Le chef de la junte au pouvoir en Guinée, le capitaine Moussa Dadis Camara, a refusé lundi de lever l'interdiction de toute activité politique et syndicale imposée par les militaires après leur prise du pouvoir le 23 décembre, rappelant que le pays est "sous un régime d'exception".
Le capitaine Camara, président autoproclamé de la Guinée, s'est très longuement exprimé lors d'une grande réunion avec les représentants de tous les partis politiques, des syndicats et de la société civile, mardi après-midi, au palais du peuple (siège de l'Assemblée nationale). La réunion, qui devait initialement se tenir à la Primature dans la matinée, a en fait eu lieu successivement dans l'hémicycle puis dans la salle des congrès, en raison de l'affluence. Etaient présents le Premier ministre nommé par la junte, Kabiné Komara, les membres de son gouvernement, ainsi que des chefs religieux. La syndicaliste Rabiatou Serah Diallo, figure de la résistance au régime du défunt Lansana Conté (1984-2008), a demandé avec insistance "la levée immédiate de la suspension d'activité qui frappe les partis et syndicats". Mais le capitaine Camara a répondu : "Ce cadre-là n'est pas le lieu propice pour lever la suspension des activités des partis politiques et des syndicats parce que nous sommes sous un régime d'exception. Restez calmes et sereins en vue de faire des propositions concrètes pour éviter l'anarchie." Le chef de la junte a également affirmé : "si nous avons suspendu ces activités, c'est pour éviter l'anarchie et le désordre. Vous allez prendre la responsabilité d'éduquer vos militants parce que si demain il y a un problème, c'est vous qui allez assumer". Mme Diallo a de nouveau demandé, au nom des "forces vives" de la Nation, la relance de la Commission d'enquête créée pour enquêter sur l'assassinat d'au moins 137 manifestants non armés par des forces de sécurité pendant la grève de janvier-février 2007. "Tous les militaires et policiers reconnus coupables de tueries seront jugés", a répondu le capitaine Camara. Enfin, lorsque la syndicaliste a exigé que la durée de la transition "n'excède pas 12 mois", le numéro un du nouveau régime a déclaré : "C'est la volonté du peuple qui peut mettre fin à la transition. Travaillez avec la Commission électorale nationale indépendante (Céni), accélérez le recensement (des électeurs, ndlr) et donnez-nous une date lorsque tout sera prêt". La junte avait demandé samedi à l'administration d'organiser des élections "pendant le dernier trimestre 2009". Le décès du général Conté, dont le "règne" très contesté a duré 24 ans (1984-2008), avait été annoncé le 22 décembre. Le lendemain, le capitaine Camara avait annoncé la prise du pouvoir par des éléments de l'armée. – AFP