Les cendres de Fidel Castro, mort vendredi soir à l'âge de 90 ans, seront enterrées le 4 décembre à Santiago de Cuba, ville de l'est berceau de la révolution, après une procession de quatre jours à travers l'île.
Une commission d'organisation des funérailles spéciales a annoncé samedi matin que les cendres du «Comandante» reposeraient comme attendu au cimetière de Santa Ifigenia, qui abrite déjà la tombe du héros national de l'indépendance Jose Marti.
Auparavant, une procession traversera Cuba du 30 novembre au 3 décembre, suivant en sens contraire le trajet de la « Caravane de la liberté », à bord de laquelle Fidel Castro avait relié voici 58 ans Santiago à La Havane, où il entra en triomphateur le 8 janvier 1959.
Pendant les journées de lundi et mardi, ses cendres seront exposées au mémorial Jose Marti, sis dans la capitale sur la Place de la Révolution, une vaste esplanade où Fidel Castro a prononcé nombre de ses mémorables discours.
À cette occasion, «la population de la capitale pourra rendre un hommage mérité» au Lider Maximo, qui a dirigé Cuba pendant près d'un demi-siècle, précise le comité.
Mardi à 19 h, La Havane pourra saluer une dernière fois le père de la révolution cubaine au même endroit, avant le départ des cendres pour un périple d'un millier de kilomètres vers la deuxième ville du pays.
Cette procession évitera les grands axes, rallongeant le trajet de 100 km par rapport au tracé de l'autoroute centrale.
Une fois à Santiago - seule cité cubaine ayant reçu le statut de «ville héroïque» pour sa contribution au renversement du dictateur Fulgencio Batista en 1959 - une nouvelle «cérémonie de masse» sera organisée le 3 décembre sur la place Antonio Maceo.
Les funérailles proprement dites, auxquelles devraient assister de nombreux dignitaires et personnalités du monde entier, seront organisées le lendemain à partir de 7 h, a ajouté le Comité.
Pour sa part, le Conseil d'État, organe suprême de l'exécutif cubain, a décrété neuf jours de deuil national, jusqu'au 4 décembre. Pendant cette période, «cesseront les activités et spectacles publics et le drapeau national sera mis en berne».
De même, «la radio et la télévision nationales maintiendront une programmation informative, patriote et historique», a précisé le Conseil d'État, présidé par Raul Castro.
Fidel Castro, le père de la Révolution cubaine, qui a tenu son île d'une main de fer et défié la superpuissance américaine pendant plus d'un demi-siècle avant de céder le pouvoir à son frère Raul, est mort à l'âge de 90 ans.
«Le commandant en chef de la Révolution cubaine est décédé à 22 h 29 ce soir [vendredi]», a annoncé Raul Castro en lisant une déclaration sur l'antenne de la télévision nationale.
Le président cubain n'a pas révélé les causes du décès, mais a précisé que Fidel Castro serait incinéré «dans les premières heures» de la journée de samedi, écartant de fait toute exposition du corps du «Lider Maximo» au public.
«Ça nous a tous pris par surprise, on espérait vraiment qu'il vive un peu plus longtemps. Il avait l'air en forme lors de ses dernières apparitions», a réagi Michel Gonzalez, un vendeur de cigares de 30 ans.
«Comme des milliers de Cubains je suis contrit, triste, c'est tellement soudain !», abondait, interdit, le barman Miguel Gonzalez, 24 ans, rencontré dans le Vedado, un quartier proche du centre.
«Perdre Fidel c'est comme perdre un père, un guide, le phare de cette Révolution», a déclaré Michel Rodriguez, un boulanger de 42 ans qui a appris l'information à la radio.
À Miami, bastion de l'anti-castrisme, ce sont des scènes de liesse qui ont accueilli l'annonce vendredi soir.
«C'était un criminel, un assassin et un homme misérable», vitupérait Hugo Ribas, 78 ans, au milieu d'un millier de personnes rassemblées dans le quartier de la Petite Havane (Little Havana).
Célèbre pour ses coups d'éclat et ses discours interminables, mais aussi pour son uniforme vert olive, ses cigares et sa barbe légendaire, le «Lider Maximo» avait cédé le pouvoir à son frère Raul à partir de 2006 après une hémorragie intestinale. Il avait abandonné ses dernières responsabilités au Parti communiste de Cuba (PCC) en avril 2011.
L'ex-président avait totalement disparu des écrans cubains entre février 2014 et avril 2015, ce qui avait alimenté de nombreuses rumeurs sur son état de santé.
Mais depuis un an et demi, même si ses déplacements restaient limités, il avait recommencé à recevoir chez lui personnalités et dignitaires étrangers.
Avant de quitter la scène, Fidel Castro a pu assister voici deux ans à l'annonce historique du rapprochement entre Cuba et les États-Unis. Sa disparition tourne donc définitivement la page de la guerre froide, qui avait mené le monde au bord du conflit nucléaire lors de la crise des missiles d'octobre 1962.
Le président français François Hollande a estimé que Fidel Castro avait «incarné la révolution cubaine», dans ses «espoirs» et ses «désillusions», alors que les présidents russe Vladimir Poutine et chinois Xi Jinping lui ont rendu hommage.
Désormais, Raul Castro se retrouve pour la première fois seul aux commandes, lui qui avait assuré au moment de sa nomination qu'il consulterait le «Commandant en chef» pour toutes les décisions importantes.
Âgé de 85 ans, Raul a engagé depuis 10 ans un lent processus de «défidélisation» du régime, avec notamment en 2011 l'adoption lors d'un congrès historique du PCC de mesures économiques destinées à sauver Cuba de la faillite.
Pour la dissidente modérée Miriam Leyva, ce décès pourrait permettre la mise à l'écart d'une partie de la vieille garde du régime réfractaire au changement. «Je crois qu'il y a là une opportunité d'ouvrir davantage cette société et avancer plus rapidement dans les réformes», a-t-elle expliqué.
Sous la surveillance de Fidel, Raul Castro a également orchestré dans l'ombre le spectaculaire dégel de fin 2014 avec les États-Unis, révélant un pragmatisme qui contrastait avec l'anti-américanisme viscéral de son aîné.
Toutefois, ce rapprochement pourrait subir un coup de frein après l'élection de Donald Trump aux États-Unis. Le magnat de l'immobilier a déjà affiché des réserves sur le rapprochement, affirmant qu'il ferait «tout pour obtenir un accord solide» avec La Havane après la prise de fonctions le 20 janvier prochain.
Grand détracteur de la superpuissance américaine, Fidel Castro était un symbole de la lutte contre l'«impérialisme» du voisin du nord, tout en affichant un piètre bilan en matière de droits civiques et de libertés.
Communiste converti, Fidel Castro qui avait pris le pouvoir en 1959 a défié 11 présidents américains et survécu à maints complots pour l'assassiner (638 selon le Livre Guinness des records) ainsi qu'à une tentative ratée de débarquement d'exilés cubains soutenus par la CIA dans la baie des Cochons (sud de l'île) en avril 1961.
John F. Kennedy devait décréter peu après un embargo commercial et financier. Toujours en vigueur, celui-ci pèse lourdement sur l'économie du pays malgré une série d'assouplissements consentis par l'administration de Barack Obama dans le cadre du dégel.
En octobre 1962, c'est la crise des missiles, provoquée par l'installation de fusées nucléaires soviétiques à Cuba, qui engendre une surenchère et met la planète sous la menace atomique. Washington décide un blocus naval de l'île, et Moscou finit par retirer ses fusées contre la promesse américaine de ne pas envahir l'île.
Compagnon d'armes du guérilléro argentin Ernesto «Che» Guevara, le leader cubain s'est voulu le champion de l'exportation de la révolution marxiste en Amérique latine, mais aussi en Afrique.
La chute de l'URSS en 1991, principal bailleur de fonds de l'île, porte un coup terrible à l'économie cubaine, mais le «Lider Maximo» trouve une nouvelle manne avec le tourisme et surtout de nouveaux alliés avec la Chine et le Venezuela du président Hugo Chavez, présenté par Fidel Castro comme son « fils spirituel » avant qu'il ne décède d'un cancer en 2013. - AfricaLog avec agence