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Un pays, deux présidents: après la Côte d’Ivoire, le Gabon

Jan 26, 2011

L'opposant et député André Mba Obame, qui s'est autoproclamé président du Gabon mardi, persiste et signe: depuis son refuge dans l'enceinte d'une agence de l'ONU, il a fait appel au secrétaire général de l'ONU pour le reconnaître, malgré la dissolution de son parti par le gouvernement.

"Je suis le président élu du Gabon", a déclaré Mba Obame de derrière les grilles du bâtiment du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) à Libreville où il se trouve depuis qu'il a déposé mardi soir une lettre demandant au secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon de reconnaître cette "nouvelle donne" dans le pays.

Mba Obame, député et ex-ministre, qui a fait sa "prestation de serment" mardi à Libreville au siège de l'Union nationale (UN), a toujours revendiqué la victoire à l'élection présidentielle à un tour d'août 2009 remportée par Ali Bongo, au pouvoir depuis 15 mois.

Bongo "va partir. Il va partir comme Ben Ali", le président tunisien déchu par une révolte populaire, qui a fui son pays mi-janvier. "La révolution gabonaise est en marche", a soutenu Mba Obame retranché dans le bâtiment avec ses proches collaborateurs.

A l'extérieur, deux camions de gendarmerie surveillent les abords.

Mercredi dans les rues de Libreville, ses déclarations prêtaient plus à sourire. "Il fait encore un sketch", "de la provocation", "c'est juste pour qu'on parle de lui", entendait-on.

C'est "de la gaminerie politique", a fustigé Paul Mba Abessolo, ancien vice-Premier ministre qui s'était porté candidat à la présidentielle avant de se désister et se rallier à Mba Obame.

Pas si sûr, estime Jonathan Ndoutoume Ngome, géopoliticien et chercheur à l'Université Omar Bongo de Libreville: "il ne faut pas avoir une lecture simpliste de ce qui vient de se passer en pensant que ce n'est qu'un simulacre politique de la part d'André Mba Obame. Cela peut être révélateur d'une certaine crise profonde" mais latente.

"On n'a peut-être pas totalement réglé le problème du contentieux électoral né du scrutin du 30 août 2009", a affirmé Ndoutoume Ngome.

Cette élection a été organisée deux mois après le décès du président Omar Bongo dont Mba Obame se proclame le fils spirituel face à son fils biologique et successeur, Ali Bongo.

Après un long contentieux, ce dernier a été proclamé définitivement élu en octobre 2009 avec 41,79% des voix devant l'opposant Pierre Mamboundou (2e avec 25,66%) et André Mba Obame (3e avec 25,33%).

"Le mode de scrutin, dès le départ, posait problème. Ce qui fait que nous avons un président élu à un peu plus de 40% des voix, les près de 60% se regroupant du côté de l'opposition", a noté Jonathan Ndoutoume Ngome, selon qui Libreville est "tombé dans un piège tendu par Mba Obame" en réagissant avec rapidité et fermeté à son autoproclamation comme président bis.

Quelques heures après cette auto-investiture expresse le ministre de l'Intérieur, Jean-François Ndongou s'était exprimé au nom du gouvernement: Mba Obame, son "équipe gouvernementale insurrectionnelle" et leurs soutiens ont "violé gravement la Constitution" et commis "un crime de haute trahison puni par la loi", a-t-il accusé.

"De ce fait, ils encourent les sanctions et peines prévues par la loi", incluant des poursuites judiciaires, une levée de l'immunité parlementaire de Mba Obame, la dissolution de l'UN et la radiation de la Fonction publique de ses acolytes, a indiqué le ministre, sans exclure d'autres mesures.

La décision "est avec effet immédiat pour la dissolution de l'UN et la radiation de la fonction publique des membres connus" de l'équipe de Mba Obame, a précisé mercredi un responsable du ministère de l'Intérieur.

"Pour la demande de levée de l'immunité parlementaire, il faut attendre que l'Assemblée nationale se réunisse. Cela pourrait se faire vendredi", a-t-il dit, sans plus de détails. - AFP