Des dirigeants de l'opposition en Guinée ont pressé samedi la communauté internationale d'agir, notamment par l'envoi d'une force d'interposition et d'une commission internationale d'enquête, cinq jours après le massacre de manifestants par les forces de sécurité.
Mais le chef de la junte, le capitaine Moussa Dadis Camara, s'est demandé: "Pourquoi une force d'interposition? C'est quand il y a des belligérants, alors que la population vaque calmement à ses affaires". "Si une force d'interposition est envoyée, c'est tout le peuple de Guinée qui va se révolter" a-t-il assuré devant la presse. La junte affirme que 56 civils ont été tués lors lundi dernier lors de la manifestation au stade du 28-septembre à Conakry. Une organisation de défense des droits de l'Homme a avancé 157 morts et 1.200 blessés et l'Onu "plus de 150" morts. Le Forum des forces vives de Guinée -regroupant partis d'opposition, syndicats et représentants de la société civile- avait demandé vendredi l'envoi d'une "force de paix" internationale pour protéger la population "contre ses forces armées déchaînées". Un responsable politique, Mouctar Diallo, insistait samedi pour que "la communauté internationale soit plus prompte à l'action. Elle doit intervenir pour prévenir un autre carnage". "Si cela continue, les populations vont chercher des moyens qui leur sont propres pour se protéger et cela peut déboucher sur une guerre civile", a assuré le président des Nouvelles forces démocratiques (NFD). Vendredi, le président burkinabè Blaise Compaoré a été désigné "facilitateur" dans la crise en Guinée, pour la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao). "La désignation d'un médiateur, c'est une chose essentielle" a réagi samedi un chef de l'opposition guinéenne, Sidya Touré. "Il y a une rupture totale de confiance entre l'armée et la population. La question fondamentale qui traumatise les Guinéens, c'est pourquoi y a-t-il eu un tel déferlement de violence, lundi, dans un stade fermé pour un simple meeting?" a ajouté M. Touré interrogé par l'AFP. Ce dirigeant de l'Union des forces républicaines (UFR), lui-même "tabassé" lundi par des militaires, a affirmé avoir vu "des gens tomber quand les militaires tiraient, et des soldats violer des femmes, introduire des objets contondants et des fusils dans leur sexe". Egalement blessé au stade, l'ancien ministre des Affaires étrangères (2002-2004) François Lonsény Fall, a jugé prioritaire l'envoi d'une "commission d'enquête internationale" dans son pays "pour établir les faits". Il a souhaité que M. Compaoré, désigné médiateur spécial à la satisfaction des parties en Guinée, obtienne avant tout que la junte "ne participe pas" à la présidentielle de janvier. Le conseiller spécial du capitaine Dadis Camara, Idrissa Chérif, a émis l'espoir que le médiateur permette "de renouer le dialogue". Ces derniers jours, le chef de la junte a maintes fois accusé l'opposition de mener une campagne "d'intoxication de l'Occident". Les chefs de l'opposition "voient un jeune qui vient, par le destin, au pouvoir, avec une jeunesse qui l'acclame. Ca ne leur plaît pas", a affirmé samedi Dadis Camara, 44 ans, auteur du coup d'Etat en décembre à la mort du président Lansana Conté, au pouvoir depuis 1984. - AFP