«Je suis consterné, je ne sais pas ce qui nous arrive! Tous nos grands musiciens tombent les uns après les autres», se désole Delico Nzinga à Kandakanda, le siège du «village Molokaï», à Matonge, en plein coeur de la bouillante capitale de la République démocratique du Congo.
Comme lui, des fans de Papa Wemba affluent individuellement ou par petits groupes sur ce site «historique» d'où est partie la carrière de cette légende de la musique congolaise, décédé dimanche à Abidjan où il participait au Festival des musiques urbaines d'Anoumabo (FEMUA).
Artiste africain emblématique et haut en couleur, roi de la rumba congolaise, Papa Wemba est mort sur scène après s'être effondré en plein concert.
Jossart Nyoka Longo, qui préside aux destinées de Zaïko langa-langa, un groupe musical congolais fondé avec Papa Wemba au début des années 70, salue la mémoire d'un «frère», «le seul de notre génération» d'adeptes de la rumba congolaise à avoir «atteint un niveau international.»
Avec la disparition de Papa Wemba, Jossart se dit inquiet du «danger que court» la rumba congolaise, estimant que «la relève n'est pas vraiment assurée».
Pour le ministre congolais de la Culture Banza Mukalay, cette mort crée un «vide».
Le «village Molokaï», fondé par Papa Wemba, est orné de rameaux. À l'entrée de la résidence familiale du disparu et siège de Molokaï, les visiteurs sont accueillis par la statue de l'artiste en argile peint en noir, perchée sur le mur de la clôture.
«Papa Wemba était 100% star: il savait combiner la musique et l'art. Le pouvoir artistique était incarné en lui», estime Jean Kimbe.
À Matonge, les fans et proches de Papa Wemba redoutent désormais de se voir privés de l'opportunité de rendre un dernier hommage à la star. Aux funérailles de la chanteuse de gospel Marie Misamu, décédée mi-janvier, les forces de l'ordre déployées en nombre avaient tenu les admirateurs éplorés à bonne distance.
«Les obsèques vont être populaires» pour «un chanteur qui est porté par le peuple», tient à rassurer M. Banza.
Au «village Molokaï», l'ambiance est chaude malgré la tristesse qui se lit sur les visages des femmes le long de la rue Kandakanda. Des jeunes exhibent leurs vêtements ou leurs chaussures tandis que d'autres déclinent avec plaisir les surnoms de l'artiste.
Né en 1949 sous le nom de Jules Shungu Wembadio Pene Kikumba, Papa Wemba tenait sa passion du chant de sa mère, une «pleureuse» qu'il accompagnait aux veillées funèbres.
Artistes, étudiants, enseignants, commerçants, vendeurs à la criée et autres badauds écoutent les témoignages de ceux qui ont côtoyé papa Wemba.
Un groupe musical s'improvise et exécute les chansons du roi de la rumba congolaise dans l'enceinte de la résidence du «royaume».
Papa Wemba «vivait comme un vrai roi: il écoutait les gens, il était très généreux», se souvient Didier Ndenga, l'un de ses producteurs. «C'était agréable de travailler avec lui». – AfricaLog avec agence