“Susciter la haine ethnique, susciter la violence contre une communauté, n’est pas responsable,” a dit en substance Cellou Dalein Diallo, président de l’UFDG, ce samedi 23 octobre à 12h 30 GMT, il était avec ses alliés devant la presse nationale et internationale, pour faire le point de la situation, quelques heures seulement après la «fin» de la campagne présidentielle.
Voici des extraits de son intervention choisis par AfricaLog
« Depuis cinq jours, nous assistons à un déferlement d’une répression dans les quartiers réputés fiefs de l’UFDG. D’abord par les forces de l’ordre et les forces de sécurités qui répriment sans discerner. Nous avons enregistré des cas de viols, des cas de décès et beaucoup de blessés, beaucoup d’arrestations arbitraires. Beaucoup de nos partisans sont encore détenus dans les prisons
Nous sommes rentrés avant-hier de Kindia, lorsque notre cortège est passé, nos militants ont fait l’objet d’agressions barbares de la part des militants du RPG. Et lorsque les gens quittaient le palais du peuple pour retourner chez eux paisiblement, les militants du RPG s’étaient embusqués partout au niveau de la Sig, de la Casse, à Dabondy et ils ont roué de coups nos partisans, blessant plusieurs d’entre eux. Un de nos militants est mort dans la nuit dès suite de ses blessures. Ils ont endommagé plus de soixante voitures alors que nos militants suivaient tranquillement, paisiblement le cortège. Nous avons rédigé une déclaration pour demander aux autorités de la transition de prendre leur responsabilité pour éviter que les victimes ne se fassent justice. Nous leur avons dit que ces genres de comportements devraient être repris, condamnés et sanctionnés par les autorités de la transition. Et par la même direction du RPG, qu’en attendant nous demandions à nos partisans de rester calmes afin de préserver la paix et l’unité dans le pays.
Malheureusement, au retour du professeur Alpha Condé, nous avons enregistré encore des actes de violence. Ce qui nous inquiète, c’est la tribalisation excessive du débat et de la violence. On a voulu accréditer l’idée selon laquelle les Peuhls ont décidé d’intoxiquer les autres ressortissants des autres communautés. Cela est extrêmement grave, de la part des responsables des partis qui aspirent à diriger le pays. On dit qu’il y a de l’eau empoisonnée qui circule afin que les ressortissants des autres communautés puissent mourir et que les peuhls soient seuls dans le pays. Je pense que les autorités de la transition doivent réagir parce que le bien le plus précieux que nous avons, c’est l’unité de la Nation. On doit tout faire pour préserver cela. Susciter la haine ethnique, susciter la violence contre une communauté, ce qui est en train de se faire aujourd’hui, n’est pas responsable. Toute la Guinée doit se donner la main pour dénoncer ces attitudes.
On a recruté des enfants, on les a emmenés à l’hôpital Ignace Deen pour dire qu’ils ont été intoxiqués par de l’eau. Heureusement que les médecins ont démenti. Il n’y avait aucun jeune qui a été intoxiqué. Ils ont mobilisé les femmes pour insulter Sidya Touré. Elles sont venues entourer l’hôpital Ignace Deen et demander que les médecins établissent que ces jeunes ont été intoxiqués par malheureusement, il faut le dire, par des peuhls. Cela est dangereux. Il y a des ressortissants de toutes les communautés dans mon parti, de même que dans le RPG.
Tribaliser la compétition à ce niveau jusqu’à accuser une communauté, cela est irresponsable parce que à la base chez les militants de nos deux partis, il y a la compétition, pas d’animosité! Nous avons été bien accueillis à Siguiri, bien accueilli à Kankan. Nous avons fait le tour de la ville, il n’y a pas eu de jets de pierres, pas eu d’injures. C’est au niveau de l’élite, de la direction nationale que cela commence.
Aujourd’hui, à Siguiri, on s’attaque aux boutiques des peuhls, on s’attaque aux résidences de la communauté peuhle. Tout cela est suscité. Il faut susciter la haine. Il faut que les hommes politiques soient responsables. Il faut que les autorités, les forces de sécurités acceptent de prendre leur responsabilité pour maintenir la paix, la cohésion sociale et l’unité nationale, c’est le bien le plus précieux.
On doit aller aux élections dans les mêmes conditions que le premier tour. La carte électorale ne doit pas être modifiée, mais on l’a accepté pour que les bureaux de vote soient rapprochés des électeurs. Nous avons créé 1500 nouveaux bureaux de vote pour rapprocher les électeurs des bureaux de vote. Mais, tout le monde connaît les rapports de force tels que découlant au premier tour.
On vient de nous rendre compte qu’ils étaient en train d’organiser une fraude à grande échelle. Nous devons de découvrir qu’il y a des listes électorales. Heureusement que le RPG assume les avoir distribués. Vous avez suivi Madame Makalé Traoré du RPG qui dit que le RPG, à la place de la Céni, va afficher les listes électorales sur l’ensemble du territoire. Cette générosité du RPG, on se rend compte que des noms ont complètement changé. Quelqu’un est allé voir la liste, il y a son propre numéro, mais ce n’est pas son nom Thierno Habib Diallo, c’est un autre nom qui est là-bas. Ce genre de pratique, ce n’est pas de la démocratie.
On a pris à Sangarédi, avec le secrétaire général de la section du RPG, un carton de bulletins de vote. C’est la Fossepel qui a procédé à l’arrestation de ce monsieur et à la saisie ces documents.
Partout dans le pays, on nous dit que les listes électorales affichées ne correspondent plus à celles du premier tour, dans les bureaux de vote. Mais comme le RPG a dit publiquement dans une radio, qu’il se substituait à la Céni pour afficher la liste électorale, il faut qu’il donne des explications. Il ne faut pas que les responsables de la Transition restent indifférents. Nous avons rencontré hier (22 octobre Ndlr), le nouveau Président de la Céni. On lui a expliqué ce qu’il y avait. À Matam, un certain M. Mansaré, a reconnu que la liste qu’il a, lui a été remise par un responsable du RPG, membre de la Céni, pour l’afficher. Bien qu’il y avait la liste officielle qui a été affichée, mais ils sont venus dire aux gens: la liste officielle n’est pas la bonne, voilà la bonne liste. Et ce sont ces genres de listes qui circulent aujourd’hui dans tout le pays.
Je ne sais pas la conception que les gens se font de la démocratie. Je comprends qu’il y ait un handicap, que l’on se dit les alliances que j’ai, font 19 % de suffrages exprimés au premier tour, ça constitue un handicap, il faut relever cela. Et le seul moyen, c’est de séduire les électeurs, ce n’est pas organiser un hold-up électoral.
Nous nous sommes battus pour que Lounsény Camara soit changé. Pour plusieurs raisons: les irrégularités qui ont précédé à sa désignation sont en violation flagrante des dispositions de la loi portant création de la Céni et des dispositions du règlement intérieur de l’institution. Mais en plus, sa responsabilité est avérée dans la subtilisation et la disparition des résultats d’au moins 109 des bureaux de vote de la circonscription de Ratoma, dont chacun sait que c’est mon fief. Mais la non-transmission des PV de centralisation, partielle même, sans les 109 bureaux de vote, à la Cour suprême, lui est attribuée. Nous ne pouvions pas accepter que ce Monsieur puisse présider la Céni, parce qu’il a déjà mis en évidence son hostilité vis-à-vis du candidat que je suis. Donc ensemble, nous avons dit que nous n’avons pas de choix, nous voulons simplement une personnalité neutre, de préférence consensuelle, pour diriger la Céni pendant ce second tour particulièrement sensible. Le Général Sékouba a finalement pris ses responsabilités et a désigné le Général Sangaré, nous voulons le féliciter pour cela.
Le Général Sangaré nous a rendu visite hier (22 octobre Ndlr), nous lui avons assuré de notre coopération, pour l’organisation d’un scrutin sincère pour le second tour. Nous lui avons demandé de tout faire pour réunir très rapidement, les conditions d’une élection libre et transparente afin que les Guinéens choisissent librement leur Président. Et nous lui avons assuré que si ces conditions sont réunies et que si ce scrutin est organisé, nous sommes persuadés de l’emporter, mais si les suffrages du peuple de Guinée vont à notre adversaire, nous serons les premiers à le féliciter, parce que nous sommes des démocrates. Nous nous sommes battus pour que la souveraineté du peuple soit respectée. Nous étions au stade du 28 septembre où nous avions été molestés, parce que nous voulions que les Guinéens choisissent enfin leur Président, qui lui donne la légitimité d’agir, d’engager les réformes nécessaires à l’amélioration des conditions de vie de tous les Guinéens.
Par rapport au respect du verdict des urnes, nous avons pris un engagement aussi bien à Ouaga dans le protocole d’entente que dans le Code de bonne conduite, nous avons affirmé, haut et fort que nous sommes des démocrates. C’est-à-dire prêts à nous soumettre à la volonté du peuple, mais nous voulons que ce soit la volonté du peuple, que ce soit le peuple qui départage les candidats et non les fraudeurs.
Par rapport à l’organisation du second tour, le Général nous a dit que si on voulait une élection transparente, la date du 24 octobre, n’était pas tenable. Il est vrai que dans l’histoire des démocraties contemporaines, on n’a jamais enregistré un délai aussi long, entre le premier tour et le second tour d’une élection présidentielle. Il est vrai que nous souhaitons que ce second tour ait enfin lieu, mais nous souhaitons aussi que l’élection se déroule dans la transparence et que le scrutin soit sincère, que le verdict des urnes soit respecté. Nous avons donc tacitement marqué notre accord pour le report, compte tenu de tout ce qui a été créé, tout le dispositif de fraude qui a été mis en place : le vol récent de 17 ordinateurs, destinés à la centralisation des résultats en est un des exemples.
Pendant longtemps nos militants ont dénoncé des pratiques troublantes. Les militants du RPG passaient dans les quartiers, donnaient entre 10 et 50 000 francs guinéens aux détenteurs des cartes d’électeurs pour qu’ils en fassent la photocopie et pour prendre les numéros des cartes et changer les noms de leurs propriétaires.
Il y a le jeune Thierno Habib Diallo, qui nous a appelé tout à l’heure, pour nous dire qu’il a vu sur la liste affichée à son bureau de vote, que son numéro, sa filiation sont bien notés mais le nom, n’est pas le sien.
Nous sommes vraiment étonnés, déçus, de voir que le combat se mène à ce niveau. Nous pensions que le combat était de savoir comment séduire les électeurs. C’est le débat d’idées pour que la Guinée soit une nation démocratique, pour que l’unité, la convivialité soient respectées. Malheureusement, c’est organiser des fraudes massives, à travers des listes parallèles, des cartes d’électeurs parallèles ne peuvent pas être justifiées.
Lorsque nous avions senti que l’adversaire voulait du temps, nous nous étions convaincus que c’est pour séduire davantage l’électeur, mais si c’est pour organiser des choses comme ça, nous sommes inquiets. Mais nous comptons sur la volonté du Général Sangaré, qui a promis de tout mettre en œuvre pour organiser un scrutin transparent. À cet égard, nous lui avons assuré de notre coopération.
Par rapport aux violences qu’on enregistre dans le pays, nous avons été extrêmement choqués, de voir que les pratiques qu’on a commis le 28 septembre et le lendemain, se répètent aujourd’hui dans les mêmes quartiers.
Nous voudrions lancer un appel au Président de la Transition, aux autorités de la Transition, pour qu’ils prennent leurs responsabilités pour éviter que ce pays ne sombre dans la violence et dans la guerre civile. On ne peut plus parler de droits de l’homme, des femmes ont été violées, des gens ont été arrêtés dans leur propre maison, bastonnés, emprisonnés, humiliés. Et aujourd’hui, le RPG suscite la haine ethnique et multiplie les provocations vis-à-vis de nos militants. Ce n’est pas ça la démocratie. Ce n’est pas juste, ce n’est pas responsable.» - AfricaLog.com