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François Hollande hué et insulté

Feb 28, 2016
François Hollande hué et insulté

Un président hué et insulté, le stand du gouvernement démonté et des éleveurs qui crient leur détresse: le salon de l'Agriculture, grand-messe des campagnes françaises, s'est ouvert samedi à Paris dans un climat tendu, pour cause de crise profonde du secteur.
«Il s'en fout complètement de nous», «bon à rien», «connard», «fumier»: une haie d'éleveurs en colère a accueilli avec des bordées d'injures le président François Hollande, arrivé à l'aube sur le site du Salon, dans le sud de la capitale française.

Un peu plus tard, des dizaines de manifestants de la FNSEA, le principal syndicat d'agriculteurs, ont démonté le stand du ministère de l'Agriculture et protesté bruyamment, poussant les forces de l'ordre à intervenir. Deux agriculteurs ont été interpellés puis relâchés.

«Je suis éleveur, je meurs»: le désespoir d'une profession s'affichait en lettres blanches sur fond noir imprimées sur des T-shirts ou des bannières accrochées aux stalles des vaches.

«Les cris de détresse, je les entends», a réagi le chef de l'État, ajoutant: «Si je suis là aujourd'hui, c'est pour montrer qu'il y a une solidarité nationale». «On va tout faire» pour aider l'agriculture, a insisté François Hollande, reparti à la mi-journée sans autre incident.
Ce n'est pas la première fois que le salon donne lieu à des débordements, même si le cru 2016 est particulièrement agité.

Les nuages se sont accumulés sur les fermes françaises tout au long de 2015, en premier lieu pour l'élevage. Les prix des viandes bovine et porcine et du lait se sont effondrés au fil des mois, sous l'effet de la fin des quotas laitiers européens, de l'embargo russe et du recul de la demande chinoise.

«On ne veut pas vivre décemment, on veut vivre tout court. Pour l'instant c'est l'agonie», assène Marion Quartier, éleveuse de vaches laitières dans l'Aube (nord-est), en déplorant que les consommateurs n'aient «plus la réalité du prix des choses».

Après les éleveurs, la surproduction mondiale de blé a ensuite entraîné les céréaliers dans la tourmente, suivis par les producteurs de légumes, plombés par la douceur de l'hiver.
Les épizooties sont venues achever le tableau: fièvre catarrhale ovine et grippe aviaire ont poussé nombre de pays importateurs à fermer leurs portes à la viande bovine française ainsi qu'à la volaille et au foie gras.

En outre, le Salon s'ouvre à deux jours de la fin des négociations commerciales annuelles entre les grandes surfaces et leurs fournisseurs, qui se déroulent dans un climat exécrable.
La distribution, engagée depuis plusieurs années dans une guerre des prix, impose des baisses de plus en plus importantes aux industriels dont elle achète les produits, ce qui pousse les fabricants à répercuter ces baisses sur les agriculteurs.

«Il y a des pressions qu'il faut exercer ici en France sur la grande distribution», a estimé le président Hollande en promettant de revoir la loi qui organise les relations entre distributeurs et fournisseurs.

Selon le gouvernement, plus de 40 000 exploitations sont en situation d'extrême urgence, et les actions de protestation, qui ont rythmé l'été, ont repris de plus belle depuis un mois.
Le gouvernement n'a rien ménagé ces derniers jours pour calmer les esprits à l'approche du Salon de l'agriculture.

Malgré le désespoir ambiant, les professionnels n'ont pas boudé ce salon, foire-exposition de l'excellence des terroirs français.

«Ce serait dommage de boycotter car ces visiteurs sont aussi nos consommateurs. On vient pour discuter», commente Philippe Vasseur, éleveur de cochons dans la Sarthe (centre-ouest).

À 14 mois de l'élection présidentielle et en vue des primaires de l'opposition de droite, le rendez-vous du Salon sera aussi celui des politiques qui vont fouler en rangs serrés les allées parmi les près de 700 000 visiteurs attendus jusqu'au 6 mars.

La France reste la première puissance agricole en Europe, même si la part de l'agriculture et des industries alimentaires dans l'économie française a chuté de près de la moitié depuis 1980 (à 3,5% du PIB aujourd'hui contre 6% en 1980). – AfricaLog avec agence