La vie politique ne semble plus loin de se redessiner au vu de ce qui s’y passe et dans la perspective des prochaines échéances électorales.
Tout d’abord, le camp présidentiel. Celui-ci est à la mobilisation de ses troupes. On assiste de-ci, de-là , à des manifestations de soutien et à la présentation des acquis du régime.
Ensuite, les ténors de l’opposition. Les trois partis politiques d’envergure traversent eux, des tempêtes de crise. A commencer par le plus grand d’entre eux, l’Union des Forces Démocratiques de Guinée (UFDG) qui, finalement, connait sa véritable crise d’adolescence caractérisée par le dispute entre son fondateur, Bah Oury et celui dont il a accepté la venue et à qui il a accepté de céder la présidence du parti, Cellou Dalein Diallo.
Le bouchon a été si fortement poussé que ceux qui gèrent le parti aujourd’hui, des proches de Cellou Dalein Diallo, ont suspendu son fondateur et Vice-président, Bah Oury au motif qu’il a «violé le règlement intérieur du parti en créant des structures parallèles sans se référer au bureau exécutif».
Bah Oury de donner la raison de sa suspension: «Oui, la raison de ma suspension est due à des dérives que j’ai toujours dénoncées qui consistent à se taire lorsque les Guinéens sont arrêtés, tués... et je n’ai pas accepté que l’on demande à des populations de descendre dans les rues pour empêcher qu’un opérateur technique Waymark fasse le recensement électoral…».
Les partisans de Bah Oury, quant à eux, estiment que «Cellou n’est qu’un venu dans l’UFDG et qui y a été imposé grâce à feu le doyen Bâ Mamadou. Alors que Bah Oury, en est le fondateur. Il mérite à cet effet, de l’égard et a droit de placer son mot en ce qui concerne la vie de l’UFDG».
On se souvient que Bah Oury avait exprimé son mécontentement lors de l’établissement de la liste de l’UFDG pour les élections législatives par Cellou Dalein Diallo. Bien qu’y figurant, Bah Oury a dénoncé la tentative de caporalisation qu’a adoptée Cellou en inscrivant et en bonne position des "étrangers" au parti que sont Aboubacar Sylla de l’UFC et Mouctar Diallo des NFD. Sans compter les bisbilles qui étaient en cours par rapport à la bienséance vis-à -vis d’un autre des Vice-présidents, Dr Fodé Oussou Fofana. On garde encore en mémoire, ce qui a, entre autres raisons, abouti à l’éviction de Dr Saliou Bella Diallo.
Ainsi, pour raison politique, Bah Oury est aujourd’hui, en exil. Il est mis en cause dans la tentative d’assassinat du Chef de l’Etat, Alpha Condé, le 19 juillet 2011. Malheureusement, comme dans ce pays, "les murs ont des oreilles", Cellou est accusé d’avoir abandonné son "bienfaiteur" au point de confier à un diplomate d’une chancellerie occidentale que «Bah Oury est bel et bien impliqué dans la tentative d’assassinat du Président Alpha Condé». Information ou rumeur? En tout cas, l’infortuné depuis son exil, l’apprendra. De son côté, il va se mettre à adopter des attitudes qui tranchent avec les vues de Cellou. On ne dirait pas aux antipodes des statuts du parti, car pour Cellou, le parti doit rester soudé derrière lui jusqu’à la présidentielle de 2015 qu’il souhaite remporter.
Derrière Bah Oury, ses inconditionnels aussi prennent position suite à la sanction du Bureau politique qui est tombé en début d’avril 2014. S’il est sanctionné pour six (6) mois, Bah Oury, ni plus ni moins, demande le départ de Cellou Dalein. Car, pour lui Cellou est à «l’image d’un chef d’entreprise qui ne cesse de faire des faillites».
Lorsque le député UFDG, Ousmane Gaoual Diallo a lâché cette phrase: «Bah Oury ne peut pas dire qu’il est de l’UFDG et faire tout contre l’UFDG», il n’en fallait plus pour que Mohamed Lamine Kéita de l’UFDG France et pro-Bah Oury porte cette accusation: «La suspension de monsieur Bah Oury est un acte solitaire enclenché par Ousmane Gaoual qui, je rappelle, n'appartient à aucune structure du parti et de Fodé Oussou Fofana». Il estime que «C'est en quelque sorte une mise en marche de la machine d'exclusion de toute personne qui aurait une autre idée que les leurs dans le parti, alors que c'est la contradiction et le débat d'idées qui garantit la démocratie».
M. Kéita de conseiller: «Ils [Ousmane Gaoual et Fodé Oussou ; NDLR] doivent modérer leurs discours et s'occuper de leur rôle de député. On attend leurs projets [propositions; NDLR] de lois. Cette soi-disant suspension doit être immédiatement retirée par le Président Cellou Dalein Diallo au risque d'insulter la démocratie».
C’est dans cet état de fait que des médiations ont été entreprises notamment par le sénégalais Djibo Léïty Ka et la coordination haali poular. Les différentes démarches aboutiront-elles? Attendons de voir. Surtout que deux échéances sont annoncées dans le pays. Les communales et communautaires et l’élection présidentielle de 2015.
Il faut retenir qu’à une exception près, Bah Oury est le seul fondateur d’une formation politique à ne pas en être le Président ! L’autre parti étant l’Union des Forces Républicaines (UFR) que préside Sidya Touré qui doit sa propulsion à la tête de cette formation grâce aux relations qu’il a tissées avec son fondateur Bakary Goyo Zoumanigui et dont les fondements sont à rechercher pendant que Sidya occupait la primature.
Justement, pendant ce temps, l’UFR aussi connait sa traversée de tempête avec l’éviction de l’un de ses barons dans la commune de Kaloum, Abdourahmane Téli Touré, Commissaire à la CENI. AfricaLog a déjà parlé de cette situation
( UFR: Un nouveau clash au sommet du parti ) sauf que la dernière actualité est le fait pour M. Touré d’avoir jeté les effets de son ancienne formation politique dehors: bancs, chaises, posters géants du Président de l’UFR, des archives tout en lançant cette phrase: «plus de réunions UFR ici, plus d’affaires UFR ici, partez!».
L’autre actualité politique, c’est la démission du PEDN de Lansana Kouyaté de l’époux du député non inscrit Dr Zalikhatou Diallo. En effet, après avoir décidé unilatéralement de siéger à l’assemblée nationale «contre l’avis du parti», Dr Zalikhatou a été exclue du Parti de l’Espoir pour le Développement National (PEDN) dont elle était la Secrétaire nationale. Donc, N°2 du parti.
Son mari, Mamady Traoré, jusque-là Secrétaire aux Relations extérieures du PEDN a choisi son cœur. Il a présenté la semaine dernière sa démission. Ancien ministre dans le gouvernement de large consensus 2007 dirigé par Lansana Kouyaté, est l'un des fondateurs du PEDN. Il n’a pas apprécié l’exclusion de sa femme «de la façon la plus incongrue du parti à l’issue d’un soi-disant congrès national» ce, en dépit des «loyaux services qu’elle a rendus au parti, de même que les énormes sacrifices qu’elle a consentis durant les cinq années écoulées».
Il sera suivi de Bangaly Camara, le Secrétaire politique du Bureau exécutif national du PEDN qui regrette que «le parti miné de plus en plus par la démagogie, le mensonge, le copinage, la discrimination et les dérives anti-démocratiques, s’éloigne inexorablement des valeurs et objectifs qui ont inspiré ses pères fondateurs dont je suis membre».
En réaction, le Secrétaire National chargé de la communication du parti, Aboubacar Sakho, par ailleurs, Porte-parole de Lansana Kouyaté, estime que «Les lettres de démission de Mamady Traoré et de Bangaly Camara ne contiennent aucun argument crédible sinon qu'ils usent de leurs droits constitutionnels consacrés par la loi fondamentale qui consistent à démissionner librement d'un Parti auquel ils ont adhérés volontairement».
Aboubacar Sakho poursuit en affirmant que «Pour les militants et sympathisants du Parti de l'Espoir pour le Développement National (PE.D.N) le départ de ce trio (Zalikatou Diallo, Mamady Traoré et Bangaly Camara) est un non-évènement qui ressemble à ces trois moineaux venus se confier au fromager pour échapper à la tornade, le quittent au petit matin sans lui dire merci».
Le Secrétaire à la Communication du PEDN de conclure avec des propos très durs: «Après le départ des démagogues, des menteurs invétérés, des navétanes politiques, des partisans du copinage, de la discrimination et des dérives anti-démocratiques, la direction nationale du Parti de l'Espoir Pour le Développement National (P.E.D.N) appelle les militants et les sympathisants à rester vigilants et à resserrer les rangs derrière SEM Lansana Kouyaté jusqu'à la victoire finale».
Enfin, en dernier lieu, c’est la copie d’une lettre adressée au Président du parti Guinée Pour Tous qui est parvenue à la rédaction d’AfricaLog et qui se termine par cette phrase: «M’inscrivant dans une dynamique qui va dans le sens de l’histoire, je décide avec un réel pincement au cœur, de mettre fin à ma participation aux activités de GPT». Ainsi qu’on le voit, c’est l’expression de la démission de Sékou Chérif Fadiga, membre de la direction nationale du parti que dirige Dr Ibrahima Kassory Fofana. Dans cette lettre, M. Fadiga qui est un transfuge de l’UFR de Sidya Touré, annonce ainsi qu’il claque la porte de GPT après seulement, un an. Il regrette qu’ «il n’y a eu à ma connaissance, au sein de GPT, aucun débat sur la stratégie, sur les alliances, sur le choix des hommes et des femmes, et sur le positionnement du parti. Tout se passe sans concertation pour ne pas dire en silence. Personne ne sait de façon objective si GPT inscrit désormais son action dans le soutien à la politique du gouvernement ou dans celui d’une opposition affirmée et déterminée. Puisque le débat politique a besoin de clarté, je ne puis m’accommoder de la seule réponse du "Ni l’un, ni l’autre"».
Tout porte à croire que l’on devrait assister à une nouvelle configuration du paysage politique dans le pays. Si l’espoir semble permis dans le cas de l’UFDG avec les médiations en cours, c’est la rupture totale au sein de l’UFR et du PEDN et le clash en douceur au sein de GPT. Ceci, au regard des attitudes affichées par les différents protagonistes aux vues et aux positions inconciliables. On fait, dans chaque cas de figure de séparation, le même constat: «notre pays ne cesse de souffrir des tergiversations et des ambigüités de son élite intellectuelle, des égoïsmes de ses forces morales et spirituelles qui ont pris pour habitude de toujours se ranger du plus côté du plus fort du moment, c'est-à -dire le détenteur du pouvoir même quand tout va mal».
Le pouvoir pourra-t-il tirer profit de ces guéguerres au niveau de ces formations politiques? Attendons de voir.
AfricaLog.com