Le peuple Togolais va élire aujourd’hui même son 5e président de la République. Des 7 candidats sur la ligne de départ et après deux semaines de campagne, deux principaux challengers se détachent du lot : Faure Gnassingbé et Jean-Pierre Fabre. Ce sera le choix entre la continuité dans la rupture et le changement radical.
Les 3 281 146 électeurs qui constituent le corps électoral togolais se rendent donc aux urnes ce jour 4 mars 2010 dans les 5930 bureaux de vote, disséminés sur l’ensemble du territoire. 300 observateurs de la CEDEAO sont également sur le terrain pou vérifier le bon déroulement du scrutin. Cette mission d’observation comporte 2 volets : un premier, sécuritaire, composé de 146 officiers supérieurs, et le second, civil, constitué du reste de cette mission.
En outre, 600 policiers et gendarmes togolais de la Force de sécurité de l’élection présidentielle 2010 (FOSEP) sont déployés à travers tout le Togo. Placée sous le mandat de la CENI, la FOSEP a pour mission de « garantir la sécurité avant, pendant et après l’élection présidentielle, de préserver un climat de paix et de sérénité sur l’ensemble du territoire national ».
Le présent scrutin va coûter autour de 12 milliards CFA, dont 80% ont été fournis par l’Union Européenne. Les frontières terrestres du Togo sont fermées depuis mercredi 3 mars à 00h jusqu’au vendredi 5 mars à minuit. Les débits de boissons et autres lieux de réjouissances sont fermés aujourd’hui de 06 h à 18 GMT. Voilà pour les quelques données chiffrées.
Que retenir de cette campagne qui, comparativement à celle de 2005, a été bonne ? Soucieux d’effacer des mémoires sa « calamiteuse élection », pour reprendre les propos de Laurent Gbagbo concernant la sienne, le président-candidat Faure Gnassingbé a mis les gros moyens dans cette campagne.
Il a hérité d’un trésor de guerre, celui de son père. Ainsi, outre les gadgets, qu’on distribuait à gogo, alors qu’à titre de comparaison les gadgets de Fabre étaient vendus, Faure parcourait aussi le pays en hélicoptère. Ce qui lui permettait de relier des localités très distantes l’une de l’autre en un temps record et de tenir dans la foulée plusieurs meetings par jour.
Autre détail perçu lors de cette campagne, Faure s’est davantage démarqué du RPT, son parti, qui l’a investi, même s’il est vrai que, le 12 janvier dernier, il n’a pas daigné faire le déplacement au palais des congrès pour son adoubement. Signe d’une « dégnassingbisation » du Togo ? Sans doute.
Reste, et Faure le sait bien ,que le délit patronymique, le sentiment qu’ont les populations d’être prises en otage depuis des décennies par la famille Gnassingbé et que les violences de 2005 constituent autant de boulets chevillés malgré lui à son corps, lesquels pèseront dans ce scrutin en sa défaveur. Et l’opposition alors ?
Engluée dans ses contradictions internes, l’opposition a eu un retard à l’allumage. De Jean-Pierre Fabre à Yawovi Agboyibo en passant par Agbéyomé Kodjo et Bassabi Kagbara, le manque relatif de moyens et surtout les velléités de leadership causées par les égo surdimensionnés de certains ont plombé l’élan unitaire de ces opposants .
Au jour J, le constat est là : le seul challenger de Faure est Jean-Pierre Fabre, investi par l’UFC et soutenu par le FRAC (coalition d’opposants).Quid de ses atouts ? Il est un pur produit de l’UFC ayant grandi à l’ombre de son mentor, Gilchrist Olympio.
Il incarne le changement et est un homme de terrain. Les excursions de son allié Koffi Yamgnane (patron du mouvement Sursaut-Togo en langue bassar) dans la région septentrionale et celles d’Abi Tchessa (autre ami politique) en langue Kabyè ont sérieusement entamé les croupières du RPT dans le Nord, bastion traditionnel du pouvoir.
Principaux handicaps de « l’Obama togolais » : le soutien tardif de Gilchrist qui, semble-t-il, ne lui a pas donné les moyens conséquents (on est en Afrique où, souvent, le patron d’un parti détient aussi les cordons de la bourse), ainssi que la polémique qui a entouré sa désignation.
Ce 4 mars 2010, c’est le jeudi du destin pour le peuple togolais : optera-t-il pour la continuité dans la rupture avec Faure, ou pour le changement radical avec Fabre ? La seule vraie inconnue demeure l’après-présidentielle, notamment la crainte des violences. Pour l’UFC, « ELECTIONS SANS VIOLENCES = ELECTIONS SANS FRAUDES ». Bien sûr, les populations et la communauté internationale souhaitent une présidentielle apaisée. Mais certains Togolais veulent-ils vraiment cela ? – L’Observateur Paalga