Le comédien burkinabè Sotigui Kouyaté, acteur au cinéma et au théâtre dans de nombreuses pièces de Peter Brook, est décédé samedi après-midi à Paris d'une maladie pulmonaire à l'âge de 74 ans, a annoncé son agent.
L'acteur est décédé à 18H30 locales (16H30 GMT) au Centre hospitalier Georges Pompidou, a indiqué à l'AFP le ministre de la Culture du Burkina Faso Filippe Sawadogo, déplorant "une grande perte pour le cinéma et le théâtre dans le monde, en Afrique et au Burkina Faso".
Récompensé par l'Ours d'argent 2009 du meilleur acteur dans "London river" du Franco-Algérien Rachid Bouchareb, Sotigui Kouyaté, installé en France et en Suisse, était l'un des grands acteurs africains contemporains et grands promoteurs du cinéma malien et burkinabè.
Né en 1936 à Bamako, Sotigui Kouyaté avait d'abord été joueur de football professionnel et sélectionné deux fois en équipe nationale. Il s'est orienté ensuite vers l'enseignement puis la comédie et, en 1966, il a monté sur place sa propre compagnie de théâtre populaire.
Après plusieurs films burkinabès, notamment de Mustapha Diop, Sotigui Kouyaté a été à l'affiche en 1986 de "Black Mic Mac", comédie du Français Thomas Gilou.
L'année précédente, Peter Brook, dont il deviendra le comédien fétiche, lui confie un premier rôle au théâtre dans "Mahabharata", puis "La Tempête", "L'Homme qui prenait sa femme pour un chapeau", "Qui est là", "Antigone", 'Hamlet", "Le Costume" et "Tierno Bokar"...
Avec sa longue et noble silhouette et son visage de sage, Sotigui Kouyaté a également marqué au cinéma dans "IP5" de Jean-Jacques Beineix avec Yves Montand, "Tombés du ciel" de Philippe Lioret, "Le Maître des éléphants", de Patrick Grandperret, "La Genèse" d'Oumar Sissoko, "Little Senegal" de Rachid Bouchareb.
"Je suis guinéen d'origine, malien de naissance et burkinabè d'adoption. Je ne suis passé par aucune école de théâtre, si ce n'est la grande école de la rue, de la vie", confiait l'acteur.
"Sotigui est l'un des plus grands sages de la culture qui ont apporté la renaissance aux arts vivants en Afrique", a estimé le ministre burkinabè, ancien délégué général du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco).
"C'est l'un des hommes qui ont magnifié la culture et le cinéma africains", a-t-il salué, présentant ses condoléances "au nom du président du (Burkina) Faso (Blaise Compaoré), du gouvernement et du peuple burkinabè à la famille de l'illustre disparu et au monde du théâtre et du cinéma".
Le cinéaste burkinabè Gaston Kaboré (primé au Fespaco 1997 pour son film "Buud Yam") a rendu hommage à "un homme extraordinaire, un géant de la comédie". "Il part en emportant beaucoup d'énergie. (...) Il y a un grand séisme dans le monde du cinéma et du théâtre de l'Afrique et du monde avec la perte de cet homme qui a joué dans les plus grands théâtres du monde. Je dirais tout simplement: immense talent, immense culture, une grande figure".
Un autre cinéaste du Burkina, Idrissa Ouédraogo (grand prix du jury à Cannes en 1990 pour son film "Tilaï"), a évoqué "un père" et "un grand homme". "De toute façon il survivra, parce qu'il est dans beaucoup de films, c'est un exemple et les exemples restent toujours. Un homme qui quitte le Burkina, qui va en France, qui réussit et qui est admiré du monde entier, c'est un exemple de courage, de combativité et tout ça c'est du Sotigui". - AFP