Ulcérés par la "prise de pouvoir par la force" d'Andry Rajoelina, des milliers de Malgaches ont maintenu leur pression mardi en manifestant à Antananarivo, réclamant le retour du "père" Marc Ravalomanana, tandis qu'une frange des contestataires prônait une "3e voie".
"Non au coup d'Etat; TGV (surnom de Rajoelina pour son caractère fonceur) dehors; dans la légalité!", ont scandé avec détermination les manifestants qui avaient ressorti les banderoles et chansons de la campagne présidentielle de M. Ravalomanana ayant abouti à sa réélection fin 2006. Lâché par l'armée, M. Ravalomanana a été contraint de démissionner le 17 mars en transférant les pleins pouvoirs à un directoire militaire, qui les a ensuite remis au chef de l'opposition Andry Rajoelina. Ce dernier a prêté serment samedi comme président de transition. Mardi, la foule fervente des manifestants a entonné l'hymne national, la main droite sur le coeur, réclamant en majorité le retour du "dadanay" (le père) Marc Ravalomanana, qui reste introuvable. A l'issue du rassemblement en début d'après-midi, la foule s'est dispersée dans le calme. Environ 200 jeunes manifestants se sont cependant invectivés et brièvement affrontés autour de la place du 13-Mai (centre) avec des partisans de M. Rajoelina. Un nouveau rassemblement est prévu mercredi. "Notre objectif est le retour à l'ordre constitutionnel et juridique et qu'on organise le plus vite possible des assises nationales et des élections; on n'est pas seulement obnubilé par le retour du président Ravalomanana", explique à l'AFP Andrianatoandro Raharinaivo, porte-parole du parti TIM de M. Ravalomanana, et l'un des leaders de ce mouvement de contestation. Alain Andriamiseza, à la tête de l'"Alliance démocratique" et qui se présente également comme leader du mouvement, prône de son côté une "3e voie". "Le retour de Ravalomanana n'est pas à notre agenda car ce n'est pas dans l'intérêt du peuple, et nous souhaitons le départ de Rajoelina", affirme-t-il, en disant souhaiter des négociations pour mettre en place "un système démocratique accepté par tous les Malgaches". "Nous ne sommes pas d'accord avec la prise de pouvoir par la force de Rajoelina, mais je ne pense pas que le retour de Ravalomanana soit la bonne solution car il a commis des erreurs, on espère qu'il y aura un nouvel homme politique qui pourra émerger", renchérit Hary Rakotondrafy, étudiante. Les manifestants étaient principalement issus de la classe moyenne, parmi eux des parlementaires, des enseignants, des fonctionnaires, des syndicalistes. "Rajoelina, votre destitution n'est pas loin", a ainsi lancé à la tribune un syndicaliste. "Il y a actuellement une très grande division entre les fonctionnaires et les militaires" à propos de la situation politique, assure Haja, un jeune médecin. Les préocupations économiques, dans un pays paralysé par la crise et l'un des plus pauvres du monde, sont aussi une des motivations des manifestants. "On ne sait pas si on sera payé à la fin du mois, on craint une année blanche si Rajoelina persiste", s'inquiète un surveillant général d'un lycée d'Antananarivo. Interrogés pour savoir comment l'ex-président Ravalomanana pourrait techniquement revenir au pouvoir, ses partisans restent souvent dans le vague. Clotilde, professeur d'anglais dans un lycée de la capitale, en robe en lin bleue et sandales blanches, souhaite "un référendum pour déterminer si Ravalomanana doit continuer jusqu'à la fin de son mandat (fin 2011) ou pas". "L'essentiel, c'est qu'il (Ravalomanana) soit encore en vie", conclut le jeune médecin. – AFP