Le chanteur Wyclef Jean serait sur le point d'annoncer sa candidature pour la présidence du pays, a affirmé hier un ancien président de la Chambre des députés haïtienne.
L'ex-député Pierre Éric Jean-Jacques a indiqué à l'Associated Press que l'artiste hip-hop ferait face à l'électorat comme membre de sa coalition lors du scrutin du 28 novembre.
La porte-parole de M. Jean, Cindy Tanenbaum, a refusé de confirmer ces nouvelles affirmations. Elle a mentionné que l'artiste allait faire une annonce jeudi soir, mais n'a pas voulu en indiquer l'objet.
M. Jean-Jacques, qui tentera lui-même de faire un retour à la Chambre des députés, a ajouté qu'il ferait partie de la même coalition que Wyclef Jean, nommée «Ansanm Nou Fo», ce qui signifie «ensemble nous sommes forts» en créole.
«Oui, nous avons une entente (avec Wyclef Jean). Mais il est celui qui doit l'annoncer en premier», a indiqué M. Jean-Jacques à l'AP, refusant de commenter leurs plans politiques.
Wyclef Jean est populaire en Haïti pour sa musique, mais aussi pour son travail dans Yele Haïti, une organisation qui a recueilli des millions de dollars après le tremblement de terre du 12 janvier dernier.
Des rumeurs courent depuis des mois quant à la candidature de Wyclef Jean pour la présidence haïtienne. Le chanteur n'a jamais écarté cette possibilité et a enregistré une chanson intitulée «If I Was President».
Âgé de 37 ans, le chanteur est né près de Port-au-Prince mais a passé son enfance à Brooklyn, aux États-Unis.
Des dizaines de candidats sont attendus sur la ligne de départ de la course pour la présidence haïtienne. Le nom de l'actuel ambassadeur d'Haïti à Washington, Raymond Joseph, devrait aussi figurer sur les bulletin de vote comme candidat à la présidence. Il est l'oncle de Wyclef Jean.
La liste des autres candidats probables inclut d'anciens premiers ministres, des maires et un autre musicien populaire en Haïti, Michel «Sweet Micky» Martelly.
Les candidatures doivent être enregistrées au conseil électoral d'Haïti d'ici samedi. Le directeur de l'enregistrement du conseil, Jean-Marie Lumier, a affirmé mardi ne pas avoir reçu les formulaires relatifs à une éventuelle candidature de Wyclef Jean.
Des doutes pèsent toujours sur le respect par M. Jean des conditions requises pour briguer la présidence d'Haïti. Les candidats doivent prouver avoir résidé dans le pays pour cinq années consécutives et ne pas détenir une autre citoyenneté. Les responsables électoraux ont disqualifié certains candidats pour des formalités tout en permettant à d'autres de se lancer dans la course.
En 2007, le chanteur a été nommé ambassadeur global d'Haïti par le président René Préval, qu'il avait appuyé lors de son élection en 2006. M. Préval ayant déjà été président pour deux mandats non-consécutifs, il ne peut constitutionnellement pas se porter candidat à sa succession.
Dans les dernières semaines, le compte twitter de Wyclef Jean a été inondé de demandes pour des élections transparentes, de propositions pour réduire le problème de pauvreté chronique d'Haïti et d'appels à empêcher l'expulsion du million et demi d'Haïtiens qui habitent toujours dans des camps.
Les réactions à la possible candidature de M. Jean ont été divisées à Haïti. Le musicien a un tout autre profil que les généraux, les prêtres ou les technocrates qui ont dirigé le pays, parlant à peine français et s'exprimant dans un créole teinté d'accent.
«Je vais lui donner mon vote. Tous ces gens qui ont habité Haïti n'ont rien fait pour nous», a indiqué Jean Leuis, un vendeur de pain de 22 ans.
Boséjour Leconte, un vendeur de cartes téléphoniques de 34 ans qui habite un camp depuis le tremblement de terre, n'était pas du même avis.
«Je ne crois pas qu'il ait les compétences pour être président. Je vais plutôt voter pour quelqu'un qui a de l'expérience politique», a-t-il dit.
Le prochain président haïtien devra faire face à une énorme tâche de reconstruction dans ce pays dévasté par le tremblement de terre du 12 janvier dernier.
La présidence n'a jamais été un travail facile: les leaders d'Haïti n'ont que rarement terminé leur mandat constitutionnel de cinq ans. Dans l'histoire du pays, la plupart d'entre eux ont été renversés, assassinés, se sont nommés «président à vie», ou une combinaison des trois. - AFP