L'Élysée et ses collègues du gouvernement lui reprochent de manquer d'esprit collectif.
Rama Yade quittera-t-elle le gouvernement ? La question n’est plus taboue. Même si remercier la secrétaire d’État aux Sports, très haute aujourd’hui dans les sondages, rend l’opération compliquée. «Il n’y a pas le feu», confie un proche collaborateur de Nicolas Sarkozy , conscient que victimiser Yade la renforcerait encore dans l’opinion. D’autres semblent au contraire pencher en faveur d’un départ plus rapide. «Je constate sa difficulté à s’insérer dans une équipe quelle qu’elle soit», argumente-t-on à l’Élysée, en faisant référence aux difficultés qu’a eues Yade avec le ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, et à l’incompatibilité d’humeur avec sa ministre de tutelle actuelle, Roselyne Bachelot. Or, ajoute-t-on, «le gouvernement de la France est une affaire sérieuse. Ce n’est pas une histoire de caprices». L’Élysée est las. Et le président bat froid son ancienne protégée. «Il n’a pas eu Rama Yade au téléphone», souligne un de ses proches conseillers à propos de la secrétaire d’État qui confiait mardi dans Le Monde n’avoir «jamais autant vu» Nicolas Sarkozy «que ces derniers jours». Mercredi, en Conseil des ministres, le chef de l’État a rappelé la nécessité d’«être solidaire». Un avertissement qui visait Yade, pourtant absente. Après avoir fait entendre sa voix - discordante - sur Jean Sarkozy et l’Epad, après avoir refusé - momentanément peut-être - de livrer bataille dans le Val-d’Oise pour les régionales, ses positions sur la suppression des avantages fiscaux aux sportifs ont été la goutte d’eau. «Pour Rama, c’est la compétitivité du sport qui est en jeu. En outre, le gouvernement avait choisi de s’en remettre à la sagesse des parlementaires», plaide son entourage, qui assure : «Elle veut jouer collectif.» Beaucoup, au gouvernement, jugent au contraire que Yade est trop personnelle. Depuis quelques jours, même les ministres plus discrets et peu connus pour être des adeptes des petites phrases se lâchent à leur tour. Sont-ils lassés de voir leur collègue, encartée à l’UMP en 2005, nommée au gouvernement en 2007, manquer à la solidarité gouvernementale ou sont-ils tout simplement agacés par l’insolente popularité de Yade ? Les deux à la fois, probablement. Elle «va toujours dans le sens de l’opinion publique et de sa clientèle» et «n’est pas courageuse», se plaint le ministre du Budget Éric Woerth. Christine Lagarde, d’ordinaire si discrète, se permet une remarque : «Il faut apprendre les règles du jeu», dit la ministre de l’Économie. Loin des micros, les critiques sont encore plus virulentes. «Si elle-même était ministre, elle n’accepterait pas que son secrétaire d’État s’affranchisse de sa tutelle comme elle le fait avec Bachelot. Autrement dit, Rama ne supporterait pas Rama.» Un autre ministre : «Ce qui ressort de tout cela, c’est une impression d’amateurisme.» Il n’y a guère que Xavier Bertrand pour dire qu’il n’y a pas de «problème Yade» : «Elle travaille, elle est au travail, Rama !», assure le secrétaire général de l’UMP. Quant à Valérie Pécresse, tête de liste en Ile-de-France pour les régionales, elle défend, vaille que vaille, sa porte-parole de campagne. «C’est à se demander si Valérie Pécresse n’est pas devenue la porte-parole de Rama Yade», s’amuse un conseiller. Officiellement, toute cette agitation ne perturbe pas la principale intéressée. «C’est un bloc de sérénité», assure l’entourage de Yade. – Le Figaro