Plus on en apprend sur la vie de Michael Cohen, l'avocat personnel de Donald Trump, plus on a l'impression de se retrouver plongé dans une série télévisée sur les milieux troubles de New York, où experts en combines et juristes peu regardants font des affaires juteuses.
L'homme de 51 ans pourrait aussi figurer dans un film de Martin Scorsese, qui sait si bien dépeindre le machisme des puissants, les serments d'allégeance, la porosité entre la pègre et les élus.
Comme le réalisateur de Taxi Driver, Michael Cohen s'est intéressé aux fameux taxis jaunes, investissant avec sa femme ukrainienne dans des licences qui à une époque valaient une fortune.
Et comme le chauffeur joué par Robert de Niro, répétant devant son miroir «You talkin' to me?», l'avocat a un ton sec et tranchant.
«Qui dit ça ?» a-t-il lancé à une journaliste de CNN, lui coupant abruptement la parole à propos de sondages défavorables à Donald Trump.
Fidèle parmi les fidèles du président, M. Cohen partage avec son mentor une confiance inaltérable dans son destin. À tel point que le juriste aux cheveux poivre et sel est présenté ironiquement comme le sixième enfant du magnat de l’immobilier.
M. Cohen est visé par l'enquête pénale du procureur spécial Robert Mueller, mais il n'est pour l'instant inculpé de rien.
Et, si ses associés ont parfois été en délicatesse avec la justice, lui-même a jusqu'à maintenant bien manoeuvré sa barque.
Est-il d'abord avocat ou homme d'affaires ? Il est assurément attiré par l'argent, le luxe, les condominiums cossus de la Trump Organization où il a investi, convainquant même ses parents et beaux-parents de l'imiter.
Mais, avant les halls dorés de Manhattan, M. Cohen a connu un quartier d'entrepôts moins reluisant dans le Queens.
Selon une enquête de ProPublica, «beaucoup de gens qui ont croisé la route de Cohen quand il travaillait dans le Queens ou à Brooklyn ont été sanctionnés, radiés du barreau, accusés ou condamnés pour des délits».
De fait, le début de carrière de ce natif de Long Island évoque le personnage fictif de Saul Goodman, l'avocat hâbleur, sans envergure et semi-véreux des séries Breaking Bad et Better Call Saul, auquel on le compare.
Aux États-Unis, certains avocats sont surnommés les «chasseurs d'ambulance», du fait de leur rapidité à offrir leurs services aux victimes de tout poil. Michael Cohen en fut un.
Dans une affaire que n'aurait pas reniée l'opportuniste Saul, il a un jour défendu une femme impliquée dans une arnaque à l'assurance fondée sur un accident de la route bidon.
Le juriste avait auparavant suivi les cours de la faculté de droit Thomas Cooley, dans l'État du Michigan, qui a la réputation d'être la pire des États-Unis. Le patron du premier cabinet qui l'a employé a été accusé d’escroquerie.
Comme Saul, Michael Cohen sait emprunter les sentiers du para-légal, user de tactiques d'intimidation, éviter un procès en déboursant de l’argent.
En 2015, M. Cohen avait menacé de transformer en «enfer» la vie d'un reporter du Daily Beast, qui l'avait contacté à propos d'accusations formulées par l'ex-femme de Donald Trump, Ivana.
À l'époque on le surnommait le «pitbull de la tour Trump» et il se disait prêt à prendre une balle à la place du grand patron. Selon le New York Times jeudi, il se rêvait alors en secrétaire général de la Maison Blanche.
L'année suivante, celle de la présidentielle, il a versé $130 000 à l'actrice de films pornographiques Stormy Daniels, en échange de son silence sur une relation sexuelle présumée avec le futur président.
De telles clauses de confidentialité sont devenues une quasi-marque de fabrique pour M. Cohen, qui a ainsi protégé d'autres nababs sur la sellette. Il s'est appuyé sur American Media, un groupe de la presse tabloïde.
Le voilà désormais fragilisé par des révélations montrant qu'il a touché des millions de dollars de sociétés cherchant un accès privilégié à la Maison Blanche.
Des paiements, adressés à une société-écran, qui sont très vraisemblablement actuellement épluchés par les limiers du FBI, qui ont perquisitionné son bureau le mois dernier.
Ils enquêtent sur l'ingérence dans l'élection de 2016 et il y a beaucoup à vérifier sur Michael Cohen: avec une belle-famille issue de l'ex-URSS, il a multiplié les contacts et les voyages dans les anciennes république populaires.
Il aurait reçu $500 000 de la firme d'investissement dirigée par l'oligarque Viktor Vekselberg, un proche de Vladimir Poutine. - AfricaLog avec agence