Opinion de Mamoudou Kouyaté
Pour assurer son rang de leader national le président qui sera démocratiquement élu à l’issue des élections du 19 septembre 2010, doit s’appuyer sur les potentialités promotrices du pays qui sont entre autres la gestion efficace de l’exploitation d’importants gisements minéraux et un excellent potentiel agricole. Celles-ci sont jusqu’à nos jours sous exploitées du fait des chocs d’intérêts personnalisés autour des ressources disponibles, et le manque de politiques économique, énergétique et agricole adaptées aux conditions et réalités de la Guinée. Ces exigences nécessitent le maintien de la stabilité politique, la mise en œuvre d’une économie productive et la consolidation des revenus déjà acquis tout en réussissant à relancer les perspectives de croissance pour pouvoir satisfaire les attentes des populations guinéennes.
Pour le faire, il faudrait joindre toutes les capacités administratives et se donner des moyens de soutenir leurs efforts. Si nous agissons ensemble maintenant pour offrir à la Guinée le succès qui lui est naturellement destiné, nous saurons concilier la croissance indispensable à des choix de développement durable pour enfin répondre aux exigences qu’a imposées la crise économique mondiale. Ainsi la mise sur pied d’une politique rigoureuse devient indispensable pour l’évolution constante des services publics qui doivent se développer tout d’abord au rythme des besoins domestiques, puis s’adapter rapidement aux normes des marchés internationaux. Les douloureux événements qu’a connus la Guinée depuis l’indépendance en 1958 jusqu’à nos jours, interpellent la conscience d’une bonne partie de ses cadres. Il revient à nous de rebâtir une nouvelle conscience morale et politique qui prendrait en compte les garanties d’une croissance soutenue, puis l’harmonie d’une société disposée à affronter nos défis communs. Aujourd’hui la Guinée se trouve au centre de changements sans précédent dans l’histoire de sa démocratie. Nous avons en face une armée prête à céder le pouvoir et se retourner dans les casernes après les élections du 19 septembre 2010. Son chef, Général Sékouba Konaté, promet une transition réussie qui sera certainement couronnée par son défilé devant le Président élu par le peuple de Guinée.
Nous avons d’immenses richesses de sol et de sous-sol et nous avons le devoir de les développer de manière appropriée afin de transmettre les bénéfices aux prochaines générations. Toute fois, aucun résultat convenable n'a vu le jour à cause de la corruption qui a entravé les politiques publiques et détruit le capital social tout en pénalisant les pauvres qui représentent 70.1% vivant en dessous de 1,25 dollar par jour selon les statistiques de développement humain du système des Nations Unies. Ainsi se dessinent les besoins d’améliorer la transparence et d’élever le sens de responsabilité dans la gestion des ressources. Ceux-ci impliquent la consolidation des ressources humaines, le renforcement des capacités institutionnelles, et la mise en œuvre de mesures sollicitant la prévention et la lutte contre la corruption et l’impunité.
Le regard sur l’économie nationale dans les années récentes nous enseigne qu’en 2003, la situation économique n’a pas répondu à l’augmentation des recettes minières en réponse à la hausse des prix mondiaux et la demande accrue. Selon la Banque Mondiale, la croissance réelle du PIB a été de 4,2% en 2002 et a baissé à 1,2% en 2003. Le taux de croissance est relevé respectivement à 2,7% et 3,3% en 2004 et 2005 résultant particulièrement de l’expansion des exportations de minerais et certains investissements modérés dans les projets d’infrastructure. Cette croissance va s’abaisser au niveau de 2,2% en 2006 et 1,5% en 2007 selon le FMI.
L’augmentation de l’inflation atteint 5,0% en 2002 et 14,8% en 2003, avant de remonter encore plus fortement à 29,7% en 2005 et 39,1% en 2006. Cette variation coïncide avec l’effondrement de la reforme économique au cours d’une longue série de bouleversements politiques. Elle tombe à environ 23% à la fin de 2007 suite à la stabilisation économique et des mesures structurelles qui ont abouti au resserrement monétaire par la banque centrale, découlant des efforts du gouvernement de consensus. Toutefois les pressions inflationnistes ont sensiblement augmenté en 2008 à cause de la forte hausse des prix du riz et du pétrole.
Ces données macroéconomiques placent la Guinée loin des objectifs qui visent entre autres à réduire le chômage [1] , relever le défi énergétique ou le pays possède un grand potentiel hydroélectrique estimé à 1000MW dont plus de la moitié est encore non exploitée, faire prospérer le secteur agricole qui constitue un des plus importants de l’activité économique, revaloriser le secteur minier [2] qui contribue annuellement au voisinage de 1/5 du PIB depuis le début de ces deux dernières décennies, donner une âme aux infrastructures routières et le transport.
Voilà quelques défis. Ils sont réels. Si la mauvaise gestion des ressources publiques, la corruption et le manque de respect des principes démocratiques avaient tué les espoirs, aujourd’hui dans cette élection, l’espoir d’y parvenir renaît. Les guinéens attendent la création d’un gouvernement capable de réunir toutes les potentialités pour y parvenir. Auparavant
Vive la Guinée
Mamoudou Kouyaté, depuis New York
[1] La possibilité d’emploi dans le secteur public était garantie à tous les diplômés de l’université. Mais de nos jours près de la moitié des universitaires galèrent encore pour obtenir un emploi
[2] En termes de production de minerai, la Guinée se classe deuxième après l’Australie ; le premier exportateur mondial de bauxite