du SIDA, qui remettent en question l'opposition de l'Eglise aux préservatifs, alors que le Vatican prône l'abstinence sexuelle pour prévenir la propagation du virus. "Vous ne pouvez pas" la combattre "avec la distribution de préservatifs", a déclaré Benoît XVI à des journalistes dans l'avion d'Alitalia qui l'emmenait vers le continent noir pour la première fois de son pontificat. "Au contraire, cela accroît le problème". Le pape ne s'était jamais exprimé explicitement sur l'usage des préservatifs, assurant seulement que l'Eglise catholique était en première ligne de la lutte contre le SIDA. Le souverain pontife a en outre affiché son intention d'en appeler à la "solidarité internationale" avec l'Afrique, face à la crise internationale. Si l'Eglise ne propose pas de solutions économiques précises, elle peut émettre des suggestions "spirituelles et morales", a-t-il observé. Décrivant la crise actuelle comme la conséquence d'un "manque d'éthique dans les structures économiques", Benoît XVI a noté que sur ce point précisément, l'Eglise pouvait "apporter une contribution". Il a par ailleurs rejeté l'idée selon laquelle il serait confronté à une opposition croissante et à un isolement au sein de l'Eglise, en particulier après la levée de l'excommunication de quatre évêques intégristes, dont le Britannique Richard Williamson, qui a nié l'existence des chambres à gaz durant la Seconde guerre mondiale. "Le mythe de ma solitude me fait rire", a-t-il dit, assurant pouvoir compter sur un réseau d'amis et de collaborateurs qu'il voit chaque jour. Parti de l'aéroport Leonardo da Vinci de Rome peu après 10h locales (9h GMT), le pape était attendu environ six heures plus tard à l'aéroport international Nsimalen de Yaoundé, où étaient prévus cérémonie de bienvenue et un discours du souverain pontife. Travaux de rénovation, répétitions de choristes au stade Amadou Ahidjo de Yaoundé où sont attendus jeudi plus de 100.000 fidèles pour assister à une messe célébrée par le pape: les préparatifs sont allés bon train au Cameroun pour accueillir le souverain pontife, dont l'unique visite en Afrique remonte à 1987, à Kinshasa, en tant que cardinal. "Le pape Benoît XVI est un leader charismatique, un saint homme qui vient pour approfondir ma foi", déclarait lundi Augustine Meh Zang, un homme d'affaires de Yaoundé âgé de 55 ans. "Il aidera le Cameroun", "en tant que peuple, nous avons trop erré et péché". Le commerçant Peter Mbeke était également enthousiaste, bien que son magasin ait été démoli la semaine dernière par les autorités le long d'une route que doit emprunter le souverain pontife. "Je n'ai aucun problème avec le pape. Je suis en colère contre le délégué du gouvernement qui a ordonné la destruction de mon commerce" sans m'en informer préalablement, expliquait-il. Le délégué du gouvernement Gilbert Tsimi Evouna a défendu la "campagne de nettoyage et de reconstruction" dans la capitale, arguant que les travaux destinés à "donner à Yaoundé son véritable aspect avaient démarré il y a longtemps". Le pape doit rencontrer mercredi à Yaoundé le président Paul Biya, alors que les dirigeants politiques du Cameroun comme ceux de l'Angola, avec lesquels il doit aussi s'entretenir, sont accusés d'utilisation corrompue des revenus issus du pétrole qui enrichissent une petite élite. Sa visite à Yaoundé qui s'achèvera vendredi sera aussi marquée par des rencontres avec des évêques, le "monde de la souffrance" au Centre national de réhabilitation des handicapés (CNRH), et des représentants de la communauté musulmane. Aux yeux de l'archevêque de Yaoundé Viktor Tonye Bakot, la visite du pape est un message envoyé à tout le continent. "Il y a trop de guerres et de misère en Afrique", remarque-t-il. "Le pape vient pour nous expliquer comment nous pouvons vivre ensemble". "Pour nous musulmans, la venue du pape au Cameroun est une bénédiction", a de son côté déclaré un imam, Cheikh Ibrahim Moussa. "Nous cohabitons de façon pacifique avec les fidèles catholiques". AP