Une croissance mondiale qui menace de dérailler, des inquiétudes sur la Chine, le pétrole au plus bas, la crise syrienne et ses répercussions ont dominé le premier jour du forum de Davos mercredi.
Les flocons tombaient avec régularité sur le village huppé du canton des Grisons (Suisse) transformé en camp retranché, tandis que les décideurs réunis dans le palais des Congrès égrenaient les risques pesant sur le monde.
«Les prix (des matières premières) sont détruits» (un grand patron anonyme), les nouveaux investissements pétroliers font face à «la baisse la plus forte de l'histoire (Fatih Birol, patron de l'Agence Internationale de l'Énergie), «nous sommes dans un monde où nous ne sommes pas sûrs de la vraie valeur d'un actif» (Raghuram Rajan, gouverneur de la Banque centrale indienne)... les messages avaient souvent la même tonalité, un peu inquiète.
Mardi, le FMI avait prévenu que la croissance mondiale menaçait de «dérailler».
Dans ce palais des congrès aux fenêtres rares se croisent, souvent sans se voir, des présidents comme le Rwandais Paul Kagame et des grands patrons comme Pol Polman d'Unilever, répondant en français aux questions d'un journaliste brésilien, tandis qu'à quelques pas de là , un robot sud-coréen montre comment il arrive à se saisir de planches et de parpaings.
Le thème officiel de ce remue-méninges mondial est la quatrième révolution industrielle qui pourrait transformer le monde, mais «comme souvent à Davos, le sujet se fait pirater par les évènements mondiaux, et ce qui retient l'attention de tout le monde est la Chine, où la croissance ralentit», estime le chef économiste du cabinet britannique ILS, Nariman Behravesh.
Ce contexte tendu influence les marchés financiers qui connaissent une période de grande volatilité, et les cours du pétrole et des matières premières qui sont au plus bas. Mercredi en fin d'après-midi, les Bourses européennes et Wall Street reculaient fortement et le pétrole continuait de baisser largement sous les 30 dollars.
Selon le PDG du groupe publicitaire britannique WPP, «pour un patron, les principaux risques actuels sont la Chine, le pétrole et l'Arabie saoudite, les migrations en Europe et ailleurs, la politique américaine (où il y aura un scrutin présidentiel en novembre), le Brexit».
«Le 'nouveau normal' est un monde à faible croissance», a-t-il également estimé, même si les grandes Banques centrales ne ménagent pas leur peine pour soutenir l'activité.
Concernant le ralentissement chinois, le patron du groupe bancaire UBS estime que ce qui se passe, avec un ajustement de la valeur des actifs, y compris en Bourse, «va au bout du compte dans la bonne direction».
«Quand les marchés s'ajustent, il y a toujours une certaine volatilité», a estimé l'économiste chinois Zhu Min, pour relativiser les fortes baisses récentes des Bourses de Shanghai.
Davos oblige, géopolitique et diplomatie sont aussi haut placées dans l'agenda.
De la crise coréenne («un chaudron bouillonnant» pour un ancien responsable de l'OTAN, James Stavridis) en passant par l'État islamique ou le cyberterrorisme, toute une série de sujets d'inquiétudes vont y passer cette semaine.
En Libye, pays divisé, déchiré par des violences internes, l'État islamique et d'autres groupes jihadistes peuvent avoir «une autoroute qui les conduirait jusqu'au Mali, à Boko Haram», a dit un participant à une session consacrée au monde arabe. «C'est bien plus sérieux qu'une simple affaire libyenne».
«Ce qui se passe au Yémen est une photocopie de ce qui s'est passé en Libye», où l'État s'est effacé au profit de factions, a mis en garde un autre participant, en référence aux violences qui secouent ce pays, sur fond de pression croissante d'Al-Qaïda et de l'organisation de l'État islamique.
James Stavridis a aussi mis en garde contre le risque cybernétique, «la face sombre de la mondialisation».
Le ministre iranien Javad Zarif, dont le pays est en pleine montée en puissance avec la fin des sanctions liées à son programme nucléaire, s'est exprimé sur la crise syrienne, estimant qu'il ne pouvait pas y avoir de solution miliaire, et a adressé une mise en garde à son rival régional l'Arabie saoudite.
«Je pense que nos voisins saoudiens doivent comprendre qu'une confrontation n'est dans l'intérêt de personne», a-t-il prévenu. - AfricaLog avec agence