L'opposant malien Soumaïla Cissé, officiellement battu à la présidentielle, a affirmé jeudi "ne pas reconnaître" la réélection du président sortant Ibrahim Boubacar Keïta, qui de son côté l'a enjoint d'arrêter de se bercer "d'illusions" deux semaines après le scrutin.
"Je rejette catégoriquement et sans équivoque les résultats proclamés par la cour constitutionnelle. Par conséquent, je ne reconnais pas élu le président déclaré par elle", a déclaré sans surprise, lors d'une conférence de presse dans un hôtel de la capitale, M. Cissé, qui ne s'était pas encore exprimé publiquement depuis l'annonce des résultats définitifs lundi.
M. Keïta, 73 ans, a obtenu 67,16% des suffrages au second tour le 12 août, pour 32,84% à Soumaïla Cissé, un ancien ministre des Finances de 68 ans, avait annoncé lundi la plus haute juridiction du pays, en rejetant toutes les recours de l'opposition, les jugeant irrecevables ou infondées par manque de preuves.
"Cette institution s'est discréditée en se constituant prisonnière volontaire d'un régime autocratique", a accusé jeudi Soumaïla Cissé, qui, à la présidentielle de 2013, avait rapidement concédé sa défaite face à Ibrahim Boubacar Keïta.
M. Keïta, qui a reçu les félicitations de nombreux dirigeants étrangers depuis l'annonce de sa réélection, avait dit lundi "tendre la main" à son "jeune frère" de l'opposition car "le Mali doit pouvoir compter sur toutes ses filles et tous ses fils".
"Il serait convenable et souhaitable qu'ici et maintenant, on prenne la main que j'ai tendue à mon jeune frère Soumaila Cissé pour qu'il gère le réel et non des illusions", a-t-il déclaré jeudi depuis Nouakchott, où il a effectué un bref déplacement, le premier depuis l'annonce de sa réélection.
"Je crois tout ce que j'ai fait ces cinq dernières années valait quand même un peu de reconnaissance et je sais gré des Maliens de l'avoir su", a ajouté en Mauritanie le président sortant, dans le français châtié qui le caractérise.
"IBK n'a pas forcé la main aux Maliens, n'a pas bourré les urnes comme on le dit. C'est d'un ridicule tellement achevé que je ne voudrais même pas m'appesantir là -dessus", a-t-il déclaré en réponse aux accusations de fraude massive lancées par l'opposition.
"Il n'a pas passé son temps dans les couloirs des hôtels à Bamako à inviter la presse internationale et nationale à passer son temps lyncher le président IBK", a-t-il poursuivi, parlant de lui à la troisième personne.
C'est justement depuis les salons d'un hôtel de la capitale malienne que Soumaïla Cissé a lancé jeudi un nouvel appel à la "mobilisation" et à la "constitution d'un large front pour la sauvegarde de la démocratie", invitant les Maliens à manifester "pacifiquement et sans violence" samedi à Bamako, dans les autres villes du Mali et au sein de la diaspora.
Un rassemblement samedi dernier dans le centre de Bamako avait réuni un gros millier de partisans de M. Cissé.
Pour son deuxième mandat de cinq ans, qui débutera le 4 septembre, Ibrahim Boubacar Keïta aura la lourde tâche de relancer l'accord de paix conclu en 2015 avec l'ex-rébellion à dominante touareg.
L'accord avait été signé après l'intervention de l'armée française qui, en 2013, avait repris le contrôle du nord du Mali, où les jihadistes avaient instauré la charia pendant un an.
Sa mise en oeuvre accumule les contretemps et n'a pas empêché les violences de se propager du nord vers le centre du pays et vers le Burkina Faso et le Niger voisins. - AfricaLog avec agence