Pas encore investi président, Donald Trump a creusé un fossé avec ses futurs services de renseignement, qu'il a accusés publiquement et tour à tour d'incompétence et de déloyauté, tandis que ses futurs ministres exprimaient leur «confiance» à leur égard.
Le futur directeur de la CIA Mike Pompeo s'est retrouvé jeudi devant le Congrès dans une position inconfortable. Nommé par un président élu qui a conspué les agences de renseignement, il doit diriger la plus célèbre d'entre elles.
Sur Twitter puis lors de sa première conférence de presse depuis son élection, Donald Trump a accusé les services de renseignement d'être à l'origine de la diffusion dans la presse d'un rapport non vérifié évoquant des liens présumés de longue date avec la Russie et d'autres informations compromettantes, dont une vidéo à caractère sexuel.
Les chefs espions ont présenté à Donald Trump un résumé de ce rapport vendredi, selon plusieurs médias.
L'intéressé a jugé «scandaleux que les agences de renseignements aient permis» la publication «d'une information qui s'est révélée être erronée et fausse».
Il s'en est pris aussi aux médias dont le site Buzzfeed, qualifié de «tas d'ordures», premier à avoir mis en ligne ce rapport.
Ses critiques lui ont valu un appel du directeur du renseignement James Clapper, «consterné» par la fuite de ce document non vérifié. M. Clapper lui a assuré que ses services n'étaient pas à l'origine de ce texte ni de sa diffusion.
M. Trump s'est aussitôt réjoui sur Twitter d'avoir été appelé par le chef espion, en qualifiant une nouvelle fois le document de «mensonger et fictif».
Mais James Clapper, dont le bureau (ODNI) coordonne les 17 agences américaines de renseignements, s'est bien gardé de commenter le document, sur lequel ses services ne portent «aucun jugement quant à la fiabilité des informations» qu'il contient.
Il s'est seulement inquiété de sa mise en ligne, «extrêmement toxique et portant atteinte à la sécurité nationale».
Son auteur, Christopher Steele, un ex-agent secret britannique qui a été basé plusieurs années à Moscou pour le renseignement extérieur MI6, restait introuvable jeudi.
Une source proche des services britanniques a affirmé à Londres «connaître» M. Steele et Chris Burrows, co-directeurs aujourd'hui de la société de renseignement Orbis, assurant qu'ils avaient «bonne réputation et qu'il est impossible qu'ils aient fabriqué ce rapport».
«Mais, je ne peux pas en dire autant concernant leurs sources», a-t-elle ajouté, jugeant que «le rapport n'est pas crédible parce qu'il ne contient pas de réserves».
Un expert du Council on Foreign Relations, Max Boot, connu pour ses positions anti-Trump, a suggéré dans le New York Times au président élu de «blanchir son nom» en nommant une commission spéciale d'enquête sur ces allégations.
Les attaques de Donald Trump «ont affecté le moral» des agents du renseignement, a de son côté déploré le sénateur Mark Warner, vice-président de la commission du Renseignement au Sénat, qui entendait M. Pompeo.
Un ex-directeur adjoint de la CIA, John McLaughlin, a prédit mercredi sur le site Real Clear World quatre années «particulièrement difficiles» pour eux.
Depuis son élection, Donald Trump a désavoué à plusieurs reprises les services qu'il va diriger après son investiture le 20 janvier. Après avoir initialement rejeté leurs conclusions sur les interférences de la Russie dans la présidentielle, il a reconnu mercredi pour la première fois que la Russie était à l'origine des piratages du parti démocrate.
Il avait auparavant accordé du crédit à Julian Assange, le fondateur du site WikiLeaks, fervent détracteur d'Hillary Clinton qui a nié que Moscou lui ait transmis les informations piratées du parti démocrate. Contrairement à ce qu'affirment les services américains.
Le futur président avait aussi marqué sa défiance à l'égard des services en décembre en indiquant qu'il ne souhaitait pas recevoir leurs briefings quotidiennement comme c'est la tradition. «Je les prends quand j'en ai besoin», avait-il déclaré.
Les futurs membres de son administration, entendus par le Congrès jeudi, se sont montrés plus affables à leur égard.
Le prochain chef du Pentagone James Mattis a affirmé qu'il accordait un «très très haut degré de confiance» au renseignement américain, tout comme le futur directeur de la CIA Mike Pompeo à l'égard de ses agents. M. Pompeo a clairement attribué les piratages à «de hauts responsables en Russie».
Mike Pompeo «nous doit maintenant la vérité» y compris à Donald Trump, a conclu Adam Schiff membre de la commission du Renseignement à la Chambre des représentants. – AfricaLog avec agence