Le procès des 34 ministres du dernier gouvernement du président burkinabè Blaise Compaoré pour leur implication présumée dans la répression de l'insurrection populaire d'octobre 2014, qui devait s'ouvrir ce jeudi a été une nouvelle fois reporté au 8 mai.
"On veut un débat serein pour aboutir à un procès équitable. Nous allons accéder à la demande de renvoi pour reprendre le lundi 8 mai", a affirmé le président de la Haute cour de justice à Ouagadougou, le député Mathieu Bebrigda Ouedradrogo.
Les avocats commis d'office respectivement pour l'ancien ministre de la Culture Baba Hama, et l'ancien ministre délégué aux Infrastructures Baba Diemé ont sollicité un renvoi pour prendre connaissance du dossier.
Le 27 avril, le président avait déjà renvoyé les débats à la demande du bâtonnier en raison de la rentrée du barreau.
Les 34 ministres du dernier gouvernement Compaoré, dont une vingtaine étaient présents jeudi, sont poursuivis pour "complicité d'homicide volontaire et blessures volontaires" pour avoir participé "au Conseil extraordinaire des ministres du 29 octobre 2014 au cours duquel ils ont décidé de (faire appel à ) l'armée pour réprimer les manifestants". Ceux-ci protestaient contre la modification de la Constitution qui devait permettre à M. Compaoré de briguer un nouveau mandat mais a finalement entrainé sa chute. La répression a fait une trentaine de morts.
Le "beau Blaise", resté 27 ans au pouvoir, est cité à comparaitre non en tant que président mais en tant que ministre de la Défense, portefeuille sur lequel il gardait la haute main. Il n'était pas dans le box des accusés puisqu'il vit en exil à Abidjan depuis sa fuite mais son avocat français Pierre Olivier Sur était présent jeudi au tribunal.
Celui-ci n'a toutefois pas été autorisé à représenter son client en raison de son absence. "Ce qui se passe est trop grave. C'est grave de museler un avocat. Je suis venu en robe, je suis venu en avocat et ils m'ont retiré le droit d'être avocat, de parler au nom d'un client", s'est insurgé Me Sur après l'audience.
"Dans tous les grands textes, il est indiqué qu'une personne qui est jugée et qui n'est pas là , donc jugée in absentia, peut quand même être représentée par son avocat. Ca fait partie des droits de l'homme, des libertés publiques, des règles d'un procès équitable dans toutes les démocraties, de tous les textes internationaux qui ont été ratifiés par le Burkina Faso. C'est donc une infraction grandissime qui a été faite par Haute cour aux règles élémentaires des droits de l'homme", a-t-il estimé.
Auteur d'un putsch raté en 2015 et incarcéré depuis, le général Gilbert Dienderé, qui doit être entendu comme témoin et était présent jeudi dernier, était cette fois-ci absent.
Créée en 1995 sous le régime de Blaise Compaoré, la Haute cour de justice est la seule juridiction habilitée à juger un chef de l'Etat et des ministres pour des faits commis dans l'exercice de leurs fonctions.
Cette juridiction qui se réunit pour la première fois de son histoire a été réactivée en avril 2015 avec le renouvellement de ses neuf membres, trois magistrats nommés par le président de la Cour de cassation et six députés désignés par le Parlement. – AfricaLog avec agence