Le président ivoirien reconnu par la communauté internationale Alassane Ouattara était de retour dimanche à Abidjan au lendemain d’une offensive de militaires fidèles à son rival, le chef d’Etat sortant Laurent Gbagbo, qui a fait au moins une dizaine de morts.
"Il est rentré au Golf hôtel d’Abidjan", où il vit retranché sous blocus des forces de M. Gbagbo depuis fin 2010, a annoncé à l’AFP son entourage, sans préciser le moyen de transport utilisé.
Le camp Gbagbo avait interdit de vol les "aéronefs" de la mission de l’Onu en Côte d`Ivoire (Onuci) et de la force française Licorne, utilisés pour le transport des personnalités du camp Ouattara. Mais cette interdiction avait été rejetée tant à Paris qu’à New York.
Dans un communiqué, les services de M. Ouattara ont confirmé ce retour "après un bref séjour à l’étranger, qui l’a conduit successivement à Addis Abeba, en Ethiopie, du 9 au 11 mars 2011, et à Abuja au Nigeria du 11 au 12 mars 2011".
M. Ouattara a exprimé "ses sincères remerciements à l’Union africaine, au Conseil de paix et de sécurité, au Haut panel des chefs d’Etat, ainsi qu’à la Cédéao (Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest), pour leurs efforts inlassables en vue du triomphe de la démocratie en Côte d’Ivoire".
La date de son retour n’a pas été officiellement donnée mais, selon certaines informations, il serait revenu samedi soir.
Parti mercredi, il avait fait sa première sortie officielle depuis le début de la crise née de la présidentielle de novembre pour assister jeudi au sommet de l’Union africaine à Addis Abeba. L’UA l’a reconnu comme président élu mais cette position a été catégoriquement rejetée par le camp Gbagbo, confirmant le blocage politique.
M. Ouattara s’est ensuite rendu au Nigeria et au Burkina Faso. Cette dernière étape chez un allié de poids n’a pas été mentionnée mais a été confirmée de sources concordantes.
Ce retour intervient au moment où les habitants d’Abobo, quartier nord d’Abidjan et fief des partisans -civils ou armés de M. Ouattara, comptaient leurs morts après l’offensive samedi des forces pro-Gbagbo.
L’opération ne semblait pas pour l’heure avoir fait bouger les lignes, et Abobo demeurait un nid d’insurgés. Aucun bilan global n’a été fourni mais il atteint au moins une dizaine de morts, selon des constatations de journalistes de l’AFP et de témoins.
Quatre corps, criblés de balles et partiellement dévêtus, gisaient sur une route d’Abobo. Les victimes paraissaient âgées d’une vingtaine d’années. Ces corps ont été vus dans la zone du Plateau-Dokui, près de la route du zoo.
Un habitant a affirmé avoir vu quatre autres corps, dans un autre secteur, la zone de la Sodeci, à l’entrée sud du quartier.
Le bilan pourrait être plus élevé. Un peu plus tôt, à côté de l’église Sainte-Monique d’Abobo, un corps recouvert d’un grand sac noir était visible.
Une habitante a également rapporté à un témoin rencontré par l’AFP avoir vu "dans un bas-fond" d’Abobo deux autres corps. Mais il n’a pas été possible de vérifier cette information dans l’immédiat.
Selon une source du camp Ouattara, il pourrait y avoir "une dizaine, une douzaine" de morts.
Le camp Ouattara avait dénoncé samedi des "tueries aveugles" de "civils innocents", qualifiant l’opération militaire, la première d’envergure menée par les forces pro-Gbagbo depuis le début de la crise, d’"offensive du désespoir".
Aucun tir d’arme lourde n’a été rapporté depuis samedi soir. La vie reprenait progressivement, les commerces avaient rouvert, les minibus circulaient, des habitants se rendaient à l’église. Mais dans certains secteurs la tension restait palpable, et des habitants préféraient faire leurs valises.
Quartier le plus peuplé d’Abidjan avec quelque 1,5 million d’habitants, Abobo est devenu l’épicentre de la crise post-électorale, qui a fait près de 400 morts dans le pays selon l’ONU. - AFP