L'ex-chef rebelle Jean-Pierre Bemba, exclu par la Cour constitutionnelle de la présidentielle du 23 décembre, a dénoncé mardi une «parodie d'élection», estimant que le président Joseph Kabila choisissait les opposants devant concourir contre son candidat.
Lundi, la Cour constitutionnelle a définitivement invalidé la candidature de M. Bemba pour la course à la présidentielle, en raison de sa condamnation pour «subornation de témoins» par la CPI, confirmant une décision de la commission électorale nationale indépendante (CÉNI).
«Au-delà même de ma personne, le fait que l'on choisisse des opposants (...) c'est très inquiétant», a réagi sur France 24 M. Bemba, investi par son parti le Mouvement de libération du Congo (MLC) comme candidat à la présidentielle de décembre, qui doit désigner le successeur de M. Kabila, dont le second mandat aurait dû s'achever en décembre 2016 et qui n'avait pas le droit de se représenter.
Nous allons «assister à une parodie d'élection» en décembre, a-t-il estimé.
«La Cour constitutionnelle est aux ordres du pouvoir en place (...). Tout ça n'est qu'une mise en place qui veut que le candidat du pouvoir puisse ne pas avoir de candidat sérieux devant lui», a affirmé M. Bemba, en référence à l'ex-ministre de l'Intérieur et chef du parti présidentiel PPRD, Emmanuel Ramazani Shadary, désigné comme candidat au scrutin par le président Kabila et sa coalition Front commun pour le Congo (FCC).
Président du MLC, M. Bemba passait pour l'un des favoris à la succession du président Joseph Kabila, au pouvoir depuis 2001.
Il avait déposé sa candidature début août après un retour triomphal à Kinshasa et son acquittement en appel par la CPI de sa condamnation à dix-huit pour des crimes de guerre et contre l'humanité commis par sa milice en Centrafrique.
Il a été condamné dans une affaire annexe pour subornation de témoins par la CPI, qui prononcera sa peine le 17 septembre.
Le dossier de M. Bemba avait été déclaré «irrecevable» par la Céni. L'opposant avait alors saisi la Cour constitutionnelle contre cette décision.
Pour la Cour constitutionnelle congolaise, «la subornation de témoins est une circonstance aggravante dans l'infraction de corruption» en RDC. «C'est en bon droit que la CÉNI a conclu à l'inéligibilité de M. Jean-Pierre Bemba».
Les partisans de M. Bemba affirment au contraire que la subornation de témoins est différente de la corruption et ne fait pas partie des motifs d'invalidation d'une candidature, selon la loi électorale.
Figure de l'ouest du pays face aux «Katangais» du pouvoir, Jean-Pierre Bemba, 55 ans, ancien vice-président de la RDC, n'a pas encore donné un mot d'ordre à ses partisans. Mais son parti a appelé la représentation de la CPI en RDC à mettre fin à la «confusion» autour de l'arrêt le condamnant pour «subornation des témoins».
«Le dernier mot n'appartient pas à la Cour constitutionnelle, mais au peuple congolais» tempête Jean-Jacques Ntula, habitant de Mbandaka chef-lieu de la province de l'Équateur (nord-ouest), l'un des fiefs de l'ex-chef de guerre.
À Kinshasa, une réunion du bureau politique du MLC est convoquée en vue «de tirer les conséquences» de l'exclusion de leur chef de la course à la présidentielle.
L'exclusion de Jean-Pierre Bemba de la course à la présidentielle n'éloigne pas le spectre des violences, malgré le calme enregistré après l'annonce de la cour constitutionnelle.
À Gemena, le fief familial de M. Bemba, des heurts avaient opposé samedi ses partisans avec ceux du ministre des Transports, lui aussi ressortissant de la province du Sud-Ubangi (nord-ouest).
Des militants du MLC s'étaient opposé aux partisans du ministre José Makila, qui battait campagne en faveur de Ramazani Shadary.
Rival malheureux de M. Kabila à l'élection présidentielle de 2006, M. Bemba avait quitté Kinshasa sous escorte des Nations unies en avril 2007 après des combats entre sa milice et l'armée qui avaient fait entre 200 et 300 morts. - AfricaLog avec agence