Quatre dirigeants africains représentant la Cédéao et l'Union africaine sont arrivés lundi à Abidjan pour discuter avec Laurent Gbagbo, qui devrait les informer qu'il n'a nullement l'intention de céder le pouvoir à son rival, Alassane Ouattara.
Les présidents béninois, capverdien et sierra-léonais, mandatés par la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), ont déjà rencontré le président sortant la semaine dernière; ils seront rejoints cette fois par le Premier ministre du Kenya, Raila Odinga, dépêché par l'Union africaine et qui s'est prononcé pour un recours à la force si Laurent Gbagbo s'accroche au pouvoir.
Mais Abraham Doukouré, ambassadeur de la Cédéao en Côte d'Ivoire, a précisé qu'il n'était pas question de remettre un ultimatum à Laurent Gbagbo, comme mardi dernier. "Les discussions vont se poursuivre", a-t-il dit à Reuters, ajoutant que les émissaires rencontreraient également Alassane Ouattara.
Le président sortant, qui s'appuie sur le soutien du Conseil constitutionnel et de l'armée, a réaffirmé au cours du week-end qu'il était prêt au dialogue mais a prévenu qu'Alassane Ouattara, désigné vainqueur de l'élection présidentielle du 28 novembre par la commission électorale, ne devait pas compter "sur des armées étrangères pour venir le faire président". Un de ses porte-parole a précisé qu'il n'accepterait pas de partir.
Pour sa part, Guillaume Soro, Premier ministre du gouvernement installé par Ouattara, a de nouveau évoqué l'option militaire.
"S'il ne donne pas son accord de partir pacifiquement aujourd'hui, il ne reste à la Cédéao que l'option militaire et mon gouvernement s'associera à toute initiative qui envisage une force légitime pour instaurer la démocratie en Côte d'Ivoire", a-t-il dit à la chaîne de télévision France 24.
"S'il quitte pacifiquement le pouvoir, il pourrait bénéficier d'avantages d'ancien chef d'Etat. C'est pourquoi nous souhaitons que M. Gbagbo (...) accède à la demande de la Cédéao. Qu'il abrège la souffrance des Ivoiriens en quittant le pouvoir pacifiquement", a ajouté Guillaume Soro.
18.000 Réfugiés au Libéria
Alassane Ouattara et son administration sont retranchés dans l'hôtel du Golf à Abidjan, sous la protection de 600 soldats de l'Onu. Ils font valoir que l'armée ivoirienne est divisée et que la plupart des militaires n'opposeraient guère de résistance face au déploiement d'une force suffisante de la Cédéao.
Mais les dirigeants ouest-africains ne semblent guère enclins à prendre le risque d'un conflit. Le Nigeria, première puissance militaire régionale, a ses propres problèmes de sécurité à régler, accentués par l'élection présidentielle d'avril prochain.
Depuis le second tour de la présidentielle, la Côte d'Ivoire vit dans la crainte d'un embrasement, ce qui a conduit plus de 18.000 personnes à quitter le pays pour chercher refuge au Liberia voisin.
Plus de 170 personnes ont été tuées dans les violences post-électorales, notamment le 16 décembre lors d'affrontements en marge d'une manifestation de partisans de Ouattara qui tentaient de marcher sur le siège de la radiotélévision ivoirienne (RTI), considérée comme une machine de propagande au service de Laurent Gbagbo.
Les Etats-Unis et l'Union européenne, qui ont endossé la victoire de Ouattara, ont imposé un embargo sur les voyages de Gbagbo et de ses proches du premier cercle.
La Banque mondiale et la Banque centrale d'Afrique de l'Ouest ont annulé sa signature, exerçant une pression financière sur le président sortant.
Le président du club de Londres des créanciers privés a fait savoir que la Côte d'Ivoire n'avait pas remboursé près de 30 millions de dollars d'intérêts, sur un emprunt de 2,3 milliards de dollars, comme prévu à l'échéance du 31 décembre. Il a toutefois souligné qu'il existait une période de grâce de 30 jours et s'est dit persuadé que le pays paierait. - Reuters