Il enquêtait sur la mort mystérieuse du chauffeur de François Compaoré, frère du président du Burkina Faso, Blaise Compaoré. Le 13 décembre 1998, le journaliste burkinabé Norbert Zongo était assassiné avec trois autres personnes. L'enquête sur la mort du fondateur de l'hebdomadaire L'Indépendants'est terminée par un non-lieu délivré en 2006, malgré le tollé qu'elle avait provoqué en Afrique et dans le reste du monde la mobilisation incessante depuis.
L'Observateur Paalga revient sur les "dix si longues années" qui ont suivi la mort de Zongo et des "trois autres occupants d'infortune de la 4X4 qui les conduisait", "carbonisés [...] dans des conditions cannibalesques": "On cherche vainement un précédent dans les annales du crime dans notre pays [...] Rarement, de mémoire de journaliste, notre pays aura été plongé dans une crise que tous les superlatifs ne suffisent pas à qualifier.[...] Quelques jours après ce quadruple assassinat de Sapouy, on se souvient encore quune Commission denquête indépendante (CEI) avait été instituée, et qui avait conclu que cette mise à mort brutale et atroce était motivée par les activités professionnelles de Norbert Zongo, et particulièrement par laffaire David Ouédraogo, dont notre confrère avait fait sa manette rédactionnelle." Une commission d'enquête, "première sur le continent", non suivie d'effets Ouédraogo, le chauffeur de François Compaoré, était mort torturé. Le frère du Président a été brièvement inculpé pour ce crime, avant que le tribunal n'abandonne les poursuites. Après la mort de Zongo, des manifestations s'organisent au Burkina et dans des pays voisins. Blaise Compaoré est contraint de créer la CEI, "une première sur le continent", à laquelle participe notamment Robert Ménard, alors secrétaire général de Reporters sans frontières. Le 7 mai 1999, la commission rend ses conclusions au Premier ministre. Le blog "Norbert Zongo 10 ans" en en rappelle les suites, plutôt décevantes: "Mise en place suite au mécontentement populaire, elle a conclu, après avoir auditionné plus de deux cents personnes, que concernant les mobiles de ce quadruple meurtre (...), il faut les chercher du côté des enquêtes menées depuis des années par le journaliste, et notamment sur ses récentes investigations concernant la mort de David Ouédraogo, le chauffeur de François Compaoré, conseiller à la présidence et frère du chef de l’Etat. Le rapport donnait également les noms de six sérieux suspects dans cette affaire, tous membres du Régiment de la sécurité présidentielle. Seul lun dentre eux, Marcel Kafando, a été inculpé en 2001 dincendie volontaire et assassinat. Egalement condamné en 2000 pour avoir séquestré et torturé à mort David Ouédraogo, le sergent Kafando a pourtant passé pendant toutes ces années, des jours tranquilles à son domicile de la capitale, percevant toujours sa solde de militaire." "Au bord de la chute" en 1998, le régime s'est "refait une santé" Dans l'article qu'il consacre à "l'enterrement du dossier Norbert Zongo", l'hebdomadaire San Finna remarque que "si le régime ébranlé, au début, a été au bord de sa chute, il a pu depuis se refaire une santé, en raison certes de ses capacités de résistance propres mais aussi à cause des égoïsmes et du manque danticipation des acteurs politiques et de la société civile": "[C'est] la raison du plus fort. Il nest que de citer les lenteurs excessives de procédure, la cascade des disparitions des suspects sérieux, les décisions de justice autoritaires de non-lieu." La rédaction de l'hebdomadaire salue les initiatives visant à faire pression sur le pouvoir burkinabé pour qu'il rouvre l'enquête, comme la pétition internationale, mais semble plutôt pessimiste: "Cest bien quil y ait des actions multiformes mais ce nest pas assez; tant quil ny aura pas de consensus, de dépassement de soi, on naura pas ce quon veut: la vérité et la justice." "La résolution du dossier implique la chute du régime" Sur le blog Norbert Zongo 10 ans, un internaute, Zedy, regrette qu'on n'en connaisse pas plus sur la vie du journaliste: "Il faut des dates pour montrer combien [son] parcours était labourieux, patient, persévérant et assez instructif pour les jeunes d'aujourd'hui! Nous savons beaucoup plus de l'américain Obama que du burkinabé Norbert Zongo! Ce n'est pas normal!" Pour un autre internaute, Tenkougri, qui commente l'article de L'Observateur Paalga, "ce dossier clair a été embrouillé a dessein car sa résolution implique la chute du régime et le départ de beaucoup de puissants." La France complice de l'enlisement du dossier? Le blog Basta, publié en France par "l'alliance zapatiste de libération sociale", relaie un appel signé par plusieurs organisations africaines et françaises. Pour elles, la France est complice de l'enlisement de l'affaire Zongo: "Forts du soutien que vient de leur renouveler la France à loccasion de leurs récents séjours en France, Blaise Compaoré et son Premier ministre sont repartis rassérénés et encore plus déterminés à poursuivre leur gestion liberticide du pouvoir au Burkina Faso. Cest pourquoi, nos organisations, déterminées à amplifier leurs actions de solidarité avec le peuple burkinabé, appellent leurs militants et lopinion démocratique à manifester dans lunité leur dénonciation du soutien multiforme quapportent Nicolas Sarkozy et le réseau françafricain au régime criminel de Blaise Compaoré [...]" Ces organisations appelaient ce samedi à un rassemblement devant l'ambassade du Burkina Faso à Paris. Une vingtaine de personnes se sont déplacées. Parmi les nombreux hommages rendus depuis dix ans à Norbert Zongo, on peut citer celui de la star ivoirienne du reggae Tiken Jah Fakoly, qui place Zongo parmi les "martyrs" du continent: "Ils ont oublié Norbert Zongo", chante Fakoly en désignant les gouvernants africains. Au Burkina, ses confrères pensent encore à lui. Depuis janvier 1999, à Ouagadougou, une lampe à pétrole brûle sans cesse devant le centre national de presse Norbert-Zongo. "Jusqu'au jour où la lumière judiciaire sera faite" sur cette affaire, rappelle l'Observateur. Tables rondes sur l'affaire Zongo et le Burkina Faso dimanche 14 décembre à 14 heures au CICP, 21 ter, rue Voltaire, Paris XIe. – Rue 89