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Le procès Clearstream fait l'événement à Paris

Sep 22, 2009

Aboutissement d'une rivalité au sommet de l'Etat, le procès Clearstream place le palais de justice de Paris au centre de la vie publique avec son cortège de personnalités, avocats, espions et témoins prestigieux.

Devant le tribunal, lundi avant l'audience, face à une nuée d'équipes de télévision et de photographes, l'ancien Premier ministre et principal suspect Dominique de Villepin entouré de ses trois enfants et de son épouse, a parlé dans le style de ses anciennes déclarations de chef de gouvernement.

"Je suis ici par la volonté d'un homme, par l'acharnement d'un homme, Nicolas Sarkozy", a-t-il dit.

Plus loin, Thierry Herzog, avocat du chef de l'Etat, entrait dans la petite salle du tribunal, sans lui jeter un regard.

Un proche du président, Pierre Charron, conseiller à l'Elysée et partie civile aussi contre Dominique de Villepin, car son nom, comme les patronymes hongrois de Nicolas Sarkozy, figurait sur les fausses listes de comptes de la société Clearstream, était également présent dans la salle.

Dans la salle bondée et surchauffée, où s'entassaient une soixantaine de journalistes du monde entier, des dizaines d'avocats, des badauds qui avaient attendu des heures à la porte, Dominique de Villepin cherchait sa place, s'est assis, relevé et a salué quelques connaissances.

Il a ainsi serré la main de Me Francis Szpiner, avocat que la presse désignait jadis comme son allié au sein du supposé "cabinet noir" de l'Elysée, du temps où les juges menaçaient l'ancien président Jacques Chirac éclaboussé par les affaires.

MARCHANDS D'ARMES

Me Szpiner est cette fois de l'autre côté de la barre et défend l'ex-maire de Toulouse Dominique Baudis, un des noms portés sur les faux listings, partie civile contre les prévenus.

A l'appel des prévenus, l'ancien Premier ministre s'est avancé à la barre. "Votre état civil ?", a demandé le président. "Dominique de Villepin", a répondu ce dernier, les mains dans le dos.

"J'avais lu Dominique Galouzeau ?", lance le président Dominique Pauthe au prévenu, qui acquiesce. "Dominique Galouzeau de Villepin, donc".

Dans la salle, des habitués des procès étaient là, mais cette fois du côté des victimes.

Il y avait notamment l'ex-préfet du Var Jean-Charles Marchiani, condamné pour corruption et sorti de prison en février dernier à la faveur d'une grâce partielle accordée par Nicolas Sarkozy.

Il figurait aussi sur les listes Clearstream et se retrouve donc victime aux côtés du chef de l'Etat.

Arcady Gaydamak, sous mandat d'arrêt international pout trafic d'armes vers l'Angola, et Nadhmi Auchi, milliardaire anglais jadis condamné dans cette même salle au terme du procès des détournements de fonds à Elf, seront aussi parties civiles, ont annoncé leurs avocats.

HOMMES DE L'OMBRE

D'autres, plus illustres, comme le ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux, un de ses prédécesseurs Charles Pasqua et l'ancien ministre de gauche Jean-Pierre Chevènement, étaient représentés par des avocats. L'actuel patron du Fonds monétaire international, Dominique Strauss-Kahn, ne s'était en revanche pas fait représenter.

Les témoins de cette manipulation complexe, des personnes plutôt habituées à l'ombre, sont restées au fond du prétoire, sans s'asseoir.

Jean-Claude Cousseran, ancien patron des services secrets, l'ancien commissaire des Renseignements généraux Brigitte Henri, et d'autres, auquel le président a fixé rendez-vous pour déposer en octobre, se sont éclipsés rapidement.

Signe de l'importance de l'audience, le procureur de Paris, Jean-Claude Marin, chef du parquet qui ne "descend" en principe jamais à l'audience, occupait le siège du ministère public.

Le magistrat a été critiqué pour une interview sur une radio en août à charge contre Dominique de Villepin.

Me Henri Leclerc, plaidant pour Dominique de Villepin, s'est durant l'audience tourné vers lui, moqueur.

"Je le connais depuis longtemps, M. le procureur. Il parle dans l'intérêt général, non ? Il est à la fois hiérarchiquement soumis et libre de plume, de parole, de pensée ?", a-t-il dit. - Reuters